BFM Business
Conso

Fin du broyage des poussins mâles: la facture sera payée par la grande distribution

placeholder video
L'élimination des poussins mâles dans la filière des œufs et des poules pondeuses sera officiellement interdite le 1er janvier prochain. Une mesure qui a nécessité de lourds investissements.

Le broyage et le gazage des poussins mâles, c'est bientôt fini en France. L'élimination des poussins mâles, inutiles pour la filière des œufs et des poules pondeuses, sera officiellement interdite le 1er janvier 2023. La filière s'y prépare depuis longtemps, au prix d'investissements massifs: la quasi-totalité des couvoirs français s'est équipée de machines d'ovosexage, une technologie permettant de déterminer le sexe des embryons dans l'œuf lors des premiers jours et donc d'éliminer les mâles avant l'éclosion. Dans d'autres cas, rares, les oiseaux mâles seront élevés pour leur viande.

Une grande partie de cette facture sera payée… par la grande distribution. La fin de l'élimination des poussins mâles occasionne un surcoût de 50 millions d'euros par an: pour le financer, un système de cotisation a été validé le mois dernier par un accord interprofessionnel. Pour chaque œuf vendu, un montant d'un peu plus d'un demi-centime d'euro (0,0059 euro) sera pris à la grande distribution par les centres d'emballages, qui reverseront la somme à l'interprofession (CNPO). Le CNPO, enfin, versera aux couvoirs une indemnité de 1,11 euro pour chaque œuf ovosexé ou mâle élevé.

Des œufs pas forcément plus chers

Si la grande distribution n'augmentera pas forcément le prix des œufs, elle répercutera probablement cette cotisation sur d'autres produits. Plus concrètement: le client final ne paiera pas plus cher ses œufs, mais ce demi-centime supplémentaire se retrouvera tout de même sur son ticket de caisse, noyé dans les marges du supermarché. Considérant que la fin de l'élimination des poussins mâles résulte surtout d'une demande des consommateurs, et qu'ils sont prêts à payer plus cher pour cela, la filière estime qu'il est légitime qu'ils prennent en charge le surcoût.

"On doit produire ce qu'il se vend, ce que le consommateur souhaite et surtout ce qu'il est prêt à payer", a souligné Yves-Marie Beaudet, président du CNPO, lors d'une conférence de presse.

Pour l'heure, cette cotisation de 0,0059 euro par œuf couvre tous les frais des couvoirs, mais un suivi sera mené par l'organisme FranceAgriMer dans les prochaines années pour affiner le montant – des économies d'échelle pourraient permettre, par exemple, de l'abaisser. Surtout, l'interprofession aimerait élargir le paiement de cette cotisation à l'industrie agroalimentaire et à la restauration, qui n'ont pas été incluses dans l'accord, n'étant pas membres du CNPO. Par ailleurs, l'État a participé à hauteur de 10,5 millions d'euros à la mise en place des machines d'ovosexage.

Vers une interdiction européenne ?

Regardant les pays voisins, la filière française a réitéré son appel à une harmonisation européenne pour éviter toute distorsion de concurrence. L'Allemagne, qui a également interdit le broyage des poussins mâles, "a fermé un tiers de ses couvoirs" et "nous ne voulons pas la même chose en France", a avancé Yves-Marie Beaudet. "Nous avons besoin de construire une solidité européenne", a affirmé le ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau, confirmant que le gouvernement plaidait pour une interdiction à l'échelle européenne.

Jérémy Bruno Journaliste BFMTV