Strasbourg: trois hommes jugés aux assises après une rixe mortelle au quartier Polygone

Aucun débordement ne sera toléré, prévient le président de la Cour d’assises du Bas-Rhin. Ce mardi 21 novembre, s’est ouvert le très sensible procès de l’affaire de la rixe mortelle, au cours de laquelle Josué Gorreta est mort poignardé le 1er janvier 2021.
Une rixe mortelle sur fond de rivalité entre deux bandes du quartier Polygone de Strasbourg: les "Alsaciens" et les "Espagnols". Une rivalité exacerbée après la mort du trentenaire, la maison d’un des accusés ayant été incendiée et taguée après le drame.
Trois accusés comparaissent au cours de ce procès. Deux d'entre eux étaient en détention provisoire, tandis que le troisième s'est présenté libre devant les juges. Il est suspecté d’avoir blessé au fusil plusieurs personnes au cours de la même nuit.
Un quatrième homme, victime d’un AVC au cours de sa détention provisoire, ne peut être jugé en l’état. Il est le frère jumeau de l’un des deux accusés présents à l’audience.
La salle scindée en deux
Au premier jour du procès, la salle d’audience est scindée en deux. À gauche, les "Alsaciens", des Yéniches, présents pour soutenir les trois accusés qui comparaissent pour meurtre, tentative de meurtre ou violence avec arme.
À droite, les "Espagnols", une communauté de gitans sédentaires implantée dans le même quartier de Strasbourg. Eux portent la mémoire de Josué Gorreta, tué de 18 coups de couteau.
La nuit de sa mort, les trois communautés du quartier Polygone célèbrent le passage à la nouvelle année. La fête vire au drame en fin de soirée. Josué Gorreta, un père de famille de 38 ans, succombe à ses blessures. Son neveu est également poignardé. Il survit néanmoins à l’agression.
La personnalité des accusés disséquée
L’audience débute dans le calme. La cour s’intéresse en premier lieu à la personnalité des hommes coaccusés d'avoir porté les coups de couteau.
Le premier, âgé de 25 ans, est issu d’un père tsigane et d’une mère qui se décrit comme issue de la culture française. L’homme était éboueur en Allemagne avant son incarcération. Il a passé toute son adolescence à Strasbourg. Une ville qu’il quitte en 2019. Sa compagne, non-issue de la communauté, souhaitait qu'il prenne ses distances avec certaines de ses fréquentations.
Ancien prodige de football, le jeune homme était promis au centre de formation du Racing club de Strasbourg. À son entrée au collège, la drogue et l’alcool s’invitent dans son quotidien. Très influencé par ses cousins déscolarisés, et avec qui il apprécie de passer ses journées, il se détache peu à peu de l'école et de la discipline sportive.
Ses parents ne l’abandonnent pas et souhaitent le sortir de la culture "manouche", qu'ils décrivent comme "arriérée". Une volonté qui va se heurter à la réalité du quartier. Tous les accusés s’accordent à décrire un endroit malfaisant et rongé par le trafic de drogue.
L’accusé, lui, se dit attaché aux valeurs familiales. Généreux, gentil, mais aussi impulsif. Un défaut sur lequel il travaille depuis sa détention, en participant notamment à un stage de gestion de ses émotions.
Ils nient les faits
Le second accusé est quant à lui connu pour son penchant pour l’alcool. Son casier judiciaire est ponctué de condamnation pour état d'ivresse. L’homme est le cousin du père du premier accusé.
Il passe une partie de son enfance sur la route. Une existence qu’il poursuit avec sa première compagne. Le père de famille est très attaché à son frère jumeau, absent du procès.
Il le décrit comme son protecteur. L'homme a traversé des épreuves. Victime d'une tumeur, son œil droit lui est retiré durant l'enfance. À 17 ans, il est poignardé par deux fois. On lui retire la rate et opère son pancréas en urgence. Depuis, il se dit traumatisé et explique se reposer beaucoup sur la présence de son frère.
Ce mardi, aucun des deux hommes n'a admis avoir été auteur de l'agression mortelle de Josué Gorreta, le 1er janvier 2021. L'enquête menée par la juge d'instruction, Sophie Thomann, conclut pourtant bien à leur culpabilité. À cette heure, ils demeurent présumés innocents et disposent de quatre jours pour en convaincre les jurés.