BFM Immo
Rénovation Et Travaux

Des millions de DPE bientôt analysés? Comment l'État veut repérer les diagnostiqueurs frauduleux

placeholder video
Un outil de détection des pratiques suspectes des diagnostiqueurs énergétiques est en cours de développement. Il devrait permettre, entre autres, de repérer ceux qui réalisent des centaines de DPE en une seule journée.

Mouliner, passer au crible des millions de DPE et repérer les anomalies. Voici la promesse d'un nouvel outil que veut mettre en place le ministère du logement pour détecter les fraudes, a appris BFM Business confirmant une information du Figaro. L'idée est d'analyser les millions de données de l'Ademe, qui recense tous les diagnostics de performance énergétique, afin de détecter les pratiques douteuses.

"Le dispositif a un vrai intérêt afin de mieux cibler les contrôles des DPE frauduleux", nous explique le ministère du Logement.

Le Sidiane, Syndicat interprofessionnel du diagnostic immobilier, qui a été consulté par la direction de l'Habitat sur la mise en place de cet outil, s'en réjouit. "L'objectif affiché est de contrôler efficacement et à moindre coût", explique son président Jean-Christophe Protais.

Car la fiabilité des diagnostics est remise en cause depuis plusieurs années. Il y a deux ans, une enquête de l'UFC-QueChoisir pointait des résultats aléatoires selon les diagnostiqueurs pour un même bien. Même si plusieurs modifications et réglementations ont été mises en place, une récente étude a également dénoncé une anomalie statistique, avec de nombreux DPE qui se concentrent juste avant le stade où ils ont obtiendraient une plus mauvaise note.

Mille DPE par jour? Impossible

"Le logiciel va tester différents points propres à l'activité du diagnostiqueur, il pourra par exemple détecter ceux qui feraient mille DPE en une seule journée ou qui ne feraient pas assez de kilomètres par mois, ce qui peut vouloir dire qu'ils ne se déplacent pas chez le client, ce qui est pourtant essentiel", détaille Jean-Christophe Protais.

"Je ne comprends même pas que ça ne soit pas déjà en place", réagit de son côté Thierry Marchand, l'ancien président de la Chambre des diagnostiqueurs immobiliers (CDI), une autre fédération qui représente la profession.

"Il ne faut pas une technologie très avancée pour détecter un nombre de DPE trop élevé pour un seul diagnostiqueur", remarque-t-il.

Mais les possibilités ne s'arrêtent pas là. Selon Jean-Christophe Protais, l'outil sera également capable de comparer le DPE d'un appartement, à celui des lots d'un même immeuble. Si tous les appartements autour ont une mauvaise classe énergétique, il est très peu probable que celui-ci obtienne une bonne note.

Pas de date de mise en oeuvre

Il pourra aussi analyser les données techniques concernant par exemple les surfaces en contact avec l’extérieur ou les équipements de chauffage. Selon Thierry Marchand de la CDI, cet instrument statistique permettra surtout de mettre en lumière les différentes pratiques des diagnostiqueurs, voire même les différences entre régions et par extension les formations défaillantes.

"Est-ce que le double-vitrage ou les joints aux fenêtres sont bien identifiés et référencés? Les méthodes diffèrent selon les diagnostiqueurs, certains ont été mal formés", explique-t-il.

On ne sait pas à ce stade quand ce dispositif pourra être mis en place. "Des travaux sont en cours de notre côté pour pouvoir le définir au mieux et le lancer sur le plan opérationnel", précise le ministère à BFM Business. Plusieurs questions restent en suspens: par qui l'outil pourra-t-il être utilisé? L'Ademe? Le ministère? La répression des fraudes? Voir même les représentants de la filière? En tout cas, la Sidiane demande à y avoir accès afin de pouvoir contrôler au mieux ses diagnostiqueurs.

Marine Cardot