Attentats: les nouveaux risques que présentent les Ray-Ban connectées de Meta

Il passait pour un touriste parmi tant d'autres, se baladant tranquillement dans le quartier français de la Nouvelle-Orléans. Sur son nez, une paire de lunettes qui, là encore, semblait n'avoir rien d'extraordinaire.
Et pourtant, cet homme se trouve être le principal suspect de l'attaque à la voiture-bélier qui a fait 14 morts à La Nouvelle-Orléans, aux États-Unis, le 1er janvier dernier.
En effet, selon une conférence de presse du FBI, le dimanche 5 janvier dernier, le suspect Shamsud-Din Jabbar, citoyen américain de 42 ans, s'est rendu à deux reprises sur place, dans le quartier français de la ville de Louisiane, pour préparer l’attaque. L'homme aurait notamment utilisé des lunettes Ray-Ban de Meta pour faciliter ses repérages des lieux.
Se fondre dans la masse
En effet, l'appareil permet notamment à son propriétaire de filmer et d'enregistrer en continu tout ce qu'il voit et ce qu'il entend. Autre avantage, les lunettes connectées peuvent diffuser en direct les images sur les réseaux sociaux.
Un accessoire qui soulève donc de nombreuses problématiques, notamment concernant les attentats. En effet, l'accessoire est très discret. S'il est assez facile de remarquer si quelqu'un filme dans la rue avec son smartphone, il est quasiment impossible de repérer si les lunettes connectées sont en train de filmer ou non. Seule une petite diode lumineuse s'allume lorsqu'un enregistrement est en cours. De quoi mettre des bâtons dans les roues aux forces de l'ordre si l'outil est utilisé par des criminels.
"Tout ce qu'il fait avec les lunettes, vous pourriez le faire avec un téléphone portable, mais cela vous donne une couverture", souligne Brad Garrett, profileur du FBI à la retraite, auprès d'ABC News.
"Il porte des lunettes de soleil, il n'a pas d'appareil photo dans les mains. Qui se rappellerait l'avoir vu, surtout dans le quartier français?", insiste-t-il. "C'est une façon de se fondre dans la masse."
Faciliter la diffusion en direct
Shamsud-Din Jabbar portait les Ray-Ban de Meta sur lui le jour de la tuerie de la Nouvelle -Orléans. S'il ne les a pas activé ce jour-là, il aurait très bien pu diffuser en live sa tuerie sur les plateformes. Le tout, en toute discrétion et en ayant les mains libres.
En effet, les Ray-Ban de Meta facilitent la diffusion en direct. C'est d'ailleurs une des principales fonctionnalités mise avant par le géant de la tech pour commercialiser ses lunettes. Une caractéristique qui peut donc être facilement détournée par des individus malveillants qui souhaiteraient diffuser leurs crimes au grand public.
Des crimes ont d'ailleurs déjà été retransmis en direct sur les plateformes. En 2022, un attentat perpétué à Buffalo (Etat de New York) avait été retransmis en direct sur Twitch. Le criminel avait accroché une petite caméra sur son casque pour filmer et diffuser la tuerie.
En mars 2019, un attentat terroriste contre deux mosquées en Nouvelle-Zélande avait également été filmé et diffusé en direct sur Facebook. La vidéo très violente avait alors été diffusée dans un message public, potentiellement accessible à tous les internautes disposant du lien. L'individu s'était servi d'une caméra GoPro, placée au niveau du visage du tireur, et du logiciel Live4 pour diffuser les images.
Une modération difficile
La nature même du format de diffusion de ces images, soit une vidéo en direct, complique toute modération efficace et rapide de la part des plateformes. Pour preuve, le direct de la tuerie en Nouvelle-Zélande est resté en ligne pendant 17 minutes avant d'être finalement supprimé par Facebook. De nombreux extraits avaient par la suite circulé sur les réseaux sociaux.
De son côté, Meta n'a pas souhaité répondre à la demande de commentaires d'ABC News. En 2021, dans son Meta Human Rights Report, l'entreprise a dressé la liste des risques liés à l'utilisation des lunettes connectées par un individu malveillant. Parmi ces derniers, l'absence de "consentement éclairé des témoins".
"Pour atténuer ces problèmes, l'exercice de diligence raisonnable a recommandé d'explorer plusieurs pistes d'action comme l'élaboration d'une politique d'utilisation acceptable, une fonction 'ne pas déranger' et d'autres signaux pour les observateurs."
Pour rappel, en France, la Cnil insiste sur le fait qu'il est interdit de filmer des inconnus dans la rue grâce à des lunettes connectées, si le but est de diffuser les images en ligne.