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"On ne va pas fermer une usine à Douai pour en ouvrir une au Texas": quelles conséquences des droits de douane de Trump pour la France?

Le secteur automobile souffre en Bourse

Le secteur automobile souffre en Bourse - Lenny Kuhne sous licence Unsplash

Lancé dans une guerre commerciale, Donald Trump a décidé d'instaurer des droits de douanes de 25% sur les voitures produites en dehors des États-Unis. Quelles peuvent être les conséquences sur l'économie et l'emploi en France?

Les Français doivent-ils s'inquiéter? Donald Trump vient d'annoncer de nouveaux droits de douane de 25% sur "toutes les voitures qui ne sont pas fabriquées aux États-Unis". Et cette annonce aura des conséquences sur les constructeurs européens qui exportent vers les États-Unis. Et par ricochet sur les emplois sur le Vieux continent. Heureusement, la France devrait être peu touchée.

La France sera peu concernée, beaucoup moins que l'Allemagne par exemple", assure l'économiste Flavien Neuvy à BFM Business.

"Cette année, la France n'a produit que 1,3 million de voitures, c'est un point très bas. Et parmi elles, une très petite proportion est exportée aux États-Unis", explique le directeur de l'Observatoire Cetelem de l'Automobile.

"On ne fabrique même pas assez de voiture pour notre marché intérieur, on ne va pas aller les vendre aux États-Unis, et encore moins fermer une usine à Douai pour en ouvrir une au Texas", assure-t-il.

En revanche, les équipementiers automobiles pourraient être plus touchés, car les pièces produites hors des États-Unis seront aussi taxées. En effet, "ils vendent beaucoup aux constructeurs américains", selon Antoine Bouët, directeur du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (Cepii).

La fédération des équipementiers (Fiev) pointe notamment "des conséquences très directes pour nos équipementiers français qui fournissent largement les constructeurs allemands". Valeo a d'ors et déjà annoncé qu'il ne pourra pas absorber les droits de douane annoncés par le président américain et qu'il devra augmenter ses prix en conséquence.

"Un impact douloureux"

Les effets sur l'emploi de l'annonce de Donald Trump pourraient rester modérés en France. En revanche, les conséquences sont plus sérieuses au niveau européen, et en particulier pour l'Allemagne.

"La hausse des tarifs douaniers américains sur les voitures importées depuis l’Europe pourraient avoir un impact douloureux sur l'industrie automobile européenne", estime le cabinet Kearney.

Dans une analyse publiée avant l'annonce de Trump, le cabinet estimait qu'"avec des taxes américaines de 10, 15 ou 20% entièrement répercutées sur les consommateurs, ce sont jusqu’à 60.000 véhicules européens qui pourraient ainsi ne plus trouver preneurs outre-Atlantique".

En conséquence: "Jusqu'à 25.000 emplois pourraient être menacés dans la filière et la pression sur les marges des fournisseurs pourrait leur rendre la situation difficilement soutenable", prévient Sébastien Amichi, analyste spécialisé dans l'automobile.

Les vins et spiritueux inquiets

Si la France serait plutôt épargnée sur l'automobile, il n'en va pas de même pour les vins. Si Donald Trump mettait en application sa menace de taxer à 200% les vins et champagnes européens, la France s'en retrouverait très affectée, tout comme les emplois dans la vini-viticulture.

En effet, avec 3,81 milliards d'euros, les États-Unis représentaient 24,5% des exportations françaises en valeur en 2024, selon la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux de France (FEVS).

"À 200%" de droits de douane, "le business s'arrête", a prévenu son directeur Nicolas Ozanam, selon lequel cela reviendrait à tripler le prix de la bouteille vendue.

La France moins exposée que les autres

Enfin, si on imagine une hypothèse très pessimiste de 25% de droits de douane sur tous les produits européens, alors la France ne serait pas le pays le plus affecté, selon la Banque de France.

En effet, les exportations tricolores de biens vers les États-Unis ne représentent "que" 1,6% du PIB. Soit une exposition au marché américain inférieure d'environ 40% à celle des exportations de l'UE dans son ensemble (2,8% du PIB de l'UE). À titre de comparaison, l'Allemagne et l'Italie sont bien plus exposées avec des exportations vers les États-Unis qui représentent respectivement 3,8 et 3,1% de leur PIB.

Par ailleurs, l'économie de la France est largement tournée vers les services et pas vers les biens. Parmi les secteurs qui souffriraient, on retrouve, en plus des vins et spiritueux, "les secteurs du luxe, de la chimie, de la pharmacie et les équipementiers automobiles", selon Antoine Bouët.

Marine Cardot