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Arnaud Lagardère, Bernard Arnault et Vincent Bolloré discutent d’un découpage d’Hachette

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Les trois hommes ont entamé des négociations qui se focalisent sur une vente des activités internationales d’Hachette à Vivendi. En échange de quoi Arnaud Lagardère pourrait obtenir au moins 250 millions d’euros pour mettre fin à la commandite de son groupe. Bernard Arnault souhaite conserver les médias au sein du groupe Lagardère.

Il n’y aura pas de guerre entre Bernard Arnault et Vincent Bolloré. Cette fois, tout le monde s’est mis autour d’une table pour discuter de l’avenir d’Arnaud Lagardère et de son groupe. Selon plusieurs sources, les trois protagonistes ont entamé il y a quelques semaines des discussions pour trouver un accord. En jeu: négocier un "partage du groupe pour stopper les assauts de Vivendi" explique une source, dont le groupe est piloté par Vincent Bolloré.

Vivendi, le premier actionnaire de Lagardère avec 26%, menace de s’inviter à son conseil de surveillance lors de sa prochaine assemblée générale en mai prochain. Allié au fonds Amber, qui détient 20%, et soutenu par le Qatar, qui dispose de 20% des votes, ils sont sûrs d’y prendre place. Pour éviter une guerre sans merci, Arnaud Lagardère n’a d’autres choix que de négocier un accord. Il est aidé par son nouvel associé, Bernard Arnault qui pèse lourdement dans la négociation et directement avec Vincent Bolloré.

Le partage d’Hachette

L’enjeu réside aujourd’hui sur l’avenir de la pépite de Lagardere: le groupe d’édition Hachette. Selon plusieurs sources, les discussions tournent autour d’un découpage d’Hachette entre ses filiales à l’international et la France. La première irait à Vivendi, qui pourrait ainsi la rapprocher de son éditeur maison, Editis, surtout présent en France. La seconde resterait dans le giron de Lagardère.

Les discussions portent aussi sur le partage des médias du groupe: Europe 1, Paris Match et le Journal du Dimanche (JDD). Plusieurs sources estiment que Bernard Arnault souhaite tous les conserver chez Lagardère, encouragé par l’Elysée qui veut éviter de les voir tomber dans l’escarcelle de Vincent Bolloré.

Jusqu’ici, Vincent Bolloré lorgnait avec insistance sur Europe 1 mais a compris que Bernard Arnault ne lâcherait pas la radio, pour éviter qu’il ne la fusionne avec la chaine CNews, détenue par Vivendi. Un scénario qui ne plait d’ailleurs pas aux autres propriétaires de chaines info, LCI ou BFMTV (également propriétaire de BFM Business). Bolloré serait désormais intéressé par Paris Match. "Ca change tous les jours et sa position sur les médias est un levier dans la négociation autour d’Hachette" décrypte une source proche du dossier. Contactés, Vivendi et Lagardère n’ont pas souhaité commenter nos informations.

10% du capital en plus pour Arnaud Lagardère

"Les discussions avancent bien et c’est une bonne chose car cela prouve qu’il n’y aura pas la guerre des titans entre Bernard Arnault et Vincent Bolloré, abonde une autre source. Mais rien n’est encore fait". Dans ce jeu, Arnaud Lagardère souffle constamment le chaud et le froid. Démanteler Hachette est une décision lourde qui amputerait Hachette de deux tiers de ses 2,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires, essentiellement réalisés aux Etats-Unis et au Royaume-Uni. Pour céder cette branche qui vaut entre 1,5 et 2 milliards d’euros, il serait prêt à la négocier au prix fort.

D’abord en obtenant une indemnité importante pour la fin de son statut d’"associé-gérant commandité" qui lui confère les pleins pouvoirs chez Lagardère. La fin de cette commandite, qui conduira à la transformation de Lagardère en société anonyme, est la base des négociations actuelles. Selon nos informations, il pourrait ainsi obtenir entre 250 et 300 millions d’euros en actions, en échange de la reprise d’Hachette International par Vivendi, soit environ 10 à 12% du capital de Lagardère.

Un pacte de non-agression de Vincent Bolloré

Arnaud Lagardère demande également à Vincent Bolloré un engagement de ne pas monter au capital de son groupe pendant plusieurs années et de vendre sa participation à terme. Arnaud Lagardère et Bernard Arnault détiendrait ainsi 25% à eux deux contre 23% pour Vivendi, environ 17% pour Amber et 11,5% pour le Qatar.

Si ce scénario aboutit, il provoquera inévitablement des remous chez Hachette, qui serait ainsi coupé en deux. "ça a déjà commencé en interne" peste une source. Son patron Arnaud Nourry est logiquement hostile à un démantèlement de l’entreprise qu’il dirige depuis 2003. Et serait d’autant moins friand de tomber dans l’empire de Vincent Bolloré.

Matthieu Pechberty