Xbox One vs PS4: Microsoft reconnait avoir raté la bataille qu’il fallait gagner

"Je veux gagner cette génération". Nous étions en 2014 et Phil Spencer, alors patron de la division Xbox, s’avançait confiant avec sa Xbox One, après le finish en fanfare de la Xbox 360 face à la PS3. Neuf ans plus tard, le même homme n'a plus la même assurance et reconnaît une défaite sans débat, la PlayStation 4 s'étant vendue deux fois mieux que la Xbox One (plus de 118 millions pour le premier et moins de 60 millions pour le second).
Dans un entretien accordé à l’émission YouTube Kinda Funny Games, Phil Spencer a admis que son entreprise avait perdu "la pire génération à perdre avec la génération Xbox One". "C’est la génération où tout le monde a construit sa bibliothèque numérique de jeux", explique-t-il, positionnant Xbox à la troisième place du marché. "90% des joueurs qui se rendent en magasin pour acheter une console sont déjà membres de l’un des trois écosystèmes (Xbox, PlayStation ou Nintendo, NDLR). Leur bibliothèque numérique est là".
Pas un monde où Starfield ferait abandonner la PS5
Si la console Xbox avait révolutionné le jeu en étant la toute première en 2001 à compter une connexion internet, pour jouer en ligne et accéder alors au Xbox Live pour télécharger des contenus, la branche gaming de Microsoft a ensuite été rejointe par son concurrent Sony et même dépassée dans l’achat de jeux dématérialisés. Et c’est cette avance sur laquelle Xbox n’a pas su capitaliser par la suite, notamment avec la Xbox One qui portait son obligation de connexion permanente comme un boulet depuis le premier jour.
Phil Spencer note ainsi que les joueurs transfèrent désormais leur bibliothèque numérique d’une console à une autre et ne sont plus contraints de racheter de nouveaux jeux pour leur nouvelle console, comme ce fut notamment le cas sur la génération précédente. Microsoft avait fini par tenter un coup de poker en déployant la fonction de rétrocompatibilité des jeux Xbox 360 sur Xbox One (il suffisait de mettre le disque pour que le titre soit reconnu et jouable, ou bien d’associer son compte Xbox Live pour que la rétrocompatibilité des bibliothèques Xbox 360 sur Xbox One se fasse).
Avant de lancer son service PlayStation Plus nouvelle formule et d’accepter que les jeux PS4 tournent sur PS5, Sony refusait toute rétrocompatibilité. Seul feu le service PS Now permettait de profiter d’anciens jeux PS2 ou PS3, parfois en streaming. Une stratégie qui a notamment poussé les joueurs à passer au dématérialisé.
Pour contrer cela, Xbox a lancé son Xbox Game Pass pour offrir une bibliothèque de jeux "prêt-à-l’emploi" qui suive aussi bien d’une console, digitale ou non, à l’autre, mais aussi en cloud sur smartphone et sur tous les autres supports possibles où le service est disponible.
"Nous avons une vision unique sur le marché et nous ne concentrons plus exclusivement sur les consoles, mais nous construisons un écosystème qui prend en charge les jeux sur tous les appareils", souligne Phil Spencer. "Aujourd’hui, il n’y a pas de monde où Starfield hérite d’un 11/10 et où les joueurs vont commencer à vendre leur PS5. Cela n’arrivera pas", reconnaît le boss des jeux qui ajoute que "créer de grands jeux" ne suffirait pas pour que la situation s’inverse d’un coup de baguette magique. Un coup de baguette magique qui n’aura pas les traits de Redfall, la première véritable exclusivité née du rachat du groupe ZeniMax-Bethesda et qui a pris la forme d’un flop mal vécu même par l’intéressé.
En attendant la réponse de l'Europe
Mais Phil Spencer n’en perd pas pour autant son mordant, pris dans un bras de fer à distance avec Sony qui veut l’empêcher de racheter Activision Blizzard: "Lorsque vous êtes en troisième position sur le marché des consoles, que les deux premiers acteurs sont aussi forts, et qu’ils se concentrent dans certains cas très discrètement sur la conclusion d’accords et d’autres choses, il faut avouer que les temps sont difficiles pour nous. Et c’est notre faute, pas celle de quelqu’un d’autre."
Pas de quoi abattre le responsable du jeu vidéo chez Microsoft qui promet une conférence du 11 juin haute en couleur, avec de nombreuses annonces et l’arrivée d’exclusivités autres que le très attendu Starfield. "Il n’y a pas de victoire pour Xbox en restant dans le sillage de quelqu’un d’autre. Nous devons repartir de l’avant et faire de notre propre manière, comme avec le Game Pass, le cloud gaming ou notre façon de faire des jeux", martèle-t-il en voulant néanmoins se montrer confiant pour l’avenir.
Mais pour que ce dernier soit radieux et redonne le sourire à Phil Spencer, il faudra indubitablement des jeux, et des bons. Et éventuellement un rayon de soleil venu de l’Union européenne qui doit statuer sur l’affaire Activision Blizzard pour, peut-être, donner son aval. Et ça mettrait du baume au coeur vert qui commence à faner un petit peu en ce printemps. A moins que tout cela ne soit qu'une stratégie pour apitoyer l'Europe et les Etats-Unis sur l'éternel statut de challenger du marché que veut endosser Xbox...