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Squeezie transformé en Emmanuel Macron: comment l'IA permet des deepfakes toujours plus impressionnant

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Grâce à des outils d'intelligence artificielle, un développeur a mis en scène le chef de l'Etat en remplaçant le visage de Squeezie dans une vidéo. Le résultat est saisissant.

Depuis un mois, Younes, un développeur de 25 ans, enchaîne les succès sur les réseaux sociaux. En quelques semaines, il a publié plusieurs vidéos de deepfakes (des vidéos remplaçant numériquement un visage par un autre), plus ou moins réussies. Ce 13 septembre, il a choisi d'utiliser une vidéo de Squeezie, alors que ce dernier déplorait le sexisme visant Manon, une participante du GP Explorer 2. Il a alors remplacé le timbre de sa voix et son visage par ceux d'Emmanuel Macron.

Vidéo HD et grosse puissance de calcul

Ce 14 septembre en début d'après-midi, la vidéo cumulait déjà plus de 800.000 vues sur Twitter, et plus d'un million de vues sur TikTok. Elle a été mise en ligne quelques jours après une autre vidéo créée par Younes, mettant en scène un faux Kylian Mbappé se faisant réprimander par son père, qui avait quant à elle cumulé plus de 7 millions de vues sur Twitter.

Auprès de Tech&Co, le passionné d'intelligence artificielle explique travailler avec l'outil DeepFaceLab pour remplacer les visages, un logiciel en open source qui nécessite une immense puissance de calcul. Pour son métier - et au passage pour sa passion - Younes a ainsi investi dans une coûteuse carte graphique (GeForce RTX 4090).

"Ce qui fait la qualité d'une vidéo, c'est le visage source que vous utilisez (celui qui doit être superposé sur l'autre, ndlr). Pour Emmanuel Macron, j'ai utilisé de nombreuses vidéos en haute résolution, lors de discours, où l'on peut avoir son visage sous tous les angles" explique-t-il à Tech&Co.

La vidéo de base, elle, ne nécessite pas une aussi bonne qualité. Les traits (ici de Squeezie) doivent être suffisamment lisibles pour que la machine puisse créer un "masque numérique" et remplacer le visage d'origine. Pour rendre le tout plus réaliste, Younes dégrade ensuite volontairement la qualité du visage généré en haute résolution, pour mieux le fondre dans la séquence d'origine.

Pour le clonage de voix, c'est un autre outil open source qui est utilisé, baptisé RVC. Comme avec tous les outils d'intelligence artificielle, il faut "nourrir la machine" en lui envoyant de nombreux extraits sonores de la voix à imiter - ici celle d'Emmanuel Macron. Il suffit ensuite de lui soumettre le fichier audio de la voix de la vidéo d'origine (celle de Squeezie) pour qu'il transforme cette dernière.

Grâce à un simple logiciel de montage, il est ensuite aisé de reconstituer la séquence, en calant le son nouvellement généré sur les mouvements des lèvres du deepfake.

Risque de manipulation

Si le fait de voir Emmanuel Macron tatoué avec une casquette ne suscite pas d'immenses craintes quant à la propagation de fausses informations, l'expérience de la vidéo de Kylian Mbappé a marqué Younes. Lors de la publication de la vidéo, il avait pris le soin d'inscrire sur l'image le nom de son compte Twitter (French AI Covers), faisant ostensiblement référence à l'intelligence artificielle.

Surtout, la séquence n'avait aucune volonté de réalisme absolu: régulièrement, le créateur publie des vidéos humoristiques mettant en scène la star du PSG. Le visage de l'homme présenté comme le père du footballeur n'a d'ailleurs pas été transformé pour le faire ressembler à Wilfrid Mbappé. Mais des comptes en mal d'audience ont volontairement camouflé la référence à l'IA inscrite sur l'image, et présenté la séquence comme authentique.

"Mes abonnés savent que j'ai un compte parodique. Mais comme toujours, sur le web, la vidéo a été reprise et partagée sans aucune mention" regrette ainsi Younes.

Auprès de Tech&Co, il estime avoir pris conscience du caractère sensible de ses créations, assurant "prendre le soin de ne jamais tourner quelqu'un en ridicule". Mais à ses yeux, la publication de deepfakes humoristiques peut également être utile pour sensibiliser les internautes au risque de manipulation qui en découle.

"Je préfère que les gens découvrent la puissance des deepfakes de cette manière, en sachant pertinemment qu'une vidéo n'est pas authentique, plutôt que par le biais de séquences destinées à les manipuler et créées à des fins militants ou politiques" assure Younes, soucieux de vulgariser le sujet de l'IA pour le grand public.

https://twitter.com/GrablyR Raphaël Grably Rédacteur en chef adjoint Tech & Co