La hausse des taux des crédits met sous pression le pouvoir d'achat immobilier
L'ère des taux bas records semble bel et bien derrière nous. La hausse constatée ces derniers mois est en train d'accélérer de manière inédite. Le mouvement de hausse des taux d'intérêt s'était amorcé depuis décembre dernier. Mais il se faisait jusque là de manière relativement progressive. Cette fois les choses s'accélère à un rythme qu'on ne connaissait pas.
Le courtier Vousfinancer en témoigne. "Une banque régionale a augmenté l'un de ses barêmes de 0,57% en l'espace d'un mois. Je n'avais jamais vu ça", souligne Sandrine Allonier, la directrice des études. Concrêtement, pour les bons profils cette banque vient de faire passer son crédit sur 20 ans de 1% à 1,57%. Pour les moins bons profils d'emprunteurs, on passe de 1,25% à 1,62% sur cette même durée. Autre symbole: une banque nationale cette fois-ci vient de faire repasser ses crédits sur 25 ans au-dessus de la barre des 2% pour les ménages les moins aisés.
Selon Vousfinancer, les taux moyens affichent désormais en moyenne: 1,2% sur 15 ans, 1,35% sur 20 ans et 1,55% sur 25 ans. En janvier dernier, ces taux moyens étaient (toujours selon le courtier) respectivement de 1% sur 15 ans, 1,15% sur 20 ans et 1,40% sur 25 ans.
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L'impact de ces hausses de taux dans le coût global du crédit est loin d'être négligeable. Par exemple, avec un crédit de 300.000 euros sur 20 ans, en passant de 1% d'intérêts à 1,5%, le crédit coûtera au final plus de 16.300 euros de plus à l'emprunteur. Pour les ménages qui empruntent au maximum de leurs capacités, cela signifie donc du pouvoir d'achat immobilier en moins. Prenons un autre exemple: un couple gagnant 4.000 euros net imposable et qui emprunte sur 25 ans. Avec un taux d'endettement à 35% (assurance comprise), ils peuvent donc avoir une mensualité de 1.400 euros. Avec des taux à 1,4% (et une assurance à 0,4%), ils peuvent emprunter environ 327.000 euros. Si le taux passe à 1,6% (et toujours une assurance à 0,4%), ce montant tombe à 319.000 euros environ. Soit 8.000 euros de budget en moins pour acheter. Avec des hausses plus importantes ou sur des budgets plus conséquents, c'est rapidement 10.000 à 20.000 euros en moins.
Des banques fébriles
Or, ce mouvement de hausse des taux est général. Toutes les banques sont plus ou moins en train de remonter leurs barèmes depuis 3 ou 4 mois. Mais évidemment, elles ne le font pas toutes au même rythme ni dans les mêmes proportions. Le constat général du côté des courtiers, c'est qu'elles sont extrement fébriles quant à l'attitude à adopter dans un tel climat d'incertitude, entre la guerre en Ukraine et le resserrement monétaire enclenché par la Fed et la BCE. Chez Empruntis, Cécile Roquelaure raconte ainsi que certaines banques ont d'ailleurs décidé de multiplier les comités de taux, ces réunions qui se tiennent traditionnellement une fois par mois pour acter de la politique à adopter sur le crédit immobilier. Certains établissements optent désomais pour un comité par semaine. C'est dire le manque de visibilité des banques.
Chez Empruntis, on reste toutefois plutôt optimiste: "Certes les banques veulent reconstituer leurs marges sur le crédit immobilier", reconnaît Cécile Roquelaure. "Mais elles ont aussi chacune des intérêts différents à des moments différents. Il reste ainsi des banques qui sont plutôt en phase de stabilisation des taux".
L'une d'entre elles, selon Cécile Roquelaure, pourrait même consentir de légères baisses dans les prochaines semaines. Car il y a un autre sujet qui commence à monter: le coût de l'énergie dans le budget des ménages. Pour éviter l'exclusion de certains ménages du crédit, certaines banques pourraient être tentées de modérer les hausses de taux qu'elles avaient prévues.