Le tweet de la ministre des Sports sur Coca-Cola doit-il être considéré comme une publicité déguisée?

La polémique enfle sur Twitter, désormais appelé X. Sur le réseau, la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra a publié le 25 septembre un tweet aux faux airs de communiqué de presse.
La ministre y vante l'engagement du groupe américain Coca-Cola, "partenaire mondial du CIO depuis près de 100 ans" dans l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024.
Soulignant le "modèle vertueux de distribution des boissons pendant les Jeux" pour "réduire au strict minimum l’usage du plastique à usage unique", elle remercie le groupe américain pour "son soutien, moins connu mais très engagé, dans l’inclusion par le sport."
Un texte accompagné de deux photos où l'on peut voir la ministre accompagnée de Mickael Vinet, président de Coca-Cola France et Claire Revenu la directrice générale des Jeux olympiques et paralympiques chez Coca-Cola.
Une application de la loi influenceurs?
Quelques mois après l'adoption d'une loi sur les influenceurs, pour obliger ces derniers à indiquer les partenariats commerciaux de leurs publications, ce tweet a entraîné une avalanche de critiques. Beaucoup d'internautes y voient un "placement de produit" ou la promotion "du pire pollueur de plastique au monde".
Alors faut-il voir une publication "sponsorisée", au sein de la dernière loi influenceurs, qui ne définit d'ailleurs pas les personnes concernées? "S’il est démontré que la Ministre a reçu un cadeau ou de l’argent de la part de Coca-Cola, elle aurait dû indiquer la mention 'Publicité' ou 'Collaboration commerciale'" rappelle sur Twitter l'avocat Raphaël Molina, spécialisé dans les influenceurs.
"Par définition, un député ou un ministre ne peut pas être rémunéré pour prêter son image à une collaboration commerciale" renchérit de son côté le député Renaissance Stéphane Vojetta, rapporteur de la loi sur les influenceurs. "Les conséquences auxquelles s’exposeraient les contrevenants seraient plus embêtantes qu’une simple infraction à la loi influenceurs."
Comme le rappelle le site vie-publique.fr, "les membres du gouvernement doivent exercer leurs fonctions avec dignité, probité et intégrité et veiller à prévenir ou à faire cesser immédiatement tout conflit d’intérêts." Le conflit d'intérêt se définit comme une "situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction".
Une quelconque rémunération de la ministre serait totalement incompatible avec ses fonctions. Contacté par Tech&Co, le cabinet de la ministre dément totalement.
"Dans le cadre de l'organisation des Jeux de Paris 2024, la ministre des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques reçoit depuis sa prise de fonction les responsables des partenaires des Jeux pour un entretien de travail, qu'ils soient issus des partenariats mondiaux du CIO ou des partenariats nationaux du COJOP" explique le ministère.
"La ministre a ainsi déjà eu l'occasion de s'entretenir avec SNCF, RATP, Loxam, Atos, Toyota, EDF, Accor, Sodexo, Danone, Orange, VISA, ADP... et fait usuellement un post pour rendre compte de ces échanges" poursuit le ministère assurant que "ces rendez-vous de travail n'occasionnent bien évidemment aucune contrepartie de quelque nature que ce soit."
"Aucune obligation de la part du ministère"
Reste la question de la communication gouvernementale, qui peut parfois flirter avec une forme de publicité. C'est en réalité souvent le cas lors d'un déplacement d'un ministre dans une entreprise.
Mais dans ce cas précis, faire la promotion d'un des plus gros partenaires des Jeux Olympiques fait-il partie du cahier des charges pour une ministre des Sports? Là encore le cabinet dément fermement. "Cela ne relève d'aucune obligation de la part du ministère" affirme le ministère.
"Ces entretiens permettent à la ministre de s'assurer que les partenaires des Jeux sont pleinement mobilisés pour leur réussite à tous les niveaux: contribution à la livraison sur les champs qui les concernent, respect des engagements du projet, notamment en matière sociale et environnementale, soutien au mouvement sportif et à la construction de l'héritage des Jeux" explique le cabinet d'Amélie Oudéa-Castéra.
Reste que cette publication renvoie à d'autres questionnements et notamment la pollution plastique. Comme le rappelle Libération, Coca-Cola est considéré comme le plus gros pollueur plastique au monde, selon l'ONG Break Free From Plastic (le tweet a d'ailleurs été publié le même jour que les annonces sur le climat d'Emmanuel Macron). Mais cela ne concerne pas la loi.