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Corruption, fraude comptable… En Inde, l'empire Adani dans la tourmente

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LE MONDE QUI BOUGE. Chute en Bourse, annulation de contrats… Après la mise en examen de son patron, l’empire indien Adani plonge dans la tourmente.

À la Bourse de Bombay, le cours de la holding Adani Entreprises, fleuron du groupe tentaculaire, a perdu 23,4% jeudi. Le titre d’Adani Energy Solutions a chuté lui de 20%. La filiale, qui est directement mise en cause par la justice américaine, a même dû annuler l’émission de 600 millions de dollars d'obligations.

Après plus d’un an et demi d’enquête du FBI, Gautam Adani, deuxième fortune d’Inde, a finalement été mis en examen. L’homme de 62 ans est soupçonné d'être impliqué dans le versement de 250 millions de dollars de pots-de-vin en échange de marchés dans l'énergie solaire en Inde. Il aurait caché "ce système de corruption alors qu'ils cherchaient à lever des fonds auprès d'investisseurs américains et internationaux". Accusations que son groupe dément formellement.

"Les allégations formulées par le ministère américain de la Justice et la Commission américaine des opérations de Bourse à l'encontre des directeurs d'Adani Green sont sans fondement et démenties."

Démenti qui n’a pas permis d’amortir de choc à l’international. Le Kenya, par la voix de son président William Ruto, a annoncé l'annulation de contrats pour la modernisation de l'aéroport international de Nairobi et du réseau électrique national. Valeur totale: 2,6 milliards de dollars.

"Manipulation éhontée"

Cette nouvelle affaire menace sérieusement le projet de relance du groupe sur les marchés internationaux. Ce n’est pas la première fois qu’Adani est mis en cause. En janvier 2023, le groupe d'investissement américain Hindenburg Research accusait le conglomérat indien de "manipulation éhontée des actions et de fraude comptable sur plusieurs décennies".

Selon ce même rapport, Vinod Adani, frère aîné de Gautam Adani, serait à la tête d’un "vaste réseau d'entités fictives offshore". Des révélations qui avait encore renforcé les préoccupation autour de l'endettement du groupe.

Caroline Loyer : Adani, un empire dans la tourmente - 22/11
Caroline Loyer : Adani, un empire dans la tourmente - 22/11
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Ces accusations avaient provoqué une liquidation massive des titres avec 150 milliards de dollars de perte. Gautam Adani avait vu sa fortune personnelle fondre de 80 milliards de dollars, perdant au passage le titre d'homme le plus riche d'Asie et de troisième homme le plus riche du monde.

En septembre dernier, alors que le groupe était parvenu à compenser une grande partie de ces dommages, Hindenburg Research l'avait une nouvelle fois mis en cause, cette fois pour blanchiment d'argent.

Mais la procédure annoncée par le procureur fédéral de Brooklyn porte un coup autrement plus sévère. Elle pourrait, selon les analystes, altérer sérieusement voire anéantir la confiance des investisseurs étrangers.

Donald Trump à la rescousse?

En Inde, l’affaire fait grand bruit même si l’opposition n’est pas franchement surprise. En effet, elle accuse Gautam Adani d’avoir bâti sa fortune en remportant des marchés de manière déloyale. L’homme est réputé proche du Premier ministre indien. L’opposition d’ailleurs, se montre fataliste.

"Nous demandons qu'Adani soit immédiatement arrêté. Mais nous savons que cela n'arrivera pas car Modi est en train de le protéger", a déclaré son chef de file face à la presse.

La presse indienne s’interroge: "Donald Trump peut-il sauver Gautam Adani?", titre le National Herald. Selon le journal, le magnat espérerait les faveurs du successeur de Joe Biden, qu’il avait d’ailleurs félicité pour son élection.

La semaine dernière, il s’engageait même à approfondir le partenariat entre l'Inde et les États-Unis en investissant 10 milliards pour créer jusqu'à 15.000 emplois sur le sol américain.

Sur les réseaux sociaux nombre d’indiens s’insurgent contre la protection des autorités dont bénéficierait Adani.

Alors, Gautam Adani sera-t-il extradé comme le demandent les États-Unis? Tous les spécialistes s’accordent à dire que c’est extrêmement peu probable, du moins tant que Narendra Modi est aux commandes du pays.

Caroline Loyer