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Nucléaire: après l'échec des négociations, les sanctions de l'ONU contre l'Iran de retour après 10 ans

Le drapeau de l'Iran (illustration)

Le drapeau de l'Iran (illustration) - JOE KLAMAR / AFP

Après l'échec des négociations sur son programme nucléaire avec les Occidentaux, les sanctions de l'ONU contre l'Iran ont été rétablies dans la soirée du samedi 27 septembre.

Les sanctions de l'ONU contre l'Iran ont été rétablies samedi soir après l'échec de négociations sur son programme nucléaire avec les Occidentaux, qui ont toutefois immédiatement appelé à reprendre le chemin de la diplomatie.

Après le feu vert du Conseil de sécurité de l'ONU, de lourdes sanctions, allant d'un embargo sur les armes à des mesures économiques, sont à nouveau en vigueur depuis samedi 20H00 heure de New York (dimanche 00H00 GMT), dix ans après leur levée.

"S'abstenir de toute action escalatoire".

Mais Européens et Américains ont immédiatement assuré que cela ne marquait pas la fin de la diplomatie. Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a appelé Téhéran à "accepter des discussions directes, en toute bonne foi", tout en demandant à tous les Etats d'appliquer "immédiatement" les sanctions pour faire "pression" sur l'Iran.

Les ministres Affaires étrangères britannique, français et allemand ont eux assuré dans un communiqué commun qu'ils continueraient à chercher "une nouvelle solution diplomatique garantissant que l'Iran ne se dote jamais de l'arme nucléaire".

En attendant, ils ont appelé Téhéran "à s'abstenir de toute action escalatoire". Selon l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), l'Iran est le seul pays non doté de l'arme nucléaire à enrichir l'uranium à un niveau élevé (60%), proche du seuil technique de 90% nécessaire à la fabrication de la bombe atomique.

Téhéran se défend d'avoir de telles ambitions sur le plan militaire mais insiste sur son droit au nucléaire à des fins civiles, notamment pour produire de l'électricité. L'accord sur le nucléaire (JCPOA) conclu en 2015 entre l'Iran et les grandes puissances plafonnait ce taux à 3,67%.

D'après l'AIEA, l'Iran dispose d'environ 440 kilos d'uranium enrichi à 60%, un stock qui, s'il était enrichi jusqu'au niveau de 90%, permettrait au pays de se doter de huit à dix bombes nucléaires, selon des experts européens.

Le président iranien Massoud Pezeshkian a affirmé samedi que les Etats-Unis avaient exigé de l'Iran de lui remettre "tout" son uranium enrichi en échange d'une prolongation pour trois mois d'une suspension des sanctions, qualifiant cette requête d'"inacceptable".

"Ils veulent que nous leur cédions tout notre uranium enrichi", a déclaré à la télévision d'Etat M. Pezeshkian. "Dans quelques mois, ils auront une nouvelle exigence", a ajouté le président iranien.

Crainte d'une nouvelle guerre

Le Royaume-Uni, la France et l'Allemagne, groupe de pays appelés E3, ont déclenché fin août le mécanisme du "snapback" qui permettait dans un délai de 30 jours de rétablir les sanctions levées en 2015 après l'accord sur le nucléaire iranien.

Avant même le rétablissement formel des sanctions, l'Iran a rappelé samedi "pour consultations" ses ambassadeurs dans les trois pays, selon la télévision d'Etat. "La situation (économique) actuelle était déjà très difficile mais elle va empirer", redoute Dariush, qui préfère taire son patronyme.

"L'impact du retour des sanctions est déjà évident: le taux de change (du dollar face à la monnaie nationale, le rial) augmente, et cela entraîne une hausse des prix" des biens de consommation, déclare à l'AFP cet ingénieur de 50 ans.

Samedi, un dollar s'échangeait au marché noir contre environ 1,12 million de rials, un niveau record, selon plusieurs sites de suivi des changes. Un journaliste de l'AFP a constaté une affluence inhabituelle au Grand bazar de Téhéran dans les bijouteries pour acheter de l'or, valeur refuge.

"La plupart des gens craignent une nouvelle guerre à cause du snapback", ajoute Dariush, en allusion aux frappes israéliennes et américaines en juin durant 12 jours contre l'Iran.

"Gestes concrets"

Des réunions au plus haut niveau se sont multipliées toute la semaine en marge de l'Assemblée générale de l'ONU à New York pour tenter de trouver une solution diplomatique.

Mais le trio européen a jugé que Téhéran n'avait pas de "gestes concrets" pour répondre à ses trois conditions: reprise des négociations avec les Etats-Unis; accès des inspecteurs de l'AIEA sur les sites nucléaires sensibles de Natanz, Fordo et Ispahan, bombardés en juin par Israël et les Etats-Unis; processus pour sécuriser le stock d'uranium enrichi.

La Russie et la Chine ont proposé, sans succès, vendredi au Conseil de sécurité de l'ONU de prolonger de six mois le JCPOA qui expire le 18 octobre, afin de donner plus de chances à la diplomatie.

Dans ce contexte, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a accusé samedi les Occidentaux de "saboter" la diplomatie, répétant que pour Moscou, le rétablissement des sanctions est "légalement invalide" et que la décision "ne peut pas être appliquée".

En 2015, France, Royaume-Uni, Allemagne, Etats-Unis, Russie et Chine avaient conclu avec Téhéran un accord, prévoyant un encadrement des activités nucléaires iraniennes en échange d'une levée des sanctions. Les Etats-Unis, sous le premier mandat du président Donald Trump, ont décidé en 2018 de s'en retirer et de rétablir leurs propres sanctions.

L'Iran s'est ensuite affranchi de certains engagements, notamment sur l'enrichissement d'uranium. "L'Iran n'a jamais cherché et ne cherchera jamais à fabriquer une bombe atomique", a affirmé cette semaine à l'ONU le président iranien.

S.A avec AFP