Changement climatique: le coût des sinistres grimpe (et ce n'est que le début)

Au moins 118 morts. C’est le lourd bilan humain des intempéries dévastatrices en Europe. Des drames mais aussi un coût financier qui risque d'être très important. Et avec le changement climatique la facture de ces aléas risque d’exploser à l’avenir.
La France n’a d'ailleurs pas été épargnée ces derniers mois. On l’a vu en octobre dernier dans les Alpes-Maritimes où la tempête Alex a dévasté la vallée de la Roya pour un coût estimé à 200 millions d’euros par les assureurs.
En avril dernier, on se souvient de ces images spectaculaires de ces torches allumées à la hâte dans les vignes. Là encore un coût énorme: 3 jours de gel ont occasionné 1 milliard d’euros de dommages au niveau national dans le vignoble et l'arboriculture.
Et puis en juin la France a aussi connu une vague d’inondation dans plusieurs départements d’Ile-de-France mais aussi dans l’Aisne, la Gironde, l’Oise… Des événements qui ont entraîné des destructions estimées à 550 millions d’euros par la Fédération Française de l'Assurance (FFA).
Des événements qui ne sont pas isolés. Les sinistres climatiques se multiplient depuis quelques décennies. Et ils coûtent de plus en plus chers aux compagnies d’assurances.
Les chiffres du rapport annuel de la FFA sont éloquents. La facture annuelle des sinistres climatiques n’a jamais été aussi élevée qu’aujourd’hui. Elle a triplé depuis la fin des années 80.
- 1984-1989 : 1,2 milliard d'euros par an
- 1990-2009 : 2 milliards d'euros par an
- 2010-2019 : 2,8 milliards d'euros par an
- 2016-2020 : 3,6 milliards d'euros par an
130 à 200% de hausse pour les primes d'assurance
Et l’avenir s’annonce encore plus inquiétant. L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) qui dépend de la Banque de France a fait une simulation entre juillet 2020 et avril 2021 auprès des assurances et des banques pour estimer les coûts à horizon 2050 des sinistres liés au changement climatique. Ce "stress test" se fonde sur l'un des pires scénarios du Giec, à savoir un réchauffement compris entre 1,4 et 2,6°C d'ici 30 ans.
"La hausse attendue de la sinistralité et des primes pour certains risques d’assurance est particulièrement notable, estime l'ACPR. Sur l’ensemble du territoire français, les sinistres liés aux catastrophes naturelles pourraient être multipliés par cinq ou six dans les départements les plus touchés."
Dans ce scénario c'est le département des Alpes-Maritimes qui serait le plus touché. La facture des coûts des sinistres y est déjà la plus élevée de France avec une moyenne de 78 euros par habitant en 2019. Elle devrait doubler d’ici 2050. A titre de comparaison, ce coût n'est que de 13 euros dans les Bouches-du-Rhône limitrophe ou de 5 euros dans le Rhône.
Pour faire face, les compagnies d'assurance n’auraient d'autre choix que d'augmenter les primes d’assurance. Une inflation considérable de 130 à 200% selon l'étude, soit une hausse deux à trois fois supérieure au PIB.
Avec le risque qu'avec le temps les populations se détournent de l'assurance ou que les compagnies rechignent à assurer les gens dans les départements les plus à risque. Or selon un rapport d'Axa en collaboration avec le Centre for Risk Studies de la Judge Business School de Cambridge, le retour à la normale est de un an dans les pays et régions où l'assurance est très développée et de quatre ans dans ceux qui sont faiblement assurés.
Seule solution: l’Etat doit faire de la prévention pour limiter l’impact de ces événements climatiques.
Pour les inondations, la construction de digues est une solution efficace, tout comme les systèmes d’alerte qui informent la population en amont de l’arrivée imminente d’une catastrophe, détaille dans une tribune Jérôme Bergé, qui est responsable risques et assurances dans un groupe de transport. Il faut maîtriser le développement et l’aménagement des zones considérées à risques, en particulier dans les zones densément peuplées. Dans le bâtiment, les normes doivent évoluer pour obtenir une meilleure résistance aux événements climatiques."
