Cyberharcèlement: Instagram échoue à protéger les femmes face aux messages agressifs

Instagram - Lionel BONAVENTURE / AFP
Une nouvelle étude issue du Centre contre la haine en ligne (CCDH), une ONG britannique qui lutte contre le cyberharcèlement, démontre qu'Instagram échoue régulièrement à protéger ses utilisateurs, et plus spécifiquement lorsqu'il s'agit de femmes.
Le rapport, publié le 6 avril et baptisé "La haine cachée", se base sur près de 8.700 messages privés envoyés via l'application à cinq femmes à forte popularité, dont l'actrice Amber Heard, rapporte le Washington Post. Au terme de l'étude, Instagram n'a pris aucune mesure pour 227 des 253 agresseurs identifiés par les jeunes femmes, soit 90% d'entre eux.
"Epidémie de misogynie"
"Instagram a choisi de se ranger du côté des agresseurs en créant, malgré eux, une culture de l'impunité, où leurs actes n'ont aucune conséquence - une situation qui dénigre la dignité des femmes et leur liberté à profiter des espaces numériques sans devenir des victimes. Il y a une épidémie de misogynie dans les messages privés de ces femmes. Meta et Instagram doivent faire passer la sécurité de ses utilisateurs avant leurs propres profits", dénonce le PDG de CCDH dans un communiqué.
Les cinq femmes, dont le nombre d'abonnés cumulés atteint les 4.8 millions, reçoivent un très grand nombre de messages chaque jour, allant des photos à caractère sexuel non-sollicitées jusqu'à la menace de mort.
Parmi les exemples cités par les victimes, la journaliste Sharan Dhaliwal explique ainsi avoir reçu environ 120 messages, en l'espace de huit jours, lui suggérant des actes sexuels.
Byrony Gordon, également journaliste, a reçu des messages moquant son poids et son physique, tandis qu'Amber Heard a reçu de nombreuses menaces de mort. Pour cette raison, elle a également deposé plainte auprès de la police.
Tous les messages interceptés pendant la période de l'étude ont été signalés auprès d'Instagram. Pourtant, aucune mesure n'a été prise par la plateforme, et les auteurs ont pu y rester actifs.
Si ces statistiques ne sont pas forcément représentatives de l'expérience de toutes les femmes sur le réseau social, elles dénotent tout de même la négligence systémique d'Instagram lorsque les femmes sont victimes de harcèlement en privé. Leur visibilité les conduit toutefois à recevoir un plus grand nombre de message que la moyenne des utilisateurs.
"Contrer la vague de harcèlement"
"Nous savons que ce type d'abus ciblant des femmes est extrêmement répandu. Cette étude démontre à la fois un fort besoin d'investissement, ainsi qu'une refonte du système pour endiguer la tendance au harcèlement et à la violence envers les femmes. Malgré nos conclusions, les géants de la tech comme Instagram choisissent de ne pas agir lorsqu'ils pensent que personne ne regarde, et lorsque aucune loi ne les somme d'intervenir", conclut le rapport.
Instagram, qui revendique régulièrement ses mesures prises dans la lutte contre le harcèlement et la violence en ligne, a réfuté ces conclusions.
Toutefois, le rapport indique que certains dispositifs mis en place par l'entreprise ne sont pas entièrement efficaces. Il pointe par exemple du doigt "Limites", qui consiste à masquer les réponses et interactions d'un utilisateur néfaste, sans toutefois que ce dernier ne soit inquiété par la modération du réseau social.