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"On a gagné un temps fou": ces vacanciers qui ont planifié leurs séjours grâce à l'intelligence artificielle

Un ciel nuageux immortalisé depuis le hublot d'un avion (Photo d'illustration).

Un ciel nuageux immortalisé depuis le hublot d'un avion (Photo d'illustration). - Flickr - CC Commons - J. Kern

L'intelligence artificielle générative est, en quelques années, rentrée dans les réflexes et habitudes des Français. Une étude publiée mi-juillet révélait qu'un Français sur trois avait déjà eu recours à ces nouveaux outils pour planifier un voyage. Programme, horaires, réservations... Des vacanciers racontent comment l'IA les aide à prévoir leur parcours étape par étape.

Cet été, Blaise Reymondin et sa famille séchaient sur les idées de destination de vacances idéales. Le couple et ses deux enfants, originaires de Lausanne (Suisse), voulaient éviter "les grosses chaleurs et la Méditerranée tout en restant sur le continent européen". Faute d'inspiration, le père de famille a décidé de se faire aider de l'intelligence artificielle (IA) générative, quelques semaines avant le voyage prévu en juin.

Dans un premier temps, l’IA lui a suggéré des destinations comme la Scandinavie, l’Écosse ou la Bretagne. Finalement, la petite famille l'a écoutée en se lançant dans un grand road-trip d’une semaine en France, entièrement planifié grâce à ChatGPT.

Séjour dans une belle maison à Concarneau, comédie musicale à Paris, dégustation de vin en Bourgogne, visite du Mont-Saint-Michel... L’IA a organisé chaque étape en partant de Lausanne, en veillant à ce que chaque trajet ne dépasse pas quatre heures et que chaque étape soit intéressante et parfaitement adaptée à leurs envies.

"Ça a coché toutes les cases"

Ils sont loin d'être les seuls. Une étude Ipsos menée en février dernier et dévoilée mi-juillet révélait qu'un Français sur trois avait déjà eu recours à ce nouvel outil technologique pour préparer un séjour. Un chiffre qui monte à 53% chez les moins de 35 ans.

"On a gagné un temps fou car cette partie de la France nous était totalement inconnue", se réjouit Blaise, qui travaille dans le marketing numérique. "Ça nous a d'abord aiguillés pour dégrossir le type de voyage qu'on voulait, ensuite pour dénicher des étapes auxquelles on aurait jamais pensé nous-mêmes, et même réserver des logements concrets ou des activités. Maintenant avec les nouvelles versions, il peut même vérifier les disponibilités de certains lieux."

Un sac de voyage et quelques affaires prêtes à être empaquetées pour des vacances.
Un sac de voyage et quelques affaires prêtes à être empaquetées pour des vacances. © Flickr - CC Commons - Murz M.

Cela fait déjà plusieurs années que ce Suisse de 53 ans a adopté l'IA comme planificateur de vacances. "Pour moi, il n'y avait rien de pire que Google pour préparer un voyage: on y passe des heures, on tombe sur des pubs ou sur des blogs bien référencés mais obsolètes. L’IA, elle, extrait directement l’essentiel parmi tout ce qu'elle trouve, et selon nos objectifs."

Pendant les dernières vacances de Pâques, c'est également grâce à l'IA que Blaise, sa femme et leurs deux enfants ont réalisé "le plus beau voyage de toute leur vie", trois semaines en Namibie. "Honnêtement on aurait pas eu l'idée de nous-mêmes de choisir cette destination mais quand on lui a exposé notre contexte familial avec l'âge de nos enfants, notre envie d'aventures avec du soleil mais sans trop de monde, il nous a sorti la Namibie..."

Ni une, ni deux, l'IA tape dans le mille car le séjour est idyllique. "C'était parfait à tous les niveaux. Ça a coché toutes les cases: le côté aventures, l'affluence raisonnable, la bonne période pour y aller...", s'extasie encore le quinquagénaire.

Des programmes personnalisés et millimétrés

Sephora Bechrouri ne regrette pas non plus d'avoir eu recours à l'IA pour l'aider à planifier ses vacances, "une corvée" jusqu'alors pour la jeune femme de 28 ans. Auparavant, cette chirurgien dentiste à Lille (en instance de thèse) avait l'habitude d'acheter des guides de voyage ou de fouiller sur les réseaux sociaux, "mais ça n'était pas forcément adapté à (son) âge, (ses) goûts ou (son) budget".

Depuis, la jeune femme s'appuie sur ChatGPT et Perplexity pour programmer de façon très précise son séjour de 18 jours au Japon, prévu en septembre prochain. Grâce à leurs recommandations, elle a ainsi élaboré un fichier Excel avec un planning détaillé, jour par jour et même heure par heure.

Le planning quotidien, heure par heure, réalisé par Sephora Bechrouri grâce à l'IA pour son voyage au Japon.
Le planning quotidien, heure par heure, réalisé par Sephora Bechrouri grâce à l'IA pour son voyage au Japon. © BFMTV

L’IA lui propose ainsi les moyens de transport à privilégier, l'ordre de visite des sites selon leur proximité, lui calcule la durée des trajets, lui conseille les sites qui méritent le coup d'oeil. Sur les recommandations de son assistant virtuel, la Lilloise compte donc se rendre à Tokyo, Kamakura, au pied du mont Fuji, Kyoto, Osaka… et même Otsu, une petite ville que lui a fait découvrir l'IA, où elle pourrait faire de nombreuses activités, comme de la tyrolienne ou du bateau.

Mais l'intelligence artificielle lui permet aussi de vérifier tous les aspects logistiques du voyage: visa et documents à présenter, déclaration des biens à la douane, préparation des bagages, événements locaux organisés dans les villes qu'elle compte traverser. Cela lui a par exemple permis de découvrir qu'au Japon, un système de transfert de bagages existe afin de ne pas avoir à transporter ses valises avec soi d'une ville à l'autre.

Un tableau comparatif des hôtels à Tokyo réalisé par ChatGPT, en fonction des attentes de Sephora Bechrouri.
Un tableau comparatif des hôtels à Tokyo réalisé par ChatGPT, en fonction des attentes de Sephora Bechrouri. © BFMTV

Pour autant, Sephora Bechrouri ne peut pas s'empêcher de passer derrière son assistant pour s'assurer de la véracité de certains de ses dires. "Je double-checke pour être sûre, et voir si ça correspond bien à ce que je cherche, mais je ne suis jamais déçue".

Attention aux hallucinations et aux arnaques

Mais prudence, car ce n'est pas le cas de tout le monde. Actuellement en vacances dans les îles Cyclades, en Grèce, Laurence* a failli se faire avoir par ChatGPT. Sur les conseils de ses proches, cette avocate de 43 ans a interrogé l'IA afin de savoir si elle pouvait prendre le bateau le lendemain vers une autre île. Pas contrariant, ChatGPT lui affirmait qu'elle pouvait en effet prendre cette navette maritime à 9 heures. Une information qui, après de plus amples vérifications, s'est révélée erronée.

"Il était à côté de la plaque!, se rappelle Laurence*, et quand je le mettais face à ses contradictions il ne faisait que des réponses pour me faire plaisir".

Par chance, la vacancière n'a ce jour-là pas fait confiance aveuglément à l'IA et ne s'est donc pas retrouvée le bec dans l'eau. Ce qui n'est pas le cas d'un couple de Malaysiens, qui s'est fait avoir par une fausse destination de vacances à cause d'une vidéo générée par IA. Le journal The Straits Times rapporte que le couple a voyagé 300km depuis Kuala Lumpur avant de découvrir qu'il n'y avait aucun lieu pour les accueillir sur place.

Mais outre ce malentendu qui la pousse désormais à systématiquement bien vérifier les dires de ChatGPT, Laurence* est également convaincue de l'utilité de l'IA pour planifier ses vacances. "Il faut converser avec lui pour affiner sa recherche en précisant ses attentes, ses goûts et même son état de fatigue le plus précisément possible... Mais globalement c'est bluffant".

Une église des Cyclades en Grèce.
Une église des Cyclades en Grèce. © Flickr - CC Commons - Marco

D'autres, encore, s'en servent comme d'un assistant virtuel pendant le séjour: ils lui demandent de les renseigner sur l'histoire ou la géographie des lieux qu'ils visitent, sur la faune et la flore locale, ou encore sur l'économie du territoire. Dans des musées, de nombreux touristes se sont mis à lui demander d'accompagner leur visite en commentant les oeuvres ou les artistes exposés.

"Un assistant qui m'aide à faire mieux, plus vite"

Philippe Bourcier, lui, n'hésite pas à solliciter l'IA en cas d'imprévu une fois sur place. Lors de son voyage en Italie l'an dernier, le Francilien s'est appuyé sur ChatGPT pour trouver une solution de repli alors que l'un de ses plans est tombé à l'eau. "Avec mon épouse on est arrivés devant la cathédrale de Florence, et il y avait une queue interminable donc on lui a demandé de nous trouver une alternative et il nous a proposé de nous rendre à l'église Santa Croce, qui était en effet magnifique et nettement moins fréquentée", raconte le quadragénaire, avant d'ajouter: "Une des meilleures visites qu'on a faites à Florence, merci ChatGPT!"

"C'est quand même hyper pratique", confie ce directeur technique dans les Yvelines. "Il absorbe des tonnes et des tonnes de connaissances à notre place en quelques secondes et il nous en fait une synthèse. Mieux: il va les ordonner selon mes goûts... C'est quand même fort. Ça c'est quand même le grand apport de l'IA, c'est la chantilly sur les fraises", proclame-t-il encore en riant.

"Ça peut aller très loin" pour Philippe Bourcier. Conquis, il l'a déjà adopté dans son quotidien. "Je le vois comme un assistant", confie le Francilien de 45 ans. "Il m'aide à faire plus vite ce que je faisais avant et à le faire mieux, c'est tout bénéf'".

Ce grand utilisateur de TripAdvisor pour classifier et comparer la qualité des lieux de visite est ravi qu'un outil permette désormais de personnaliser les requêtes, et de synthétiser le nombre de commentaires des visiteurs, dont la lecture peut parfois être chronophage. Enfin il explique qu'en Italie, où de nombreuses billetteries en ligne passent par des sites à l’allure douteuse, ChatGPT lui a systématiquement indiqué les plateformes officielles. Un gage de confiance pour ce non italophone, qui a eu du mal à déceler de lui-même les sites internet officiels des sites à l'URL douteuse.

* Le prénom de notre interlocutrice a été modifié pour des raisons professionnelles.

Jeanne Bulant Journaliste BFMTV