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6.200 tonnes en 2024: comment la cancoillotte a "retrouvé ses lettres de noblesse" et veut désormais séduire les sportifs

Un pot de cancoillotte (photo d'illustration).

Un pot de cancoillotte (photo d'illustration). - Wikimedia Commons

Spécialiste fromagère de Franche-Comté, la cancoillotte gagne de nouveaux consommateurs, misant notamment sur sa composition protéique et peu grasse.

La cancoillotte déborde des terres comtoises. Profitant d'une nouvelle jeunesse, l'emblématique spécialité fromagère de Franche-Comté gagne de nouveaux adeptes dans l'Hexagone: 6.200 tonnes de cancoillotte ont été produites en 2024, soit l'équivalent de 25 millions de pots de 250 grammes, contre 4.900 tonnes en 2017, selon les chiffres de l'Association de promotion de la cancoillotte (APC). En sept ans, les volumes de production ont ainsi grimpé de presque 27%.

La cancoillotte bénéficie d'un "surcroît de consommation" depuis quelques années en France, confirme le vice-président de l'APC, Thibaut Mauron, auprès de BFM Business. Ce sursaut "était déjà constaté auparavant, mais il l'est encore davantage depuis l'obtention de l'IGP", observe-t-il.

En mai 2022, la filière a officiellement décroché une indication géographique protégée (IGP) – un label européen un peu plus souple que l'appellation d'origine protégée (AOP) – pour ce classique de la gastronomie franc-comtoise, que l'on retrouve dans la quasi-totalité des réfrigérateurs régionaux. Tous les pots de cancoillotte apposent aujourd'hui son logo, "des géants comme Lactalis aux petits producteurs en passant par les marques de distributeur", souligne Thibaut Mauron, évoquant un travail commun de tous les acteurs concernés pour l'obtention de l'IGP.

Ail, kirsch et échalotes

Indéniablement, les retombées ont été positives pour la notoriété de la cancoillotte. Mais les ventes avaient déjà repris une pente ascendante depuis le milieu des années 2010, à la faveur d'un élargissement de la gamme dans les supermarchés, poussé par les marques de distributeur (MDD). "Tous les distributeurs nationaux ont voulu développer la cancoillotte en MDD et l'ont ouverte sur des zones qui n'étaient pas historiquement consommatrices, comme le Sud-Ouest" ou la région parisienne, retrace-t-il, ce qui a créé un "appel d'air" pour la consommation de la spécialité comtoise.

Ail, champignons, vin du Jura, kirsch, échalotes… Dans les magasins, la gamme s'est aussi nettement élargie par les arômes pour glaner de nouveaux adeptes, entrant sur le terrain des fromages frais à tartiner. Loin d'être une audace moderne, l'aromatisation est une habitude ancienne. C'est même l'un des arguments phares de la cancoillotte, l'une des rares spécialités fromagères françaises dont le cahier des charges de l'appellation autorise aujourd'hui la présence d'aromatisants dans la liste d'ingrédients – citons aussi le munster de l'Alsace voisine, qui peut être agrémenté de carvi vosgien.

Le travail est encore loin d'être terminé. Hors de la région, la cancoillotte n'en est encore qu'à ses premiers pas, car ces premiers résultats positifs résultent aussi d'un long travail de communication mené depuis le début des années 2000 par la filière comtoise pour infléchir des ventes en berne. La cancoillotte était "un produit un peu vieillissant", souligne Thibaut Mauron. "On s'est réuni ensemble pour communiquer différemment et de manière coordonnée", retrace-t-il. L'obtention de l'IGP, elle, a joué son rôle en ayant "redonné ses lettres de noblesse" à la cancoillotte, se réjouit-il.

Protéique et peu grasse

La cancoillotte a investi les réseaux sociaux et multiplié les nouvelles recettes pour sortir du seul hiver en capitalisant sur la praticité et l'accessibilité de son utilisation, pour essayer de s'inviter au menu des apéritifs, des repas végétariens ou des barbecues estivaux. "Les Comtois connaissent bien le produit, mais les autres n'arrivent pas forcément à l'appréhender", observe Thibaut Mauron. Surtout, avec un taux de matière grasse de 8% en moyenne et un taux important de protéines, elle a une carte à jouer pour glaner de nouveaux consommateurs adeptes d'un mode de vie plus sain.

Pour l'avenir, la filière mise effectivement sur les sportifs. Des partenariats ont été noué avec des triathlons, celui de Saint-Jean-de-Monts en Vendée par exemple, pour se faire connaître dans le monde du sport. Au ravitaillement, des triathlètes seront peut-être étonnés d'en trouver sur la table.

Spécialité fromagère (et non fromage), la cancoillotte est obtenue à partir d'un mélange de metton (c'est-à-dire du lait cru caillé, écrémé et chauffé) et d'eau ou de lait, auquel est ajouté du beurre en fin de préparation, ainsi qu'un éventuel aromatisant.

Selon l'Association de promotion de la cancoillotte (APC), la filière comptait une vingtaine de fabricants de metton et/ou de cancoillotte en 2024, ainsi que quatre producteurs fermiers. Deux nouveaux producteurs fermiers sont attendus dans l'année en cours.

Jérémy Bruno Journaliste BFMTV