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Défense

La Corée du Nord poursuit la construction de son plus gros navire de guerre

Kim Jong-Un visitant le commandement du 2e corps de l'armée populaire coréenne, le 17 octobre 2024.

Kim Jong-Un visitant le commandement du 2e corps de l'armée populaire coréenne, le 17 octobre 2024. - AFP PHOTO/KCNA VIA KNS

La Corée du Nord poursuit son réarmement avec la construction de ce qui ressemble à une frégate lance-missiles. Elle serait le plus gros et le plus moderne des bâtiments de la marine nord-coréenne.

Les images satellite fournies par Maxar Technologies et Planet Labs le 6 avril et reprises par CNN révèlent que les travaux de construction du navire de guerre se poursuivent, avec l’intégration de ce qui ressemble à des tubes de lancement verticaux pour missiles, selon des analystes interrogés par la chaîne américaine. Les travaux se déroulent sur le chantier naval de Nampo, situé sur la côte ouest de la Corée du Nord, à une soixantaine de kilomètres de la capitale Pyongyang.

Les analyses menées par des chercheurs du Center for strategic and international studies (CSIS) montrent que le navire afficherait une longueur de 140 mètres environ, ce qui en ferait le plus long des bâtiments de surface construit par la Corée du Nord. A titre de comparaison, la longueur des frégates multimissions (FREMM) de la marine française mesurent 142 mètres.

De premières images issues de la chaîne de télévision nord-coréenne KCTV ont été diffusée fin 2024, montrant le président Kim Jong-un inspectant un navire en cours de construction, selon le think tank IISS (International institute of strategic studies).

Quelles capacités pour quel budget?

Dans une interview de CNN réalisée en mars, Kim Byung-kee, législateur et membre de la commission du renseignement de l’assemblée nationale sud-coréenne, déclarait que "l’exploitation d’un navire de guerre de cette taille nécessite un budget important. Il faut non seulement le construire, mais il faut aussi constituer un équipage pour le faire fonctionner et cela coûte cher, y compris en équipements et en carburant".

"En outre, un seul bâtiment de guerre ne peut opérer seul. La question est donc de savoir si la Corée du Nord peut en assurer le coût?"

Si la construction d'une coque de navire et du système de propulsion est à la portée de la majorité des constructeurs navals, "l'intégration de systèmes de communication, d'armement et de capteurs électroniques et acoustiques représente un défi pour les navires de guerre modernes", explique un ancien militaire de l’US Navy cité par CNN. Il indique par ailleurs que les travaux de construction pourraient durer encore au moins un an, avant de lancer les essais en mer.

Les analystes interrogés par CNN préviennent qu'il ne faut pas surestimer les capacités militaires embarquées, mais qu'il ne faut pas les sous-estimer pour autant. "Si la Corée du Nord équipe la nouvelle frégate du missile balistique hypersonique qu'elle prétend avoir testé avec succès en janvier, cela changera la donne en matière de sécurité régionale", expose Kim Duk-ki, un amiral sud-coréen à la retraite.

Un réarmement massif

La Corée du Nord a entamé un renforcement considérable et rapide de ses capacités militaires, à l'image de la construction d'un sous-marin à propulsion nucléaire, dont les images ont été révélées en mars dernier. Un réarmement en dépit des sanctions de l'ONU pour limiter l'accès aux technologies permettant de développer ce type d'équipement.

Cependant, selon les analystes cités, le rapprochement entre Pyongyang et Moscou depuis le début de la guerre en Ukraine permettrait à la Corée du Nord de contourner ces sanctions.

Une flotte importante, mais obsolète

La flotte navale nord-coréenne est principalement axée sur les défenses côtières, selon un document de la Defence Intelligence Agency, l'agence de renseignement militaire américaine, daté de 2021. Le document comptabilise environ 400 bâtiments de surface, des patrouilleurs de petite taille et aux capacités limitées, même s'ils seraient équipés de missiles antinavires, de torpilles et de canons. La marine nord-coréenne exploiterait également environ 260 aéroglisseurs et bâtiments de débarquement pour mener des opérations amphibies.

Un article de janvier 2025 de Joseph Dempsey, chercheur à l'IISS, évoque également dans l'inventaire nord-coréen deux frégates de la classe Najin, qui constitueraient les principaux navires de combat en surface. Leur construction remontant aux années 1970, ils sont qualifiés "d'obsolètes" en termes de capacités d'action.

Quant aux sous-marins, la DIA en dénombrait environ 70 en 2021. À propulsion diesel-électrique, ces bâtiments de conception ancienne disposent d'une endurance limitée, mais ils auraient néanmoins "la capacité d'utiliser des torpilles et des mines pour menacer les navires marchands et les marines américaine et alliées opérant près de la péninsule coréenne".

Helen Chachaty