Canal Plus s'attaque à la neutralité du net

Patrick Bloche, Pierre Lescure, Francine Mariani-Ducray, Pascal Rogard et Rodolphe Belmer à Cannes - -
Le Festival de Cannes a donné à Canal Plus l'occasion de dire -une fois de plus- tout le mal qu'il pensait de Netflix. "Une concurrence déséquilibrée est en train de s'établir en termes fiscal, en termes d'obligations, en terme de masse et d'investissements", a déploré le directeur général Rodolphe Belmer lors d'un colloque organisé par la SACD.
"Il faut que nous soyons favorisés"
Face à ce "déséquilibre", la chaîne cryptée a mis sur la table ses solutions -pour ne pas dire ses revendications. Selon Rodolphe Belmer, "il faut créer des avantages compétitifs pour des acteurs comme nous", c'est-à-dire des acteurs qui financent l'audiovisuel français et payent leurs impôts en France.
Concrètement, "il faudrait qu'un acteur comme nous soit favorisé pour accéder aux fils du téléphone. Il faudrait que ce soit plus facile pour nous d'amener nos programmes avec une bonne qualité de débit".
La philosophie du net
En clair, la chaîne cryptée aimerait bien que son trafic soit prioritaire sur Internet. Ce qui semble contraire à la philosophie actuelle du réseau, où tous les trafics sont traités sur un pied d'égalité -c'est la neutralité du net. Invité à préciser sa pensée, Rodolphe Belmer assure: "nous ne sommes pas contre la neutralité du net".
Reste que ce discours cannois ne fait que dire tout haut ce que Canal Plus chuchote tout bas depuis des mois aux oreilles des pouvoirs publics. En effet, la chaîne cryptée s'est lancé dans un lobbying sur ce thème, afin visiblement d'obtenir une mesure législative.
Des chaînes en over-the-top
Si la chaîne cryptée s'intéresse au sujet, c'est qu'elle teste depuis peu la diffusion des chaînes de CanalSat en over-the-top (OTT), c'est-à-dire sur l'internet ouvert, et non pas via les box des fournisseurs d'accès internet.
Dans ces tests, le trafic de CanalSat est traité comme tout les autres trafics. Mais un trafic prioritaire pourrait être nécessaire pour garantir une bonne qualité vidéo. Canal, pour obtenir une telle priorité, envisage de payer le fournisseur d'accès, mais cela pourrait coûter cher, et surtout le fournisseur d'accès pourrait refuser. D'où l'intérêt d'une mesure législative qui forcerait les 'telcos' à favoriser le trafic internet des bons élèves.
Une idée du rapport Lescure
Une idée similaire avait déjà été avancée il y a un an par le rapport de Pierre Lescure: "pour les services culturels en ligne les plus vertueux, une priorité dans la gestion des débits pourrait être envisagée, sous le contrôle de l’Arcep, et dans le respect des règles qui seront adoptées concernant la neutralité du net".
Mais le ministère de la Culture ne semble pas encore convaincu. "Une telle mesure n'est pas prévue dans la future loi sur la création", indique-t-on rue de Valois.