Projet de loi de finances de la Sécurité sociale : ce que prévoit la droite au Sénat

Le Sénat a une semaine pour trancher sur la Sécurité Sociale. La deuxième chambre va se pencher à partir d’aujourd’hui sur le projet de loi de finances de la Sécurité Sociale (PLFSS) pour l’année 2022. Chiffré à plus de 500 milliards d’euros, il prévoit un déficit de 21,6 milliards d’euros sur l’année.
La question du retour à l'équilibre après la crise
Ce chiffre est le principal grief contre le texte de la majorité au Sénat, une majorité marquée à droite. Selon la trajectoire pluriannuelle prévue par l’exécutif et confortée par la première lecture du texte à l’Assemblée, la dette du régime dépasserait, en 2025, de 51 milliards celle déjà épongée par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades) d’ici à 2033. Ce rachat, lié en grande partie aux dépenses exceptionnelles liées au covid-19, était intervenu dans le PLFSS de l’année dernière.
"Qu’il y ait eu la crise, on le conçoit ; mais il faut définir une trajectoire de retour à l’équilibre", exhorte le député LR Jean-Pierre Door.
Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des Affaires sociales au Sénat, estime elle que le plan de l’exécutif et de sa majorité "présente de manière fataliste un plateau de déficit d'une quinzaine de milliards d'euros à l'horizon 2025".
"Il n’y a dans ce projet de budget du gouvernement pas l’ombre d’une stratégie de retour à l’équilibre. On est en train de passer d’une crise sanitaire à une crise structurelle avec la perspective d’un déficit éternel rendant impossible l’extinction de la dette sociale" Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des Affaires sociales au Sénat
Etatisation et mutuelles
La droite au Sénat a pointé plusieurs éléments d’importance pour amender le texte. Elle souhaite d'abord faire porter par le budget général de l'Etat le financement du plan d'investissement pour l'hôpital, ainsi que le budget de Santé publique France.
En outre, elle veut augmenter la contribution des mutuelles, qui pourraient s’acquitter d’un chèque supplémentaire de 500 millions d’euros, suivant un amendement déposé sur l’article 4 du texte. Pour compenser leurs économies réalisées pendant la pandémie, elles devront déjà débourser 500 millions, après un premier chèque d’1 milliard versé en 2020. Cette taxe exceptionnelle décidée par le ministre de la Santé Olivier Véran et le ministre des Comptes Publics Olivier Dussopt, devait renflouer les caisses de la branche maladie.
Redresser les dépenses de retraite
Autre chantier, symbolique à quelques mois de la présidentielle: les retraites. René-Paul Savary, sénateur LR de la Marne, a demandé par amendement la convocation d’une conférence sur leur financement. Un tel amendement avait déjà été adopté l’année passée au Sénat, sans l’emporter à l’Assemblée.
En cas d’échec de cette conférence, la droite veut des mesures paramétriques: un âge de départ repoussé à 64 ans pour la génération née après 1966, calqué sur l’âge-pivot pensé par le gouvernement, et une convergence des régimes spéciaux avant 2032. Elle veut aussi une accélération sur la réforme Touraine, qui augmente progressivement le nombre de trimestres nécessaires à un départ à taux plein.
Selon les données de l’actuel projet de loi, le déficit de la branche vieillesse de la Sécurité sociale atteindrait 6,4 milliards d’euros cette année, puis 5,2 milliards en 2022, grâce à la croissance. Il replongerait sous les 10 milliards en 2025.
Plus d’efforts pour l’autonomie
La branche autonomie, la cinquième du régime - créée en 2020, doit obtenir un appui de 400 millions d'euros pour améliorer l'indépendance des personnes âgées. La majorité au Sénat, dans la lignée des critiques adressées au texte par les députés LR, juge le geste trop modeste, rappelant que le rapport Libault sur le grand âge, en 2019, pointait des besoins de 8 milliards d'euros.
Catherine Deroche, présidente LR de la commission des affaires sociales, juge ainsi qu'il y a "des mesures qui sont les bienvenues, même si ça semble insuffisant", quand Élisabeth Doineau déplore une "prise de conscience des besoins énormes dans ce secteur".
Les sénateurs veulent une concertation pour revaloriser les salaires des travailleurs du secteur social et médico-social, dont certains ont été oubliés des augmentations de salaire prévues par le Ségur de la santé.
Indépendamment des avancées sur ce point, une saisine du Conseil Constitutionnel est d'ores et déjà à l'ordre du jour: Catherine Deroche a relevé que nombre de mesures inscrites dans le texte "ne relèvent pas du PLFSS".