Emissions de CO2: Pannier-Runacher accuse les entreprises, qui n'achètent pas assez d'électriques

Les chiffres sont mauvais mais pas inattendus. Selon le dernier baromètre du Citepa, chargé d'évaluer les émissions de CO2 françaises, ces dernières ont progressé au 3e trimestre 2024 (+0,5%), même si elles baissent depuis le début de l'année (-2,4%), grâce à deux premiers trimestres de baisse.
Invitée de nos confrères de RTL ce vendredi matin, la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher a voulu relativiser cette hausse, qui ne remet pas en question une baisse des émissions cette année. Elle pointe surtout que certains acteurs n'ont pas joué le jeu de la décarbonation de l'économie, à commencer par les entreprises.
"On observe un ralentissement des achats de véhicules électriques dans les entreprises, elles achètent deux fois moins que les ménages, il va falloir les pousser à jouer le jeu. [...] Elles achètent 11% d'électrique, contre 25% pour les ménages", a-t-elle rappelé.
Ce faible taux d'adoption par les entreprises empêche les émissions de baisser à court-terme, mais induit aussi des effets pervers à un horizon plus lointain: il empêche la constitution d'un marché d'occasion, dans lequel des particuliers moins aisés peuvent piocher leur propre véhicule électrique. Le succès du leasing social en début d'année a démontré la demande des particuliers pour ce marché.
Les discussions budgétaires "remises à zéro"
La ministre, qui se défend de tout affaiblissement politique malgré une relégation dans l'ordre protocolaire et le rattachement de l'énergie au ministère de Marc Ferracci, a aussi évoqué les chiffres du chauffage. Selon le Citepa, les émissions du secteur ont bondi de 11,8% par rapport à 2023 au troisième trimestre.
"Alors que la baisse dans les bâtiments allait vite, on constate l’augmentation de l’installation des chaudière à gaz et de l'utilisation du fioul, ce qui n'est pas une bonne nouvelle."
Le signal-prix ne fonctionne plus: avec le prix de l'énergie qui baisse, les Français n'ont plus fait d'effort de sobriété. MaPrimeRenov', principale aide à la décarbonation du secteur, sera légèrement modifiée en 2025. Les ménages aisés auront ainsi moins d'aides - mais le secteur a échappé au pire: le budget Barnier prévoyait, avant la censure, une réduction du dispositif.
Dans l'attente d'un nouveau budget, il sera reconduit et bénéficiera même de 600 millions d'euros supplémentaires l'année prochaine. Concernant les véhicules électriques, les aides ne connaissent pas le même sort et le bonus électrique sera bien raboté.
"Le bonus est en partie maintenu et nous travaillerons via les certificats d'économie d'énergie, à ce que les Français aient des aides importantes. En plus, le prix des voitures électriques baisse", a défendu Agnès Pannier-Runacher.
Elle a expliqué que les futures discussions budgétaires seraient difficiles pour l'écologie, déjà visée par le précédent exécutif - ce qui laissera une trace pour le "budget Bayrou".
"On remet tout à zéro, une nouvelle discussion va démarrer. Mais les précédentes discussions budgétaires sont dans la mémoire de chacun, a expliqué la ministre. On voit les améliorations à apporter au précédent budget, tout en étant responsable, sinon nos prêteurs exigeront plus d’intérêt."
La France pas en ligne avec ses objectifs
Rappelons que pour l'instant, la France ne tient de toute façon pas ses engagements. Paris s'est engagé à atteindre une baisse de 55% des émissions d'ici 2030, et la neutralié carbone en 2050. Le rythme de baisse des émissions n'est pas assez élevé pour atteindre ce dernier objectif.
En outre, l'effondrement des puits de carbone (fôrets, notamment) chargés d'absorber du carbone, amène à devoir encore accélérer nos baisses. "Malgré les résultats encourageants du rythme de baisse des émissions territoriales de gaz à effet de serre, les données actuelles indiquent que le second budget carbone de la France (période 2019-2023) ne sera pas tenu, notamment du fait de la forte diminution du puits de carbone des forêts gérées, fragilisé par le changement climatique", rappelait ainsi le Haut conseil pour le climat en juin dernier.