ÉDITO. Pas de "quoi qu’il en coûte" pour le réarmement de la France

Ceux qui espéraient rouvrir en grands les vannes de la dépense avec la guerre en Ukraine en seront pour leur frais: il n’y aura pas de "quoi qu’il en coûte" pour les dépenses militaires.
Le ministre de l'Économie Éric Lombard a indiqué mardi à ses homologues que la clause de sauvegarde annoncée la semaine dernière par la présidente de la Commission européenne pour sortir les dépenses nouvelles d’armement du calcul du déficit, ne sera pas demandée par la France.
"Nous n’avons pas de marge de manœuvre budgétaires. Nous ne souhaitons pas participer à un exercice qui augmenterait notre quote-part dans la dette européenne", a dit le ministre après l’Ecofin.
À 6% du PIB, le déficit français est deux fois supérieur au déficit moyen des États membres de la zone euro. La priorité pour Bercy, c’est de revenir à 3% d’ici 2029.
Et l'on arrive donc à cette situation extraordinaire: une Allemagne qui pousse à un assouplissement du cadre budgétaire européen et une France qui freine des quatre fers et pose ses conditions. C’est le monde à l’envers.
Mais pourquoi la France, qui a tant plaidé pour sortir ses dépenses de défense des critères de Maastricht, n’en profite pas maintenant qu’on y arrive? Parce qu'avec 6% de déficit, on est totalement en dehors des clous. À 3 % de déficit, vous pouvez accélérer un peu sur la défense. La clause permettra de d'éviter l'ouverture d'une procédure pour déficit excessif. A 6%, vous devez d'abord et avant tout réduire vos dépenses. Quoi qu’il en coûte.
Comment va fonctionner ce système de clause de sauvegarde?
Les États membres n’ont pas encore tous les détails techniques de la proposition de la Commission. On sait simplement qu'il ne s'agira pas d'une clause générale accordée à tout le monde, comme en 2020 pour le Covid. Pour l'activer, les États devront en faire la demande auprès de Bruxelles.
On sait également que cette clause ne concernera que les dépenses nouvelles d’armement.
Reste à définir les dépenses éligibles -faut-il par exemple inclure la construction d'infrastructures militaires?- et le point de départ des investissements militaires. Est-ce qu’on part de l’invasion en Ukraine en février 2022? D'un an aupravant, comme le propose la Pologne? Ou de 2025?
Les détails techniques seront communiqués le 19 mars par la Commission et les ministres en discuteront en Ecofin début avril, à Varsovie.