Quel avenir pour l'aviation civile russe après le crash du vol SU1492 d’Aeroflot?

Le Soukhoï Superjet 100, premier avion civil conçu par la Russie post-soviétique et destiné à faire concurrence au Brésilien Embraer et au Canadien Bombardier sur le marché des avions régionaux - Ho/Citu News Agency Moscow /AFP
Le crash du Sukhoï Superjet-100 va-t-il mettre un terme aux ambitions de la Russie dans l'aéronautique civil? En créant cet avion de ligne de 100 places, Sukhoï Civil Aircraft nourrissait l'ambition de conquérir 20% du marché des vols régionaux et grignotant des parts de marché à la fois au brésilien Embraer, au canadien Bombardier et même à Airbus, présent sur ce créneau avec la version la plus courte de son A220.
Mais le constructeur russe va vite déchanter. En 2012, lors d'un show aérien organisé en Indonésie, il entend montrer tout le potentiel de son avion. Les essais ont été concluants. Pourtant, lors cette démonstration, l'appareil s'écrase faisant 45 morts. L'enquête avait conclu une erreur de pilotage, mais cet épisode refroidit les clients potentiels.
Les clients étrangers refroidis
Par la suite, et à plusieurs reprises, le gendarme de l'aviation civile russe ordonne des interdiction de vols pour réaliser des contrôles. A l'étranger, les quelques compagnies qui en ont fait l'acquisition relèvent des problèmes techniques qui entraînent plusieurs annulations parmi les commandes en cours. L'élément généralement mis en cause est le train d'atterrissage.
En 2016, la compagnie aérienne irlandaise CityJet, seule exploitante européenne de l'avion russe, a rompu le contrat pour sept SSJet100 dont quatre devaient être loués à Brussels Airlines, la filiale belge de Lufthansa. Selon le ministre de l'Industrie et du Commerce, Denis Manturov, cette décision n’est pas liée à la qualité de l’avion. Mais selon le site Vedomosti qui s'appuie sur plusieurs sources, CityJet se plaint du "manque de pièces de rechange qui entraîne de longue période d'inactivité".
L'appareil russe est aujourd'hui utilisé par des compagnies aériennes thaïlandaise, laotienne, indonésienne, kazak et tadjik. Mais à ce jour, Interjet, une compagnie low-cost mexicaine, reste le plus important de ses clients étrangers. Un client satisfait? En mars dernier, le magazine aéronautique FlightGlobal révèle qu'Interjet n'utilise en fait que 7 de ses 22 SuperJet 100.
Les compagnies russes incitées à passer commande
Au final, les plus gros clients de l'appareil sont les compagnies russes, Aeroflot en tête. Et pour cause, le gouvernement russe aurait exercé de fortes pressions sur les compagnies aériennes du pays pour qu'elles passent commande. Et pour mieux les convaincre, des subventions leur ont été octroyées. "Des milliards de dollars ont été investis dans ce projet et continuent d'être investis", a expliqué à l'AFP l'expert en aviation russe Boris Rybak, de Infomost Consulting. "La très grande majorité de ces avions sont en service en Russie (...) Aeroflot a aujourd'hui 50 Superjet 100 et a signé un contrat pour 35 de plus", précise cet expert. La compagnie aérienne a par ailleurs signé un commande en septembre dernier pour une centaine d'appareils.
Les SSJet100 seront-ils cloués au sol comme les Boeing 737 MAX? Aucune autorité aérienne dans le monde n'a exprimé cette demande. En Russie, les autorités excluent cette option, selon Reuters. Une enquête a été lancée pour déterminer les causes de l'accident qui a coûté la vie à 41 personnes à Moscou. Selon le pilote, les conditions météorologiques auraient causé le drame. Frappé par la foudre, l'avion aurait été contraint de se poser sans instruments de bord. La brutalité de l'atterrissage aurait fait exploser les réservoirs pleins. Les premières sources faisaient état d'un incendie s'étant déclaré à bord mais une vidéo publiée plusieurs heures après le crash montre l'appareil touchant le tarmac, puis rebondissant avant de s'enflammer.