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Fabrication de trains: l'Espagne refuse une OPA hongroise sur Talgo

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Ce véto a été décidé au nom de la "sécurité nationale". Talgo construit des trains à grande vitesse pour la Renfe mais aussi pour le futur opérateur français Le Train.

Le gouvernement espagnol a mis son veto mardi, au nom de la "sécurité nationale" du pays, à une tentative d'OPA lancée par une compagnie hongroise liée au gouvernement du Premier ministre Viktor Orban sur le constructeur de trains espagnol Talgo.

S'appuyant sur une récente loi destinée à protéger les intérêts de l'Espagne face aux investissements étrangers dans les secteurs sensibles, le gouvernement du socialiste Pedro Sánchez a décidé de bloquer l'OPA du groupe hongrois Ganz Mavag Europe Private Limited visant Talgo, principal fournisseur de la compagnie ferroviaire nationale Renfe, a annoncé le ministère espagnol de l'Économie dans un communiqué.

"Risques pour la sécurité nationale"

La décision a été prise mardi matin lors de la première réunion du Conseil des ministres après les vacances d'été, le gouvernement ayant estimé, selon le communiqué, qu'autoriser cette opération "entraînerait des risques pour la sécurité nationale et l'ordre public".

Le ministère n'explicite pas les raisons exactes ayant motivé ce refus, précisant simplement que l'information sur laquelle se base la décision a été déclarée "classifiée" par le Conseil des ministres.

La rumeur d'un veto gouvernemental se faisait de plus en plus insistante mardi en fin de matinée, lorsque le gendarme boursier espagnol (CNMV) annonçait que la cotation de Talgo à la Bourse de Madrid était suspendue dans l'attente d'informations importantes concernant l'entreprise.

Quelques minutes plus tard, le communiqué du ministère de l'Economie confirmait le veto gouvernemental.

"Bouclier anti-OPA"

Le Conseil des ministres, précisait le communiqué, a décidé "de ne pas autoriser l'investissement direct étranger dans Talgo S.A. de la part de Ganz Mavag Europe Private Limited, pour des raisons de protection des intérêts stratégiques et de sécurité nationale de l'Espagne".

"Pour le gouvernement, Talgo est une entreprise stratégique dans un secteur clé pour la sécurité économique, la cohésion territoriale et le développement industriel de l'Espagne", poursuit le communiqué.

Madrid avait ainsi recours à son "bouclier anti-OPA", déployé depuis le début de la crise du Covid-19, qui rend obligatoire le feu vert de l'Etat avant que des intérêts étrangers puissent acquérir plus de 10% d'une entreprise espagnole jugée prioritaire.

Le gouvernement de Pedro Sánchez avait manifesté ses craintes dès l'annonce début mars par Talgo que l'entreprise faisait l'objet d'une OPA à hauteur de 100% de son capital de la part de cette société hongroise.

Pour sa part, Talgo avait exprimé "un avis préliminaire favorable" à l'opération au regard du prix de cinq euros par action offert par le consortium hongrois, prix jugé "attractif pour les actionnaires", valorisant le constructeur à 620 millions d'euros. Dans le même temps, il avait décliné une offre de rachat du tchèque Skoda.

Les médias espagnols avaient immédiatement souligné que Ganz Mavag Europe Private Ltd était un consortium regroupant le groupe Magyar Vagon et le fonds public hongrois Corvinus Zrt, contrôlé par le gouvernement de Budapest. Le communiqué du ministère de l'Économie ne fait aucune référence à ce point.

Fournisseur de la Renfe et Le Train

Madrid a instauré en 2020 un contrôle des investissements étrangers dans les secteurs stratégiques, à l'origine pour protéger ses entreprises fragilisées par la crise sanitaire, notamment dans les secteurs des "infrastructures critiques", de la santé et de la sécurité.

Le probable design des trains à grande vitesse Le Train fabriqués par l'espagnol Talgo
Le probable design des trains à grande vitesse Le Train fabriqués par l'espagnol Talgo © Le Train

Le mécanisme avait été activé notamment en août 2021, lorsque le fonds australien IFM avait lancé une OPA partielle sur le groupe énergétique Naturgy. Cette opération avait alors été validée par Madrid, permettant à IFM d'acquérir alors près de 11% du géant espagnol.

Fondé en 1942, le groupe Talgo est le principal fournisseur de trains de la compagnie ferroviaire espagnole Renfe. L'entreprise, dont le principal actionnaire est le fonds d'investissement Trilantica, exporte notamment en Allemagne, en Arabie saoudite, au Danemark, en Egypte et aux Etats-Unis.

Il a été choisi par le futur opérateur français Le Train pour lui fournir des rames à grande vitesse qui circuleront dans le Grand Ouest.

OC avec AFP