Balance ta fiche de paie: sur Twitter, les profs français se défendent d'être les mieux payés au monde

- - Guillaume Baptiste - AFP
Sur Twitter, les enseignants français sont nombreux à publier depuis ce matin leur fiche de paie sous le hashtag #BalanceTaFicheDePaieDeProf. La raison de leur colère? Une étude de l'OCDE publiée mardi 10 septembre et son interprétation faite par François-Xavier Pietri, lors de l'émission La Matinale sur LCI. Le journaliste y affirme que contrairement à ce qui est couramment dit, les enseignants français sont bien mieux payés que "leurs petits camarades de l'OCDE".
Selon les chiffres qu'il présente, un "prof des lycées", gagnerait en moyenne 3850 euros par mois, soit 393 euros de plus que la moyenne de l'OCDE. Un "prof des collèges", gagnerait 3425 euros, soit 214 euros de plus que la moyenne européenne. Seuls les "profs de l'école élémentaire" sont un peu moins bien payés. Ils gagneraient en moyenne 2975 euros, soit 83 euros de moins que la moyenne européenne.
Mais cette vision des choses, n'est pas celle des professeurs français qui se défendent, preuves à l'appui. Et sur les fiches de paie publiées sur le réseau social, aucun salaire affiché ne dépasse 3000 euros, même pour des professeurs agrégés, et plusieurs sont inférieurs à 2000 euros net mensuel.
Quand est-il vraiment? L'éditorialiste se trompe-t-il, les enseignants mentent-ils? En réalité ni l'un, ni l'autre. En effet, en citant ces chiffres, François-Xavier Pietri a omis de préciser une chose importante: les salaires cités comprennent les primes et les heures supplémentaires.
Dans un graphique de l'AFP réalisé à partir des données de l'OCDE, le salaire but annuel avec primes et heures supplémentaires des professeurs de collège après 15 ans d'ancienneté s'élève en moyenne à 45.375 dollars (41.517,67 Euro) contre 42.553 dollars (38.935,57 Euro) en moyenne OCDE. Sans les primes et les heures supplémentaires, le salaire des enseignants français, qui correspond à la grille de salaire qui fait référence dans les négociations entre syndicat et ministère, recule.

Une autre chose n'a pas été précisé, l'énorme complexité du calcul des revenus non seulement entre ceux du primaire, collège et lycée, mais également en fonction de leur ancienneté et d'un indice comme pour l'ensemble des fonctionnaires d'Etat.
"On parle des enseignants dans leur globalité en France", mais "il faut différencier les statuts et ne pas mettre tous les enseignants dans le même sac", précise à l'AFP Eric Charbonnier, expert éducation à l'OCDE. Cet expert ajoute aussi qu'en France, "l'avantage salarial" est "surtout notable au niveau du lycée où enseignent entre autres les professeurs agrégés". Enfin, seuls les enseignants du collège et du lycée font des heures supplémentaires, pas ceux du primaire ce qui expliquent que ces derniers soient les seuls à avoir un salaire moyen moins élevé que la moyenne des pays de l'OCDE.
22% de moins que la moyenne en milieu de carrière
Ces données aléatoires qui varient selon les établissements, les régions enseignants où ils se trouvent, l'ancienneté des enseignants et des heures qu'ils font en plus compliquent les choses. Comme le précise le rapport, "tous niveaux confondus, les enseignants français gagnent 22% de moins que la moyenne des pays développés en milieu de carrière. Puis l'écart se resserre fortement en fin de carrière puisque les salaires français sont inférieurs de seulement 2% à la moyenne".
Autre enseignement du rapport: entre 2000 et 2018 le salaire des enseignants qualifiés et ayant 15 ans d'ancienneté a augmenté dans la moitié des pays de l'OCDE. L'Angleterre, la France et la Grèce font figure d'exception: le salaire des enseignants y a diminué de respectivement 3%, jusqu'à 6% et 17%. En France, c'est notamment le gel du point d'indice qui explique cette diminution. Parmi leurs revendications de rentrée, les syndicats enseignants français ont fait d'une revalorisation salariale une priorité. Le ministre de l'Education, Jean-Michel Blanquer, a annoncé l'ouverture d'un dialogue sur la question.
