Le patron de Suez isolé, son poste menacé

Le directeur général de Suez Bertrand Camus lors de la conférence annuelle d'Euronext à Paris, le 14 janvier 2020 - ERIC PIERMONT © 2019 AFP
"Avec ou sans Veolia, le départ de Bertrand Camus n’est qu’une question de temps". C’est par cette phrase assassine qu’un protagoniste du dossier Veolia-Suez scelle le sort du directeur général de Suez.
Au lendemain d’un quasi-accord avec Veolia pour lui vendre sa part de 29,9% dans Suez, Engie a, selon nos informations, aussi demandé au PDG Antoine Frérot de formaliser l’intégration des dirigeants de Suez dans son groupe. La place de Bertrand Camus semble difficile à trouver.
"Il a été trop loin dans son opposition alors que tout le monde pousse cette opération", explique un actionnaire de Suez.
Bertrand Camus est l’objet de toutes les pressions depuis une semaine. Mardi, le ton est encore monté d’un cran contre lui. Alors qu’il s’opposait encore à l’offre de Veolia, son actionnaire à 32%, Engie, l’a chargé comme jamais à propos de la création d’une fondation pour bloquer l’offensive de Veolia.
"On a franchi une limite, une ligne rouge […] et c’est une grave erreur de jugement" a lancé le président d’Engie, Jean-Pierre Clamadieu devant les députés.
Pas un mot sur le président du conseil d'administration de Suez, Philippe Varin, qui a pourtant validé la mise en place de cette fondation. Dans l’entourage d’Engie, on ne cache pas que le patron de Suez a été trop loin et "qu’à un moment donné, Bertrand Camus sera menacé". "Engie veut le sortir", confirme un bon connaisseur du groupe.
Bertrand Camus déjà hors-jeu
Même son de cloche chez Veolia avec qui les discussions étaient rendues impossible par le patron de Suez. Le groupe dirigé par Antoine Frérot a longtemps misé sur Bertrand Camus pour ouvrir une négociation. Face au refus du directeur général de Suez, Veolia semble aussi militer pour sa mise à l’écart.
"Bertrand Camus ne fera pas partie de l’opération, explique un proche groupe. Il est devenu un obstacle à des discussions".
Son rôle et sa place ont déjà basculé depuis quelques jours. "Tout le monde a 'débranché' Camus", relatent plusieurs sources. Il était mis à l’écart lors des multiples échanges avec Bercy. "C’est Philippe Varin qui est à la manœuvre", confirme un proche de Suez. Plusieurs sources rapportent que Bercy a fait pression sur le président de Suez, Philippe Varin, pour évincer son directeur général. "lls réfléchissent à changer la gouvernance de Suez", assure un dirigeant impliqué dans les discussions.
"On ne se mêle pas de leur gouvernance", dément-on à Bercy même si l’entourage de Bruno Le Maire n’a pas apprécié que le patron de Suez mette de l’huile sur le feu. "Mais il peut être sorti par son conseil comme l’a été Isabelle Kocher chez Engie", prévient une autre source proche des pouvoirs publics.
La place de Philippe Varin en jeu
La pression est maximale sur Bertrand Camus dont l’avenir est en suspens. Reste à savoir ce que fera son conseil d’administration. L’entente n’a jamais été très entre bonne le directeur général Bertrand et le président Philippe Varin. Deux fonctions, deux styles et deux visions.
Le premier vient de l’interne, l’autre ne connait pas Suez qu’il a rejoint il y a seulement quatre mois et semble avoir un avenir plus radieux chez Veolia. Les mauvaises langues assurent que l’intéressé a tenté de négocier la présidence de Veolia dans le cadre des échanges avec Bercy.
D’autres estiment que l’idée aurait été lancée par Bercy. Selon nos informations, Antoine Frérot serait prêt à offrir une place de choix à Philippe Varin à son conseil d’administration, comme la vice-présidence. Réponse dans cinq jours.