Comment les HLM tentent d'inciter les locataires à limiter leur consommation d'énergie

Début novembre, l'Ile-de-France subit son premier jour de froid de l'automne. Dans l'entrée d'une résidence HLM de Villiers-le-Bel (Val-d'Oise), Elmadani Abaskar donne des astuces aux locataires pour faire des économies d'énergie et éviter une facture insurmontable. "Vous savez que maintenant, l'électricité ça coûte cher !", lance-t-il à la quinzaine de résidents venus l'écouter à la demande de leur bailleur, la filiale de la Caisse des dépôts CDC Habitat.
"Qu'est-ce qui consomme le plus ?", demande-t-il. "Le chauffage ?", tente un homme. "Exactement ! Deux tiers de la facture", détaille l'animateur de l'atelier, représentant de l'association d'éducation à l'environnement Inven'terre, basée à Sarcelles, une commune voisine.
Les résidents, pour la plupart des personnes âgées relogées dans cette résidence de 102 appartements à l'occasion d'une opération de rénovation urbaine du quartier prioritaire Derrière-les-Murs, partagent leurs inquiétudes sur le chauffage. Bénéficiant du chauffage collectif dans leurs anciennes tours désormais démolies, ils doivent désormais apprendre à gérer eux-mêmes les radiateurs électriques individuels de la résidence.
Argumentation sur la facture
L'humidité, l'usage du four ou de l'eau chaude... du tac au tac, Elmadani Abaskar répond à leurs inquiétudes, désamorce les idées reçues. Mais, c'est surtout son argumentation sur la facture qui fait mouche. Sans faire attention, le fournisseur d'énergie "va vous demander une régularisation de 2, 3.000 euros !" "Aaah!", réagit une dame dans l'assistance. Car dans un contexte de flambée des prix de l'énergie, que le bouclier tarifaire du gouvernement n'a absorbée qu'en partie, c'est souvent une facture de régularisation douloureuse qui a poussé les locataires à se préoccuper davantage de leur consommation d'énergie.
C'est le cas de Dede Mwamba, 46 ans, qui vit dans la résidence avec ses deux enfants depuis novembre 2020. L'hiver dernier, elle raconte avoir dû payer 700 euros de régularisation et s'être ensuite décidée à installer sur son téléphone l'application d'EDF pour suivre sa consommation. Pour limiter celle-ci, elle s'est déjà mise à cuisiner en gros pour la semaine, plutôt que tous les jours comme avant. Et après l'atelier, elle est convaincue de débrancher ses appareils en veille quand ils sont inutilisés. "C'est très important. Surtout en ce moment !", lâche-t-elle. "Il faut qu'on se mette dans la tête de réduire ci, réduire ça...", dit aussi Claudette Buffet, 72 ans, arrivée en novembre 2020 dans la résidence. "On n'a pas des grosses retraites, je n'ai pas envie d'avoir une facture élevée !", dit-elle.
Distribution d'un kit
L'atelier se termine avec la distribution d'un kit composé, entre autres, d'un thermomètre indiquant les niveaux idéaux de température: 19 degrés dans le salon, 16 à 18 dans une chambre d'adulte, 20 à 22 dans une chambre d'enfant, et trop chaud au-delà. Les kits restants seront distribués aux locataires qui ne sont pas venus les chercher, lors de visites à domicile qui permettront de suggérer des éco-gestes adaptés à chaque ménage.
L'objectif pour le bailleur est aussi de limiter les impayés de ses locataires, 35% des occupants du parc HLM vivant sous le seuil de pauvreté. CDC Habitat, qui gère quelque 350.000 logements sociaux dans toute la France, a d'ores et déjà prévu un fonds de solidarité de 1,15 million d'euros pour accompagner les locataires les plus en difficulté. "On sait que nos locataires sont fragiles économiquement, et l'idée, c'est de limiter l'impact des hausses de prix pour eux", justifie Lydia Bendifallah, cheffe de projet Développement social urbain chez CDC Habitat. "Si on n'est pas sur le terrain, la réponse ne sera pas forcément adaptée", ajoute-t-elle. "Il y en a encore qui sont réticents", confie Elmadani Abaskar. Une fois les ateliers terminés, "la difficulté, c'est que derrière, le conseil puisse être appliqué".