BFM Business
Economie

Bio, Vegan, CBD...: le marché des aliments pour animaux ne connaît pas la crise

Image d'illustration - Un chaton.

Image d'illustration - Un chaton. - Flickr

L'offre se diversifie et monte en gamme tandis que les consommateurs dépensent toujours plus pour leurs compagnons à quatre pattes. Les industriels renforcent leurs capacités de production.

S'il y a un marché qui semble hermétique à toute crise, c'est bien celui des aliments pour animaux de compagnie. Il faut dire que les étoiles restent bien alignées. La hausse continue du nombre de compagnons à quatre pattes, à plus de 22 millions d'individus, essentiellement des chats présents dans 50,1% des foyers (contre 19 millions en 2000), des consommateurs prêts à dépenser plus et la stratégie de montée en gamme des industriels continuent de porter les ventes à des niveaux assez stratosphériques.

L'an passé, elles ont dépassé en France la bagatelle de 4,3 milliards d'euros dont la moitié générée en grande distribution. En dix ans, ces ventes ont bondi de 40%, selon les chiffres de la Fédération des Fabricants d’Aliments pour Chiens, Chats, Oiseaux et autres animaux familiers. Pour Nielsen, les dépenses annuelles ont augmenté de 36% entre 2007 et 2017.

Et 2020 devrait être un bon millésime puisque les périodes de confinement semblent avoir dopé le désir d'adoption chez les Français. Le marché devrait afficher une croissance de 3% cette année.

Un marché à plus de 4 milliards d'euros

La SPA constate cet automne des pics d'adoption supérieurs d'un tiers à ce qui est observé habituellement mais il faut relativiser ces chiffres, pendant le premier confinement, il était impossible d'adopter. Un effet rattrapage est donc à prendre en compte.

Pour autant, cette croissance est également portée par de profondes évolutions de la demande auxquelles l'industrie a du s'adapter. Schématiquement, le "petfood" suit de près les tendances de l'alimentation humaine qui met désormais l'accent sur le sain et le végétal et se méfie grandement de la nourriture industrielle.

Ces nouvelles tendances se sont traduites par une forte hausse de la demande et de l’offre en produits premium, bio et naturels, voires sans gluten et vegans, comme le souligne Xerfi dans sa dernière étude sur ce marché. On observe également une recrudescence des produits d’origine France. Les propriétaires d'animaux sont clairement prêts à mettre la main à la poche pour choyer leur animal.

Bio, vegan, sans gluten...

Ainsi, le marché du pet food naturel devrait bondir de 110 millions d'euros en 2019 à 270 millions d'euros en 2021.

Selon un récent sondage, 79% des propriétaires pensent que la qualité de la nourriture de leur animal devrait être équivalente à la leur. Ils s’attendent à trouver des produits 100% naturels, sans conservateur, sans arôme artificiel et recherchent les listes d’ingrédients les plus simples possible.

D'où l'émergence de nouveaux acteurs qui viennent titiller les géants du secteur que sont le suisse Nestlé/Purina et l'américain Mars/Royal Canin (69% de parts de marché à eux deux).

On peut citer l’espagnol Affinity Petcare qui a "réussi à percer dans les rayons des grandes surfaces alimentaires, où il pèse désormais 10% des ventes en valeur grâce à une offre très valorisée et ultra segmentée (en fonction de la race, de l’âge, du mode de vie, de la taille des animaux, etc.)", note le cabinet d'études.

Certains proposent des "superaliments" avec des graines de chia comme Vitakraft ou encore des croquettes au CBD, ce dérivé du chanvre aux propriétés relaxantes...

L'industrie s'adapte

Les acteurs historiques doivent s'adapter afin d'inspirer confiance. Les produits montent en gamme et se diversifient avec ce fameux accent santé/bio et des opérations de croissance externes sont menées.

Nestlé/Purina a ainsi mis l'accent sur la "natutralité" de ses produits et s'est engagé à supprimer tous les colorants artificiels d'ici à 2023. Il a également lancé Beyond bio sa première référence bio pour chiens, labellisée AB, ne contenant que des ingrédients bio et français.

Nestlé renforce également ses capacités de production. Le géant suisse a ainsi annoncé il y a quelques jours un nouvel investissement de 48 millions d'euros dans son usine Purina Petcare d'aliments pour animaux de Marconnelle dans le Pas-de-Calais. Ce site va bénéficier de deux nouvelles lignes de production notamment pour la marque Purina One, de quoi augmenter la production de 35.000 tonnes par an. Le centre de distribution sera de son côté agrandi de 3800 mètres carrés.

Un renforcement qui devrait déboucher sur des recrutements, le site emploie à ce jour 400 personnes. L'usine avait déjà bénéficié d'un investissement de 60 millions d'euros en 2017. De quoi consolider la position de leader du groupe en France qui opère cinq sites de production d'aliments pour animaux en France pour un chiffre d'affaires d'environ 1 milliard d'euros par an.

Montée en puissance du Web

Cet investissement illustre néanmoins un rétropédalage du géant suisse qui avait annoncé début 2019 un plan de restructuration pour ces activités en France prévoyant la suppression de 231 emplois sur trois ans (via des départs volontaires) notamment à Marconnelle où 18 suppressions étaient prévues.

De son côté, Mars a renforcé ses positions dans le petcare en Europe. Le groupe américain a en effet racheté le réseau de cliniques AniCura (200 cliniques dans 7 pays européens) pour 2 milliards d'euros. Un investissement qui lui permettra d’assurer des débouchés supplémentaires pour ses gammes de produits vétérinaires.

Les modes de distribution évolument également. L'hégémonie de la grande distribution (qui a longtemps concentré son offre sur l'entrée de gamme) s'effrite année après année à mesure que la demande se concentre sur des produits de plus en plus spécifiques.

"La demande sera encore plus dynamique sur les circuits alternatifs (jardineries, animaleries, internet etc.). Le e-commerce, qui représente désormais plus de 13% du marché contre à peine 1% en 2010, continuera de gagner du terrain dans les années à venir", précise l'étude.

Sentir les évolutions du marché

"Certains opérateurs commercialisent d’ailleurs la totalité de leurs produits en ligne, à l’image de Natura Plus Ultra Pet Food (5,4 millions d'euros de chiffre d’affaires en 2017) qui propose à travers son site web des formules d’abonnement à plus de 25.000 clients", souligne Xerfi.

On comprend alors mieux pourquoi Nestlé a racheté Wamiz en début d’année 2018, leader français des sites Web de contenus spécialisés dans les animaux de compagnie (près de 6 millions de visiteurs uniques mensuels).

"La prise de contrôle de l’influenceur est une arme redoutable pour le groupe Suisse qui peut ainsi espérer de belles retombées commerciales, à la fois pour mieux sentir l’évolution de la demande", analyse Xerfi.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business