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Yen, franc suisse, obligations: ces valeurs refuges qui résistent à la chute des marchés

Le yen fait partie des valeurs refuge alors que les bourses mondiales chutent dans le sillage de l'annonce de nouveaux droits de douane par Donald Trump.

Le yen fait partie des valeurs refuge alors que les bourses mondiales chutent dans le sillage de l'annonce de nouveaux droits de douane par Donald Trump. - DR

Face aux tensions économiques provoquées par les droits de douane annoncés par Donald Trump, les investisseurs se tournent vers les valeurs refuges. Obligations d’État, franc suisse ou yen profitent de ce regain d’intérêt, tandis que le dollar vacille.

Face à la tempête boursière, les investisseurs recherchent les îlots de sûreté, c'est-à-dire des placements sûrs. Les valeurs refuges retrouvent les faveurs des marchés, à commencer par certaines devises traditionnellement considérées comme telles: le franc suisse et le yen japonais.

Depuis le 2 avril, date de l'annonce de Donald Trump sur les surtaxes douanières, le franc suisse s’est apprécié de 2,72% face au dollar, tandis que le yen japonais a progressé de 1,51%. Ce lundi, le franc suisse s’échangeait à 0,85 franc pour un dollar, en hausse de 0,83% sur la séance. Le yen, quant à lui, cotait à 146,26 yens pour un dollar, en léger recul sur la séance, mais sur une tendance haussière depuis plusieurs jours.

En parallèle, les obligations d’État, autre pilier des placements considérés comme sûrs, suscitent un regain d’intérêt. Le rendement des bons du Trésor américain à 10 ans s'établit actuellement à 4,15%, contre 4,22% mercredi dernier, soit une baisse de 2,33%. Notons que ce taux connaît toutefois une forte volatilité. Le rendement est tombé jusqu'à 3,89% ce lundi avant de fortement remonter, donc.

Celui de l’obligation allemande de même échéance, quant à lui, s’affiche autour de 2,611% contre environ 2,722% le 2 avril.

Rappelons que la valeur des obligations évolue en sens inverse des taux de rendement: plus la demande pour ces titres augmente, plus leur prix grimpe, entraînant mécaniquement une baisse des taux.

Les conséquences des tarifications douanières

La semaine dernière, les annonces tarifaires de Donald Trump ont semé le chaos sur les marchés financiers mondiaux. En décidant une hausse généralisée des droits de douane, notamment sur les produits technologiques en provenance d'Asie et d'Europe, l’administration américaine a pris les investisseurs par surprise.

Résultat: les principales places boursières ont plongé. À Wall Street, les pertes ont été particulièrement lourdes, avec une dégringolade qui a fait s’évaporer près de 6.000 milliards de dollars de capitalisation sur les marchés américains entre jeudi et vendredi. Cette déroute boursière s'est poursuivie ce lundi.

Dans ce climat d’incertitude, les investisseurs ont, donc, réorienté leurs portefeuilles vers des valeurs refuges. Pourquoi ce choix?

Ruée vers la qualité: les marchés fuient le risque

D’abord, les obligations d’État, ces emprunts émis par les gouvernements, offrent une sécurité recherchée en période de turbulences économiques. Plus la demande pour ces titres augmente, plus leurs rendements tendent à baisser, traduisant le besoin de stabilité des marchés.

Cette ruée vers les obligations, mais aussi vers des devises jugées plus stables, illustre ce que les analystes appellent le phénomène de "flight to quality", ou "ruée vers la qualité".

Il s'agit d'un phénomène observé lors des phases d’incertitude ou de tensions sur les marchés, lorsque les investisseurs délaissent les actifs risqués pour se repositionner sur des placements plus sûrs, quand bien même moins rémunérateurs.

Selon les explications de John Plassard, spécialiste de l'investissement chez Mirabaud, la baisse des taux obligataire ne serait pas sans lien avec la stratégie même de Donald Trump. Le président américain chercherait à faire baisser les rendements des bons du Trésor, dans le but de réduire les coûts d’emprunt pour l’État et les entreprises, et ainsi soutenir la croissance économique. Une manœuvre risquée, mais qui pourrait redessiner l’équilibre des forces sur les marchés mondiaux.

Le yen et le franc suisse, deux monnaies historiquement perçues comme des abris financiers, profitent également de cette quête de sécurité. Dans un contexte de volatilité, ces devises sont privilégiées pour leur stabilité, incarnant une forme de refuge face aux tensions économiques et géopolitiques.

"Compte tenu de la montée de l’incertitude, les devises refuges telles que le franc suisse et le yen japonais ont enregistré les gains les plus marqués", explique ainsi un rapport de la banque suisse J. Safra Sarasin.

Cette vague de défiance a eu un effet immédiat sur le dollar, dont le statut de valeur refuge se fragilise. Comme l’explique la banque suisse J. Safra Sarasin, la devise américaine reste exposée à de forts "vents contraires", notamment en raison du ralentissement de l’économie américaine. Les indicateurs récents, comme le GDPNow de la Fed d’Atlanta ou la confiance des ménages, montrent des signes de faiblesse, tandis que les données en zone euro surprennent positivement. Un déséquilibre qui remet en question l’avantage comparatif du billet vert à court terme.

Pauline Guillaume