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Sécheresses et mauvaises récoltes: l'huile d'olive risque de manquer en Europe à l'automne

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Le Conseil oléicole international a délivré des chiffres inquiétants concernant l’état de l’industrie de l’huile d’olive en Europe. De grandes pénuries et une flambée des prix sont attendus à l'automne.

Les prix européens de l’huile d’olive ont grimpé à plus de 7 euros le kilogramme, contre 4 euros le kg en septembre. Une situation inouïe qui est principalement due à la sécheresse et au stress hydrique qui frappe particulièrement le sud de l’Europe depuis plusieurs mois.

L’Espagne, qui représente à elle seule près de 50% de la production mondiale, est en première ligne et craint déjà une deuxième mauvaise récolte alors que les températures européennes ne cessent d’être revues à la hausse. Une pénurie d’huile d’olive généralisée est donc déjà envisagée à l’automne prochain.

850 000 tonnes produites contre 1,3 million en temps normal

Le Conseil oléicole international prévoit que l’Espagne produira 850 000 tonnes d’huile d’olive en 2023 contre 660.000 tonnes l’année dernière, qui fut la pire année depuis dix ans.

Mais c’était sans compter les perspectives d’une canicule sans précédent qui devrait particulièrement toucher l’Europe cet été. Plus encore, lors d’une année “normale”, le pays est en capacité de produire 1,3 million de tonnes d’huile.

L’industrie essuie par ailleurs déjà une crise depuis le printemps dernier, alors que la chaleur a perturbé la floraison des oliviers du territoire espagnol. Et avec des pics de chaleur atteignant les 43°C déjà atteints cette semaine, certaines régions du Sud de l’Espagne voient déjà les fruits de leurs arbres tomber au sol.

“Je ne peux pas partager à quel point cela nous cause de l'anxiété”

"En Espagne, nous savons déjà que ce sera une autre mauvaise année, mais personne n'a compris ce qui se passe actuellement. Les températures record ne vont pas améliorer la situation”, a déclaré au Guardian Walter Zanre, directeur général de la branche britannique de Filippo Berio, le plus grand producteur mondial d'huile d'olive.

“Je ne peux pas partager à quel point cela nous cause de l'anxiété. L'année dernière, l'Espagne est entrée en récolte avec un peu de retard, ce qui a quelque peu compensé le manque à gagner. Cette année, les barils sont à sec. Même si l'Espagne produit les 850.000 tonnes prévues, la situation des prix est pire.”

Ce dernier ajoute que les prix vont continuer de grimper - au même titre que les prix, expliquant que les autres pays producteurs comme l’Italie et le Portugal font face à la même crise. Selon les derniers chiffres du Bureau de la statistique nationale britannique (ONS), les prix de détail de l’huile d’olive au Royaume-Uni ont augmenté de 47% en un an (une moyenne de 6,16 £ pour 500 ml en mai).

Les stocks d'huile d’olive épuisés dès septembre

Ainsi, les supermarchés devraient connaître des pénuries d’huile d’olive dès l’automne prochain. Le raisonnement est simple: la prochaine récolte en automne ne devrait produire de l’huile nouvelle qu’à partir de novembre et les stocks produits l’an passé devraient être épuisés dès septembre.

Face à la flambée des prix, les acheteurs ont freiné leurs dépenses en huile d’olive. La consommation au Royaume-Uni a déjà baissé d’un cinquième, selon l’institut Kantar. De leur côté, les embouteilleurs et autres distributeurs d’huile d’olive ont invoqué des clauses de force majeure dans leurs contrats pour justifier à la fois la réduction des quantités commandées et l’augmentation de leurs prix.

“Nous envisageons une situation très difficile au cours des prochains mois. Il n'est pas exagéré de dire que l'huile d'olive est une industrie en crise. Bien que les prix soient très élevés, personne ne s'enrichit”, commente Walter Zanre tout en rappelant que ce sont bien les petits producteurs qui étaient les plus susceptibles de faire faillite.

Et puisque le contexte de dérèglement climatique ne va a priori pas s’arranger avec le temps, le groupe Filippo Berio se tourne déjà vers la Turquie et même le Chili pour renforcer son approvisionnement de l'Europe en olives, qui traditionnellement repose sur l'Italie, la Grèce et l'Espagne.

Pierre Berthoux