L'influenceuse Ophenya critiquée pour la promotion d'une application pour les 10-21 ans

"Trouve ton crush ("coup de cœur", ndlr) en secret". Sur l'App Store et le Google Play Store, une application nommée "Crush" (rebaptisée "Friendzy" depuis) s'est fait une place avec ce slogan, en quelques heures, dans les classements des applis les plus populaires. Un engouement directement lié à la promotion commerciale par l'influenceuse Ophenya, suivie par près de 5 millions de personnes sur Tiktok, et 800.000 sur Instagram.
Dans une vidéo diffusée en direct ce 4 novembre, inaccessible depuis, Ophenya présente pendant de longues minutes l'application Crush, aux côtés de son fondateur, Marc (sur l'App Store, le nom de Marc Allain est renseigné). Comme le souligne la journaliste spécialisée Myriam Roche, la mention de partenariat commercial n'a pas été ajoutée, contrairement à ce qu'impose la loi.
Sondages anonymes
Au cours de sa longue présentation, Ophenya invite tous ses abonnés à installer l'application au plus vite. Elle évoque la possibilité de créer des sondages concernant ses camarades de classe, par exemple pour savoir qui a des vues sur soi en toute discrétion.
"Tu vas sur Crush et tu réponds à des sondages anonymes sur des gens de ta classe… Évidemment des sondages un peu…" insinue Marc, le créateur de l'application, évoquant indirectement la présence de jeux de séduction dans l'application.
De son côté, Ophenya invite ses abonnés à mettre des notes positives sur les magasins d'applications, avec pour récompense la diffusion des commentaires positifs de certains internautes lors d'une prochaine vidéo. Ophenya promet également de se rendre dans les écoles et collèges qui cumuleront le plus d'inscrits à l'application.
Rapidement, de nombreuses réactions négatives se sont multipliées sur les réseaux sociaux, évoquant les risques inhérents à une application dédiée aux "10-21 ans". Sur Tiktok, d'autres créateurs de contenus ont multiplié les vidéos critiquant la publicité diffusée par Ophenya.

Géolocalisation obligatoire
Comme a pu le constater Tech&Co, plusieurs éléments doivent inviter à la prudence concernant l'application. Tout d'abord, concernant l'éditeur, l'entreprise Epic App, qui ne dispose d'aucune page dédiée aux mentions légales sur son site web.
Par ailleurs, lors de l'installation de l'application, aucune vérification d'âge n'est effectuée. Dans les faits, la plateforme interdit toutefois de s'inscrire si l'on renseigne un âge inférieur à 12 ans.
Plusieurs autres éléments doivent inciter à la prudence: dès la création du compte - sans vérification que l'âge renseigné soit le bon, l'internaute est contraint d'accepter d'être géolocalisé, et invité à transmettre l'ensemble des contacts de son carnet d'adresse. Des données personnelles particulièrement sensibles, lorsqu'il s'agit de mineurs.
L'application a par ailleurs vocation à être utilisée au sein d'un même établissement. Ainsi, chaque internaute - y compris ceux qui sont potentiellement malveillants - peut avoir accès à des listes de noms d'adolescents, accolés au nom de leur école ou collège. En revanche, la plateforme ne permet pas d'envoyer des messages privés.
3,99 euros par semaine pour savoir "qui t'admire"
Toujours dans la vidéo publicitaire diffusée par Ophenya, le concepteur de l'application assure qu'il n'existe aucun risque de cyberharcèlement, en raison de la validation de chaque sondage par l'équipe de l'application, sans toutefois préciser le nombre de modérateurs travaillant pour la plateforme.
Parmi les critiques récurrentes figure également la présence d'achats intégrés à l'application Crush, qui invite ses très jeunes utilisateurs à payer pour savoir "qui l'admire en secret" pour la somme de 3,99 euros par semaine. Soit 12 euros par mois, avec un renouvellement automatique.
Face à la multiplication des réactions hostiles, l'influenceuse a finalement publié de nouvelles séquences, toujours avec le fondateur de Crush.
Dans ces nouvelles vidéos, cette fois estampillées comme partenariat commercial, le créateur de l'application ne fait plus référence à la possibilité de faire des rencontres ou de nouer des relations. Quant au nom de l'application, qui fait ouvertement référence à cette fonctionnalité, ce dernier assure qu'il est associé au "coup de cœur" que les internautes pourraient avoir en arrivant sur la plateforme.
Auprès de Tech&Co, le fondateur de l'application, Marc Allain, assure que Crush n'est pas une application de rencontres, mais une plateforme destinée "à lutter contre le harcèlement scolaire" en s'appuyant sur des sondages uniquement positifs.