"Une supercherie artistique": le groupe Velvet Sundown qui explose sur Spotify a-t-il été généré grâce à l'IA?

Le moins que l'on puisse dire, c'est que le groupe est prolifique. En moins d'un mois, les Velvet Sundown ont produit deux albums complets. Un troisième est déjà en préparation.
Et ça cartonne. Le groupe aux influences indie rock compte plus de 858.000 abonnés sur sa page Spotify. Certains de leurs morceaux cumulent près de 800.000 écoutes. Une productivité hors-norme et un succès fulgurant, qui interroge.
"C'est du marketing. C'est du trolling"
En effet, les quatre membres du groupe sont de parfaits inconnus. Comme le rappelle la BBC, aucun des quatre musiciens n'a donné d'interviews ou ne semble avoir de profils sur les réseaux sociaux. Seules quelques images, qui pourraient avoir été générées par IA, illustrent leur présence sur les réseaux. Et, malgré leurs recherches, les utilisateurs n'ont trouvé aucune vidéo du groupe en live.
Les paroles très génériques, comme "les yeux comme un film dans une lumière tamisée, les rêves marchent pieds nus dans la nuit" et "cendres et velours, fumée et flammes, appelant au nom de la liberté", paraissent également trop génériques pour les internautes. Il n'en faut pas moins pour lancer la rumeur: le groupe, leurs photos promotionnelles et leurs musiques ont été générées par IA. "Ce groupe est complètement fake", assure-t-on sur Reddit.
Un fait rapidement démenti par les membres du groupe sur X... avant qu'un soi-disant "porte-parole" de la bande ne reconnaisse les faits. Un certain Andrew Frelon a ainsi avoué, dans les colonnes de Rolling Stone, avoir utilisé la plateforme Suno pour créer de la musique.
"C'est une supercherie artistique", avance le porte-parole. "C’est du marketing. C’est du trolling. Avant, personne ne se souciait de ce qu’on faisait et là, soudainement, on parle à Rolling Stone, donc est-ce que c’est mal?"
Un contexte de défiance
Selon lui, Suno aurait été utilisée pour générer des idées pour le projet. Seules quelques chansons auraient été générées grâce à l'outil. En revanche, il l'assure, le nombre d'écoutes sur Spotify n'aurait pas été trafiqué.
Mais coup de théâtre. Ce fameux Andrew Frelon n'appartient pas au groupe. Il s'agit d'un canular. Une déclaration sur la page Spotify du groupe indique qu'il n'a "aucune affiliation avec cet individu, ni aucune preuve confirmant son identité ou son existence".
De son côté, Deezer a déclaré que son outil de détection d'IA avait signalé la musique comme étant "générée à 100 % par l'IA". Spotify n'a pas répondu à une demande de commentaire de la BBC.
Ce nouveau mystère s’inscrit dans un contexte plus large d’utilisation croissante de l’IA dans la musique. Selon Deezer, 18% des musiques qui intègrent la plateforme quotidiennement sont générées par l'IA. "C’est exactement ce qui inquiète les artistes: c'est du vol déguisé", observe auprès de la BBC Ed Newton Rex, fondateur de Fairly Trained, qui milite pour que les entreprises d'IA respectent les droits des créateurs.
"Les entreprises d’IA volent le travail des artistes pour créer leurs produits, puis inondent le marché de contrefaçons, ce qui signifie que moins d’argent va aux musiciens humains", poursuit-il.
Si certains artistes n'hésitent pas à s'en servir, d'autres s'inquiètent des répercussions sur leurs emplois et qualifient la pratique de vol. En juin dernier, plusieurs figures de la pop britannique comme Coldplay, Paul McCartney ou Elton John se sont mobilisées contre un projet de loi facilitant l'utilisation de contenu à des fins commerciales pour les entreprises d'intelligence artificielle. En France, en février dernier, près de 35.000 artistes ont signé une tribune pour appeler à protéger les droits d’auteur.