Tech&Co
Réseaux sociaux

"On a demandé à faire supprimer la vidéo" : le youtubeur Seb revient sur l'affaire des lunettes anti-dyslexie

placeholder video
En février dernier, le youtubeur est apparu dans un reportage faisant la promotion des lunettes Lexilens, un dispositif développé par Abeye et Atol pour améliorer le quotidien des personnes dyslexiques. Le youtubeur, qui a fait supprimer la vidéo, a présenté ses excuses à sa communauté.

"Je ne pouvais pas m'exprimer avant (hélas, je voyais vos messages) mais j'ai enfin pu rompre mon contrat avec l'agence car c'est un sujet de santé et que ça ne m'amuse pas du tout", lance le youtubeur Seb dans un long message dans sa story Instagram, ce 15 mai. Après des mois de silence, le créateur de contenus a ainsi souhaité s'exprimer sur l'affaire des lunettes intelligentes anti-dyslexie.

Tout commence en février dernier, lorsque le vidéaste participe à la quatrième saison des "Constructifs CIC", une série de vidéos où des influenceurs rencontrent des entrepreneurs.

"Là je suis à Beaune pour rencontrer Michael, le fondateur d'Abeye, une startup (incubée par Atol, NDLR) qui a développé des lunettes très spéciales", lance-t-il dans le reportage, qui a depuis été supprimé. Le jeune homme, spécialisé dans la création de contenus autour de l'industrie musicale, marche d'un pas déterminé vers la caméra.

"On a demandé faire supprimer la vidéo"

"C'est un projet révolutionnaire", s'enthousiasme Seb en pointant le dispositif. Pendant plusieurs minutes, l'entrepreneur présente alors au youtubeur sa solution baptisée Lexilens, qui permettrait aux personnes dyslexiques de "lire et de comprendre en même temps".

"C'est un outil pour l'égalité des chances", assure son créateur. Une utilisatrice explique même avoir obtenu son bac grâce au dispositif. De son côté, Atol, affirme que les lunettes permettent aux dyslexiques de lire "deux à trois fois plus rapidement",

La vidéo a été visionnée plus de 4 millions de fois en un mois. Le hic, c'est qu'elle est loin de faire l'unanimité. En effet, plusieurs internautes s'inquiètent du manque de preuve de l'efficacité du dispositif, pourtant présenté comme révolutionnaire. D'autres qualifient la vidéo "d'arnaque" et de "mensonge".

"Dès la sortie du reportage, certains d'entre vous m'ont alerté sur l'aspect questionnable du produit", confirme Seb, qui peut désormais s'exprimer sur l'affaire, dans sa story. "On a exigé des réponses à cette agence. On a demandé à faire supprimer la vidéo si on n'en avait pas", ajoute-t-il.

L'entreprise ayant créé ces lunettes lui envoie alors plusieurs publications de "comité de lectures" par mail, "des trucs scientifiques que je suis incapable de comprendre", admet le youtubeur.

"Les jours passent, G Milgram, un youtubeur debunk, fait une vidéo qui se questionne lui aussi sur l'entreprise qui fabrique ces lunettes. Ca m'a aidé à mieux comprendre ce qui pouvait clocher dans cette histoire", poursuit Seb.

Un manque de preuves scientifiques

Selon G Milgram, l'étude scientifique sur laquelle se basent les lunettes est particulièrement critiquée au sein de la communauté scientifique, comme le démontre cette note publiée dans la revue Proceedings of the Royal Society. Des scientifiques dénoncent un problème de méthodologie et des conclusions trop définitives, alors qu'il s'agit simplement d'hypothèses.

En dehors de ce rapport, Atol s'appuie uniquement sur des témoignages et des questionnaires de satisfaction, qui ne constituent pas "une preuve scientifique". Une étude indépendante a de son côté testé l'efficacité des lunettes Lexilens. Le constat est sans appel: le port des lunettes n'a "aucun effet" sur la lecture.

Et, comme le rappelle une enquête de L'Express, le Conseil scientifique de l’éducation nationale a même rédigé une note déconseillant "la diffusion de ces dispositifs au sein de l’Education nationale". Pour faire cesser les critiques, Atol a lancé un essai clinique en 2020. L'étude s'est terminée en juin, pour autant, aucun résultat n'a été communiqué.

Immédiatement, Seb prévient l'agence qui "supprime le reportage quelques heures après". "Me concernant, je suis désolé d'avoir eu mon image associée à ce reportage. J'assume ma part et le manque de fermeté que j'ai eu, mais je refuse de servir de tampon pour des choix que je n'ai jamais fait", conclut-il, tout en précisant n'avoir "aucun souci" avec le CIC.

Salomé Ferraris