Escroquée de 830.000 euros par un faux Brad Pitt: pourquoi tant de personnes se font avoir par de fausses célébrités

L'amour rend aveugle... et peut coûter très cher. Une femme a perdu 830.000 euros, une somme soutirée par un arnaqueur qui se faisait passer en ligne pour Brad Pitt, photos truquées à l'appui.
Et elle n'est pas seule: en septembre dernier, en Espagne, deux femmes ont été arnaquées de 325.000 euros par cinq hommes se faisant passer pour l'acteur Brad Pitt. Ils ont, depuis été arrêtés.
Dans ce dernier cas, les suspects sont entrés en contact avec leurs victimes présumées sur un site internet destiné aux fans de l’acteur. Au fil du temps, ils ont réussi à leur faire croire "qu’elles avaient une relation sentimentale avec lui", a déclaré la Guardia Civil dans un communiqué.
Les membres du gang auraient ensuite proposé aux femmes d’investir dans divers projets. Résultat, les deux femmes, décrites comme "vulnérables" et "en état dépressif" auraient alors déboursé 175.000 pour l'une et 150.000 euros pour l'autre. Sans surprise, les projets n'existaient pas et les escrocs ont empoché la somme.
Et ce faux Brad Pitt est loin d'être une exception. En août dernier, des escrocs se sont fait passer pour Florent Pagny sur les réseaux sociaux et ont noué des liens avec une fan pour lui soutirer de l'argent. Quelques mois auparavant, c'est Kendji Girac qui a vu apparaître des faux comptes à son effigie pour obtenir de l'argent de sa communauté.
Des victimes isolées socialement
Ces dernières années, les arnaques aux sentiments se multiplient. Le Modus operandi est toujours le même. Les arnaqueurs se font passer pour des célébrités sur les réseaux sociaux. Ils discutent avec des fans via des messageries, nouent des liens et finissent par réclamer de l'argent à ces admirateurs trompés.
Sans surprise, les escrocs ne perdent pas de temps avec les victimes réticentes et sélectionnent avec soin le profil de leurs victimes.
"Tout le monde ne peut pas tomber dans le panneau", insiste Olivier Duris, psychologue et docteur en psychologie à Tech&Co. "Les victimes sont souvent des personnes isolées socialement et plus fragiles psychiquement."
L’isolement social, en nette progression dans le monde depuis le confinement, offre un terrain favorable aux arnaques aux sentiments.
Instaurer un lien de confiance
Les imposteurs privilégient également les baby-boomers, une génération considérée comme vulnérable, car peu à l’aise avec les outils numériques. Pour cela, ils misent sur les réseaux sociaux favoris des plus de 50 ans, comme Facebook, les jeux mobile ou encore les clubs de fans. Cette population cible est également prisée des arnaqueurs car ceux-ci tentent d’y débusquer des personnes seules.
"En général, les personnes isolées vont être flattées que quelqu'un prenne contact avec eux. Ils trouvent dans cette sollicitation un sentiment d'exister, d'être utile", observe Johanna Rozenblum, psychologue clinicienne et consultante pour BFMTV. "Ce sentiment passe par-dessus la capacité à rationaliser et à prendre du recul sur la situation."
Et c'est tout particulièrement le cas si l'arnaqueur se fait passer pour une célébrité. "Avec l'avènement des réseaux sociaux, le sentiment de proximité avec les stars est décuplé", observe Olivier Duris. Résultat, les victimes ont déjà l'impression de connaître la fausse vedette et lui font plus facilement confiance.
Dans certains cas extrêmes, la victime peut développer des sentiments amicaux, voire amoureux envers la star. "Les arnaqueurs simulent parfois une histoire d'amour pour soutirer de l'argent à leurs victimes" précise Johanna Rozenblum. Un travail de longue haleine, à coup de mots doux, de promesses dans le vide et d'une myriade de messages de soutien échangés. La promesse des arnaqueurs est toujours la même: celle d'un amour inconditionnel, et d'un soutien émotionnel en cas de coup dur.
Un travail au long cours
La plupart des usurpateurs travaillent d'ailleurs sur le temps long. Certains peuvent entretenir des relations pendant plus de dix ans pour instaurer un lien de confiance solide avec leurs proies.
"Ils ne sont pas frontaux, ne vont pas rentrer directement sur les sujets d'argent", ajoute Olivier Duris. "Ils vont prendre le temps de créer un lien fort, d'instaurer une discussion."
Afin d'appuyer leurs propos et surtout, convaincre de la véracité de leur profil, les escrocs utilisent des photos ou des vidéos d'autres utilisateurs sur internet. Ils misent de plus en plus les deepfakes, via des images ou via des voix générées par l’IA, pour rendre les escroqueries plus réalistes.
Une fois le lien installé, le tour est joué. La victime s'est attachée et place une confiance aveugle en son amant virtuel. "Le discernement, le libre-arbitre et l'esprit critique de la victime sont annihilés", tranche Johanna Rozenblum. "Elle est donc facilement manipulable." La fausse star n'a plus qu'à expliquer à sa victime qu'elle a besoin d'une aide financière pour se sortir du pétrin, et la personne arnaquée ne se doutera de rien.
Des erreurs de discernement qui peuvent coûter cher. Les montants soutirés peuvent aller de quelques centaines d'euros à plusieurs centaines de milliers d'euros. En France, la plateforme Thésée, qui permet aux victimes de déposer plainte pour les arnaques en ligne, recense un préjudice de 700.000 euros, pour une seule et même arnaque à l'amour.