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5G: pourquoi Bouygues veut être indemnisé par l'État si Huawei est exclu de son réseau

Juillet, septembre, ou décembre comme le réclame Bouygues? Les opérateurs de téléphonie français seront fixés ce jeudi sur le nouveau calendrier d'attribution des fréquences de la nouvelle norme mobile 5G.

Juillet, septembre, ou décembre comme le réclame Bouygues? Les opérateurs de téléphonie français seront fixés ce jeudi sur le nouveau calendrier d'attribution des fréquences de la nouvelle norme mobile 5G. - Ludovic Marin-AFP

Bouygues Telecom demandera une indemnisation si l’État lui interdit de recourir aux technologies 5G de l'industriel chinois Huawei. Les dirigeants de l'opérateur ont réitéré mercredi leur demande de report des enchères pour la 5G. Le calendrier doit être fixé ce jeudi.

Les dirigeants de Bouygues ont à nouveau demandé le report des enchères (cf encadré) sur les fréquences 5G et réclamé à être dédommagé par l'État si Huawei était exclu des réseaux 5G pour des raisons de sécurité nationale.

Si la France décidait de suivre l'exemple américain en refusant l'accès du géant chinois à la nouvelle norme de téléphonie mobile, "il est naturel qu'une entreprise dont l'économie se trouverait assez fortement bouleversée par cette décision de l’État se retourne vers lui en disant: comment je fais?", a déclaré Didier Casas, directeur général adjoint de Bouygues Telecom, s'exprimant lors d'une audition au Sénat.

50% des antennes 4G déployées sont d'origine Huawei

Comme son concurrent SFR, Bouygues Telecom s'est largement équipé auprès de Huawei -pour un peu moins de 50% des antennes, l'autre moitié provenant du suédois Ericsson- pour construire son réseau mobile 4G, qui servira d'assise à la 5G.

"Tout aurait été parfait s'il était possible d'installer un équipement 5G Ericsson ou Nokia à côté d'un équipement 4G de Huawei, mais cela est impossible car la normalisation qui a été décidée fait que vous devez disposer du même fournisseur sur l'équipement 4G et 5G", a expliqué Olivier Roussat, président de le Bouygues Télecom. "Donc, quand vous interdisez la 5G Huawei, vous demandez à l'opérateur de démonter tous ses équipements Huawei pour la 2G, la 3G et la 4G."

Démonter des équipements 4G a un coût important

"Démonter des équipements 2G, 3G, 4G pour les passer sur un autre constructeur, c'est un coût très important évidemment, mais c'est surtout aussi un délai d'exécution très long", a souligné le patron du groupe, Martin Bouygues, également présent à l'audition. "Que l’État change d'opinion, je n'y vois aucun inconvénient (...). Il doit juste en assumer les conséquences."

"Lorsqu'on a demandé à l'Anssi l'autorisation de mettre un équipement 4G [fabriqué par Huawei], cela a été accepté. Si on a acheté cet équipement et qu'il est maintenant nécessaire de le démonter puisqu'il est incompatible avec l'équipement 5G, il faut prévoir une mesure d'indemnisation", a surenchéri Olivier Roussat.

"Démonter des équipements 2G, 3G, 4G pour les passer sur un autre constructeur, c'est un coût très important évidemment, mais c'est surtout aussi un délai d'exécution très long", a souligné de son côté le patron du groupe, Martin Bouygues, également présent à l'audition. "Que l’État change d'opinion, je n'y vois aucun inconvénient (...). Il doit juste en assumer les conséquences."

Saisie en début d'année, l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi) n'a toujours pas rendu sa décision concernant les équipements autorisés à être déployés sur les réseaux 5G, conformément au nouveau processus d'autorisation fixé par une loi votée en 2019.

enchères 5g: les opérateurs vont être fixés sur le calendrier ce jeudi

Dans le climat économique d'aujourd'hui, la 5G n'est pas la priorité du pays", avait clamé fin mai Martin Bouygues, proposant de redoubler d'effort pour déployer la 4G, avec 1500 à 2000 sites supplémentaires... contre un allégement de la facture sur la 5G. Une position que continue de défendre la direction de l'opérateur. Bouygues Telecom milite pour que ces enchères aient lieu en décembre 2020 voire début 2021.

Mais pour le gouvernement, le plus tôt sera le mieux. La secrétaire d'Etat à l'Economie Agnès Pannier-Runacher a mis la pression sur l'Arcep en déclarant que septembre était "un objectif raisonnable (...) pour un lancement de la 5G avant la fin de l'année" et que le président de l'Arcep, Sébastien Soriano, "partageait" la "philosophie" du gouvernement.

Le nouveau calendrier d'attribution des fréquences de la nouvelle norme mobile 5G sera dévoilé ce jeudi, mais la justice est encore appelée à se prononcer. L'Arcep, régulateur du secteur, annoncera après la clôture de la Bourse quand auront finalement lieu les enchères, qui étaient initialement prévues le 21 avril mais ont été reportées en raison de la pandémie.

En jeu: l'attribution aux quatre opérateurs français (Orange, SFR, Bouygues et Free) des onze blocs de fréquence de 10 mégahertz encore disponibles dans la bande 3,4-3,8 GHz. Chaque opérateur a déjà obtenu un bloc de 50 MHz pour un montant de 350 millions d'euros. Pour l'État, ces enchères devraient rapporter 2,17 milliards d'euros au total.

Frédéric Bergé avec AFP