Frais cachés et jungle des options: Air Canada devra verser 6 millions d'euros à des passagers

Chacun a en fait l'expérience. Lors de l'achat en ligne d'un billet d'avion, le premier prix affiché correspond rarement aux prix final réellement facturé. En cause, l'ajout de frais cachés (exemple pour payer en carte bancaire) et d'options parfois obligatoires facturées au fur et à mesure du processus d'achat (siège, bagages...) et dont le total n'est communiqué qu'au moment du paiement ou après le choix du vol.
Cette approche qui permet aux compagnies aériennes d'afficher un prix d'appel séduisant est de plus en plus dénoncée par les clients et les associations de consommateurs.
Au Canada, une action collective a débouché sur une condamnation en appel assez sévère d'Air Canada. L'opérateur devra verser 10 millions de dollars canadiens (soit 6,3 millions d'euros) de dommages et intérêts à ces passagers pour frais supplémentaires dissimulés entre juin 2010 et février 2012.
Pratiques "graves et délibérées"
La juge a estimé que cette pratique est contraire à la loi sur la protection du consommateur du Québec, qui exige que le prix total soit clairement indiqué dès le départ. Elle a estimé que ces pratiques étaient "graves, délibérées et affectent un grand nombre de consommateurs".
"L’octroi de dommages-intérêts punitifs est nécessaire pour dénoncer ce comportement ", peut-on lire dans l'arrêt.
Au Canada ou ailleurs, ces pratiques commerciales embrouillent de plus en plus les consommateurs, notamment autour de la prise en charge et de la facturation des bagages. Selon une étude menée par le comparateur Parkos, 68% des voyageurs français considèrent que les différences de réglementations sont "déroutantes".
Des compagnies déjà sanctionnées
En novembre dernier, le gouvernement espagnol a infligé une amende globale de 179 millions d'euros aux compagnies aériennes low-cost Ryanair, Vueling, EasyJet, Volotea et Norwegian, accusées de pratiques abusives, notamment dans la facturation des bagages à main des passagers.
Ces cinq compagnies ont été sanctionnées pour facturer les bagages à main des passagers, mais aussi le choix du siège lorsqu'un voyageur accompagne des personnes dépendantes, comme les personnes handicapées ou les enfants.
L'amende sanctionne également l'interdiction décidée par ces compagnies de payer en liquide l'achat de billets, et l'instauration d'une "redevance disproportionnée et abusive" pour l'impression de la carte d'embarquement dans les aéroports.
Bagages, plateaux repas, choix du siège… Il faut se souvenir que les options payantes sont au coeur du modèle économique de ces compagnies. Elles ont représenté 14,7% du chiffre d'affaires des compagnies aériennes en 2023, soit 117,9 milliards de dollars, selon une étude. Mais cela peut monter à plus de 50% pour certains transporteurs.
Avant la crise du Covid, en 2019, ces revenus dits associés étaient de 109,5 milliards de dollars, soit 12% du chiffre d'affaires total. Et en 2014, ils ne représentaient que 6,7% de leurs revenus.