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Malgré l'explosion du bitcoin, le crypto-actif traîne encore une réputation sulfureuse

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Ce lundi, le bitcoin a franchi un nouveau record absolu au-dessus des 71.000 dollars. Pourtant, cet actif est encore vu avec méfiance.

Malgré son attrait irrépressible sur les marchés, le bitcoin traîne encore une réputation sulfureuse, vu son historique de scandales et d'effondrements soudains des cours, et son utilisation encore assidue par les cybercriminels.

"Le bitcoin est connu pour ses fluctuations de prix fréquentes et importantes", rappelle cependant Walid Koudmani, analyste chez XTB, qui relève que "la fraude et les activités illégales" dans le secteur continuent également "de façonner la perception des régulateurs, malgré la traçabilité et la sensibilisation accrue" aux risques des cryptoactifs.

Scandales et plongeon des cours

Le milieu est en ébullition depuis le lancement sur les marchés américains en janvier dernier d'un nouveau type de placement, un fond indiciel (ETF) indexé sur le bitcoin. Via ce nouveau produit d'investissement, des sociétés spécialisées comme Grayscale ou des géants de Wall Street comme le gestionnaire d'actifs Blackrock investissent dans le jeton numérique et permettent théoriquement à une plus grande partie du public de parier sur le prix du bitcoin sans en posséder directement.

L'envolée des cours est également attribuable à un phénomène technique (le "halving"), prévu en avril, qui devrait réduire l'offre de bitcoins disponibles à l'achat sur les bourses d'échange.

Au plus haut, la cryptomonnaie peine cependant à redorer son image après le naufrage de plusieurs géants du secteur, au premier rang desquels la faillite à partir de novembre 2022 de la plateforme d'échanges FTX. Son patron Sam Bankman-Fried a depuis été reconnu coupable d'avoir détourné plusieurs milliards de dollars de dépôts de clients sans leur autorisation. Le prix du bitcoin s'était effondré dans la foulée, rappelant de précédents cycles d'enthousiasme exubérant suivi d'un écroulement des cours.

Par ailleurs, le bitcoin reste une monnaie utilisée pour payer sur le darknet et extorquer des fonds via des attaques par rançongiciels, qui bloquent l'accès au système informatique de leurs victimes et réclament le versement d'une rançon. Mais une fois les fonds frauduleux retracés par les autorités, les bitcoins peuvent être black-listés par les différents services sur la blockchain, les rendant virtuellement inutilisables.

Les cybercriminels préfèrent de plus en plus avoir recours à d'autres types de cryptomonnaies, comme les "stablecoins", dont le cours se veut fixe. La valeur totale des transactions reçues par les portefeuilles virtuels hébergeant des cryptomonnaies issues d'activités illicites a cependant baissé "significativement" à 24,2 milliards de dollars en 2023, contre 39,6 milliards l'année précédente, selon un rapport de février de la société d'analyse américaine Chainalysis.

Il convient aussi de rappeler qu'en 2022, seulement 0,24% des transactions de l'ensemble des cryptomonnaies (contre 0,12% en 2021) étaient associées à une activité illicite, selon un autre rapport de Chainalysis sur la criminalité financière.

Ébauche de réglementation

De leur côté, les régulateurs continuent à mettre en garde le public sur les dangers d'investissements hâtifs et non-informés, pouvant mener à des pertes colossales. "Pour la société, un nouveau cycle d'expansion et de récession du bitcoin est une perspective désastreuse", estimaient deux experts de la Banque centrale européenne (BCE) en février dernier.

Selon eux, ces oscillations s'appuient en effet sur un actif à la valeur "nulle", et propice à la manipulation des cours. Face à ces risques, le Parlement européen a adopté en avril 2023 un règlement sur les marchés de crypto-actifs (MiCA, pour Markets in Crypto-Assets), qui prévoit notamment un agrément obligatoire pour les prestataires de services autour des actifs numériques. D'autres pays ont également légiféré, comme le Japon, qui a amendé son cadre existant pour y intégrer les systèmes de paiements électroniques, dont les cryptomonnaies.

Aux Etats-Unis, une réglementation cohérente peine à être mise en place en raison d'"un manque de connaissance" des politiciens, mais aussi de l'ambition d'adopter une législation qui résoudrait tous les problèmes d'un coup, ainsi que des retombées du scandale FTX, pense Cody Carbone, de la Chamber of Digital Commerce, un groupe de pression du secteur, interrogé par l'AFP.

Cet ancien assistant au Congrès pour un élu républicain pointe également le grand nombre d'acteurs concernés, des Etats au gouvernement fédéral en passant par les régulateurs, "ce qui a conduit à un désordre très déroutant pour les entreprises". Pour Walid Koudmani, de XTB, seules "des réglementations claires et cohérentes, abordant des problèmes tels que le blanchiment d'argent tout en encourageant l'innovation, pourraient instaurer la confiance et la stabilité dans le secteur" des cryptomonnaies.

P.A. avec AFP