+25% en 2021: Les réseaux internet français toujours plus sollicités... et accaparés par les Gafa
35,6 térabits par seconde... Le trafic internet en France a encore progressé de 25,3% l'an dernier alors que l'année 2020 était déjà hors norme, avec un bond de 50% de la quantité de données. Face à cette explosion des usages en ligne, les opérateurs se sont heureusement adaptés puisque leur capacité de transit est passée de 50 Tbit/s à 95 Tbit/s en seulement deux ans, soit un quasi doublement.
On comprend mieux pourquoi les investissements des opérateurs français atteignent des records : 14,9 milliards d'euros en 2021, soit une progression de plus de 10% sur un an, selon l'Arcep.
Netflix, plus gros consommateur
Ce qui ne change presque pas en revanche, c'est le poids des géants numérique sur les réseaux français. Netflix, Google, Meta et Amazon accaparent plus de 40% de la bande passante en France. Netflix est toujours et de loin le plus gros consommateur, avec près de 20% de la bande passante à lui tout seul.
Des chiffres qui vont sans doute à nouveau alimenter le (vieux) débat sur la contribution des groupes numériques au financement des réseaux. La Commission européenne en a fait son nouveau cheval de bataille depuis quelques mois.
"Une poignée d'acteurs occupent à eux seuls plus de 50% de la bande passante mondiale. Il est temps de réorganiser la juste rémunération des réseaux. C'est désormais l'un des principaux chantiers de notre espace numérique" a ainsi déclaré en mai dernier Thierry Breton, le Commissaire au marché intérieur.
Invitée de Good Morning Business, la présidente de l'ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse), Laure de la Raudière, a évoqué cette possible réorganisation des coûts. Fixant notamment deux prérequis.
L’ensemble des coûts est supporté par les fournisseurs d'accès, il est légitime qu'il y ait débat. Mais il faut que cela se fasse dans le cadre de l’internet ouvert: il ne faut pas mettre à mal la neutralité du web, qui est facteur d’innovation et de liberté d’expression et de communication. [...] Il faudrait aussi réaliser une étude d’impact préalable, en cas de modification de la répartition des coûts, sur les conséquences d’un tel changement.
Vers une "contribution" annuelle des Gafa?
Bruxelles aimerait avancer sur ce sujet rapidement, même si la question divise encore parmi les Etats membres. Les opérateurs, eux, en profitent pour pousser leurs pions. Selon une étude du lobby européen des télécoms, le trafic généré par les géants américains leur coûte chaque année entre 15 et 28 milliards d'euros. Ils évoquent donc une "contribution" annuelle des Gafa de l'ordre de 20 milliards d'euros pour rééquilibrer les choses. Les opérateurs espèrent qu'une loi obligera les plateformes à négocier cette contrepartie financière.
Mais les entreprises du numérique ont aussi des arguments à faire valoir. Elles rappellent régulièrement que ce sont leurs contenus qui attirent les consommateurs et qui donnent donc de la valeur aux abonnements des opérateurs. Enfin, il ne faut pas oublier que ces entreprises participent déjà, indirectement, au financement des réseaux, via l'installation de serveurs (les CDN internes) mis à disposition des opérateurs. Ils pèsent aujourd'hui 17% du trafic internet en France, selon l'Arcep.
Netflix a par exemple consacré 1 milliard de dollars dans son programme Open Connect qui permet de stocker ses vidéos au plus près des utilisateurs pour éviter que les fichiers n'aient à voyager depuis l'autre bout du monde en encombrant les réseaux. Selon la plateforme, 40 de ces serveurs sont aujourd'hui installés en France.