Le gouvernement veut revoir un amendement sénatorial qui met à mal les messageries privées

Votée par le Sénat et approuvée par le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, la fin du chiffrement et la création d'une porte dérobée pour les autorités au sein des applications de messageries instantanées font débat.
En cause, un amendement introduit lors des discussions sénatoriales sur la loi Narcotrafic, et qui renforce les moyens des services de renseignement face aux réseaux criminels. Des réseaux qui utilisent des plateformes chiffrées pour échanger, comme Telegram ou Signal.
Clara Chappaz veut "retravailler" le texte
Mais l'arrivée d'une porte dérobée présente forcément un risque pour la vie privée des utilisateurs. Surtout, elle ouvrira la voie à des abus de la part de gouvernements autoritaires ou des dictatures afin de persécuter des opposants. C'est en tout cas l'argument des industriels du numérique et de plusieurs voix issues de la société civile.
Signe que le débat est présent jusque dans les rangs du gouvernement, Clara Chappaz, la ministre déléguée chargée de l'intelligence artificielle et du numérique, a exprimé ses réserves.
"Le texte, tel qu'il est rédigé aujourd'hui, est trop large. Son application concrète pose question. Sans garanties suffisantes, il pourrait fragiliser des principes essentiels," explique Clara Chappaz sur X.
Parmi les exemples donnés et qui pourraient donc être "fragilisés", la ministre cite les libertés publiques, le secret des correspondances "et surtout la cybersécurité".
"Affaiblir le chiffrement ne pénaliserait pas seulement les criminels. Cela exposerait aussi nos citoyens, nos entreprises et nos infrastructures aux cyberattaques. Une faille créée pour les uns profite toujours aux autres," ajoute-t-elle.
Clara Chappaz souhaite donc que l'article "soit retravaillé," notamment lorsque la proposition de loi sur le narcotrafic repassera par l'Assemblée: "Trouver un équilibre est essentiel," explique l'entrepreneuse, qui veut "rester exigeante".
Rappelons néanmoins qu'en cas d'adoption, un tel texte ne pourrait pas être appliqué en France: sur la question des géants du numérique, c'est en effet l'Union européenne qui peut les réguler et donc leur imposer quelque chose en matière de fin du chiffrement.