BFM Business
Emploi

13 suicides et 8 tentatives en 6 mois: une série de drames percute la Direction générale des finances publiques qui ouvre des enquêtes

(Photo d'illustration)

(Photo d'illustration) - Olivier Douliery / AFP

Depuis le début de l'année, 13 suicides et 8 tentatives de suicide ont été dénombrés chez les agents par la CGT de la Direction générale des Finances publiques, soit autant que lors de toute l'année 2024.

C'est le premier d'une série de drames. Début janvier, un employé des finances publiques quitte son poste à la fin de la journée, et rentre chez lui. Mais dans la même soirée, il revient sur son lieu de travail. Ses collègues le découvre pendu le lendemain. Un traumatisme pour ces agents publics.

En six mois, 13 suicides et 8 tentatives de suicide ont été dénombrés par la Direction générale des Finances publiques, soit autant que lors de toute l'année 2024. Un chiffre deux fois plus élevé que la moyenne nationale dans la population générale.

Et le phénomène n'est pas propre à un service ou à une zone géographique. Il concerne toutes les classes d'âge, toutes les régions et toutes les structures de la DGFiP. En réaction, la direction a décidé d'organiser une réunion mercredi 9 juillet en présence des syndicats, des ressources humaines et de psychiatres, a appris BFMTV de sources syndicales, confirmant une information du Monde.

Elle a d'ores et déjà annoncé la tenue d'une enquête systématique en cas de suicide (qu'il se soit déroulé dans les locaux ou ailleurs) ainsi que la généralisation d'une formation en santé mentale.

30.000 emplois supprimés en 15 ans

Dans les cas de suicide, il reste difficile d'établir des liens de cause à effet avec l'environnement de travail. Néanmoins, face à ces drames, plusieurs sources syndicales évoquent un mal-être, une surcharge de travail des agents et une pression exercée par la direction, mais aussi des problèmes de consentement à l'impôt parmi la population qui ont pu dégénérer en agressivité auprès des agents.

Depuis deux décennies, la DGFiP a subi des réorganisations et des coupes dans les effectifs. En tout, plus de 30.000 emplois ont été supprimés entre 2008 et 2024, soit environ un quart des effectifs initiaux.

Cette année encore, 550 suppressions de postes doivent avoir lieu, dans la continuité des années précédentes. Et d'autres suivront puisque 3.000 suppressions sont prévues entre 2023 et 2027.

Parmi les réductions d'effectifs, les agents de catégorie B et la mission "fiscalité des particuliers" sont particulièrement touchés. Par ailleurs, 4.000 postes étaient vacants en 2024, aggravant encore la réduction des effectifs. Des sources syndicales dénoncent une dégradation des conditions de travail, des restructurations fréquentes, et émettent des inquiétudes sur la qualité du service public.

Des réformes d'ampleur et de modernisation

Par ailleurs, plusieurs réformes d'ampleur ont été menées ces dernières années. On peut notamment citer la généralisation du prélèvement à la source, mise en place en 2019, la suppression de la taxe d'habitation, l'accélération de la numérisation des procédures et la généralisation des services en ligne (comme la plateforme "Gérer mes biens immobiliers" par exemple).

Les agents ont également vécu de grandes transformations avec une réorganisation territoriale et la fermeture de nombreuses trésoreries, la restructuration des services locaux et la création de Centres de Gestion Financière. Certains services ou missions ont également été fusionnés.

Les syndicats s'inquiètent donc des conséquences qu'a pu avoir cette modernisation accélérée couplée à une réduction massive et continue de ses effectifs.

En 2020, un rapport du syndicat Solidaires alertait déjà sur les conditions de travail des employés des finances publiques. Stress permanent, perte de confiance, suppressions d'emplois, les conclusions de ce document étaient très alarmantes.

Si vous ou l’un de vos proches a des pensées suicidaires, c’est un signal d’alarme qu’il faut prendre très au sérieux.

Appelez le 3114, le numéro national de prévention du suicide. La ligne est ouverte 24h/24, 7j/7. L’appel est gratuit et confidentiel. Un professionnel de soins (infirmier ou psychologue), spécifiquement formé à la prévention du suicide, sera à votre écoute afin d’évaluer votre situation et vous proposer des ressources adaptées à vos besoins ou à ceux de vos proches.

En cas de risque suicidaire imminent, appelez le SAMU (15) ou le 112 (numéro européen). Vous trouverez des conseils et des ressources sur le site www.3114.fr, que vous soyez personnellement concerné ou que cela concerne l’un de vos proches.

Marine Cardot avec Gaëtane Meslin