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Parler d'argent en famille: êtes-vous prêt pour les prochaines fêtes de fin d'année?

Image d'illustration - Repas de noël

Image d'illustration - Repas de noël - Pixabay

[AVIS D'EXPERT] La banque de gestion de fortune Merrill a publié un guide pour discuter d'argent en famille tout en évitant les conflits. Décryptage avec notre expert Guillaume Almeras, fondateur du site de veille et de conseils Score Advisor.

Selon une récente étude de Merrill (Bank of America), les discussions familiales portant sur l’argent et, plus précisément, sur la gestion et le partage du patrimoine, peuvent "conduire à des regrets". De sorte que ces sujets, en famille, sont souvent tabous.

Fallait-il vraiment une étude pour s’en rendre compte? Merrill ne s’en tient pas à ce constat. Le Merrill Center of Family Wealth vient en effet de publier un guide pour des conversations familiales "productives" autour de l’argent.

Précisons-le d’emblée, diligentée par une banque de gestion de fortune comme Merrill, l’étude porte sur des familles riches et même super-riches (un patrimoine de plus de 50 millions de dollars). De plus, nombre d’aspects de l’étude ne se comprennent bien que par rapport aux règles d’héritage américaines, nettement différentes de celles qui s’appliquent en France. Toutefois, on nous accordera facilement sans doute que, quel que soit le niveau de richesse, les discussions d’argent en famille finissent mal en général – sachant qu’elles ont de plus en plus souvent lieu (+31%) depuis la pandémie.

La plupart du temps, ces conversations surviennent spontanément (78% des cas), donc sans préparation et, dans un contexte où les rôles sont rarement clarifiés quant à savoir qui pourrait ou devrait faire quoi, elles aboutissent rapidement à des blocages.

Inaction et paralysie

Pourtant, souligne l’étude, les familles devraient apprendre à gérer ensemble leur patrimoine, ce qui commence par des conversations réfléchies. Car les tabous qui pèsent sur ces questions sont sources d’inaction et de paralysie qui peuvent être très préjudiciables aux familles - mais aussi aux banques, ne manquera-t-on sans doute pas d’ajouter, qui manquent ainsi de placer leurs offres de gestion et de placement. Certes mais l’attitude de Merrill, en l’occurrence, ne se limite pas à cela.

Lever les tabous concernant l’argent est une tendance très actuelle. La prise en main décomplexée et lucide de ses finances fait l’objet d’innombrables conseils sur les réseaux sociaux (plus ou moins farfelus, voire dangereux, d’ailleurs), particulièrement à l’adresse des femmes et des jeunes générations. Certains ont même rapproché cette tendance de la libération sexuelle des années 1960.

L’étude de Merrill – justement intitulée "Tirer le rideau" - s’efforce ainsi de fournir un guide pratique en faveur d’une approche familiale décomplexée des problématiques patrimoniales.

Beaucoup de motifs s’opposent à ce que les chiffres relatifs à la fortune soient produits en famille. Dans les familles riches, on redoute notamment que, se découvrant trop gâtés, les enfants perdent toute ambition. Mieux vaut en effet parler d’abord des objectifs et des valeurs qui sont associés à un patrimoine, avant d’en venir aux chiffres, juge Merrill ; qui plaide pour une approche graduée à travers une série de conversations.

Une approche qui ne se limite pas au patrimoine

Nous vous laisserons découvrir les autres conseils donnés par l’étude pour souligner surtout ici la nouveauté d’une telle approche: une banque propose de s’immiscer dans les conversations familiales pour les faciliter et les rendre plus fructueuses. Ainsi, pour mieux identifier les valeurs qui peuvent être attachées à un patrimoine et en discuter, un "Value Cards Facilitation Guide" est présenté.

A vrai dire, un tel rôle n’est pas nouveau dans le domaine de la gestion de fortune, notamment dans les Family Offices. Mais, en le standardisant sous la forme de différents outils, Merrill semble préparer son extension à une beaucoup plus large échelle. On imagine en effet très bien de tels outils être introduits dans l’appli de gestion de finances personnelles Life Plan, déjà orientée sur la définition d’objectifs de vie, que Bank of America, l’une des quatre premières banques de détail américaine, propose à tous ses clients.

C’est que ces questions ne concernent pas que les riches! Tandis qu’une telle approche ne se limite ni aux affaires patrimoniales, ni aux banques de gestion de fortune. A travers son appli, la néo-banque anglaise Starling, propose désormais aux couples de désamorcer leurs disputes concernant les tâches ménagères.

Par Guillaume Almeras, fondateur du site de veille et de conseils Score Advisor