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"On va au Louvre pour regarder de la mode": Sophie Fontanel raconte la genèse de son dernier livre
Quel est le point commun entre un tableau de Fragonard ou de Goya et la Fashion Week parisienne qui vient de s'achever? Sophie Fontanel esquisse une réponse à cette question avec son dernier ouvrage, Défilé au Louvre, à paraître ce jeudi 3 octobre.
À la demande du célèbre musée, qui accueillera prochainement sa première exposition consacrée à la mode, la journaliste et critique de mode a arpenté ses salles et scruté ses tableaux avec un regard très actuel, dressant des ponts entre l'histoire de l'art et celle de la mode, entre des tableaux vieux de plusieurs siècles et les podiums des plus grands couturiers.

Dans cet épais et bel ouvrage, chaque double-page contient ainsi une oeuvre et l'analyse de l'autrice.
"Dès que je me suis promenée dans Le Louvre, dès que j'ai eu accès à ces tableaux, pendant trois ans, je me suis dit 'tout ce qui constitue la mode, qu'on a tendance un peu à mépriser... Eh bien, des années plus tard on va au Louvre, pour regarder quoi? De la mode", raconte à BFM Radio Sophie Fontanel, invitée du journal de la culture mercredi soir.
"Tous les vêtements qu'on voit sur les femmes dans toutes les oeuvres du Louvre, quelle que soit l'époque, aujourd'hui, des couturiers les refont".
Yves Saint Laurent et l'enfant peint par Goya
Et la romancière de citer en exemple le défilé Loewe avec ses "crinolines très allégées", ou encore celui de Dior, avec "ses tuniques grecques, ses spartiates".


Elle explique aussi comment un tableau de Goya, Portrait de Don Luis Maria de Cistué, a inspiré Yves Saint Laurent.
Cette oeuvre, qui a appartenu au couturier, a par la suite été donnée au Louvre et montre un jeune enfant tenant son petit chien en laisse. Le modèle est habillé d'une tenue noire avec un large col claudine en dentelle, réhaussée d'une ceinture rose. Yves Saint Laurent, "obsédé" par ce tableau, a reproduit la tenue pour l'un de ses défilés à la fin des années 70.

"Cette tenue portée par un enfant a traversé non seulement le temps, mais le genre, et est arrivée pour habiller une femme", se réjouit Sophie Fontanel.
Hedi Slimane, "un homme important"
De ses déambulations, elle retient aussi un constat sur la mode masculine:
"Les hommes ont pris cher dans l'histoire de la mode. Ils se sont habillés de façon complètement dingue, avec des dentelles, des culottes bouffantes, des collants blancs, des chaussures pointues, tout ce que vous pouvez imaginer... Et puis à un moment donné, il y a eu le costume et on a fini de rigoler. On continue de ne pas rigoler, déplore-t-elle.
Interrogée sur le départ qui a fait grand bruit dans les showrooms mercredi, celui d'Hedi Slimane de Celine, Sophie Fontanel rend d'ailleurs un hommage appuyé au créateur français.

"C'est un homme important, Hedi Slimane. Bien sûr, les mannequins qui défilent pour Celine sont très maigres, mais justement, il a habillé des garçons qui normalement n'avaient pas le droit d'exister, parce qu'ils étaient fluets, qu'ils n'étaient pas baraqués 'comme les vrais gars'", ironise-t-elle.