Gouvernement Barnier: le ministre du Budget rattaché à Matignon, une première depuis 1976

Fini le tout-puissant Bercy. Le ministère de l'Economie est désormais scindé en deux. Avec d'un côté les portefeuilles de l'Economie, de l'Industrie et des Finances, pilotés par Antoine Armand. Et de l'autre, le Budget et les Comptes publics dont aura la charge Laurent Saint-Martin. Particularité: ce ministère est désormais rattaché à Matignon. Laurent Saint-Martin rapportera donc directement à Michel Barnier. Et non au ministre de l'Economie comme c'était le cas de son prédécesseur, Thomas Cazenave. A noter que ce rattachement au Premier ministre concerne aussi François-Noël Buffet, chargé des Outre-mer.
Un tel rattachement est quasi-inédit dans l'histoire de la Ve République. La seule situation comparable était le cumul en 1976 de Raymond Barre, à la fois Premier ministre et ministre de l'Economie et des Finances. Ce choix fort de Michel Barnier témoigne ainsi du caractère brûlant du dossier des finances publiques dont a la charge celui qui était il y a encore quelques jours directeur général de Business France.
"Le rattachement direct de Laurent Saint-Martin à Matignon est une manière de dire que la France veut prendre le taureau par les cornes", c'est "un signal destiné à nos partenaires européens, à la Commission européenne et peut-être aux marchés financiers, qu'ils aient en tête que c'est la priorité du gouvernement", a commenté l'économiste Christian de Boissieu, interrogé par l'AFP. "Mais le ministre du Budget devra travailler main dans la main avec le ministre de l'Economie. Sur le plan budgétaire et fiscal, on a besoin d'avoir une vision d'ensemble", a-t-il souligné.
Une passation de pouvoir collective
La passation à Bercy a malgré tout été collégiale. Organisée dimanche entre Bruno Le Maire, Thomas Cazenave, les deux nouveaux ministres nommés à Bercy, et les ministres rattachés au ministre de l'Economie, ce passage de relais a été l'occasion d'un premier bilan.
Tout juste nommé ministre des Comptes publics, Laurent Saint-Martin a d'abord rappelé que la dérive des comptes était le résultat de choix précédents: "Face aux crises, face à l'inflation, nous avons collectivement été au rendez-vous pour protéger nos entreprises, l'emploi, vos salaires, le pouvoir d'achat et pour maintenir nos services publics". Avant de prévenir: "Sous l'autorité directe du Premier ministre, je proposerai au Parlement dans les prochains jours des choix forts". Parmi lesquels, "financer les priorités du gouvernement, consolider ce qui marche dans notre pays et réduire les dépenses publiques tout en veillant à améliorer leur efficience".
"Je voudrais souhaiter bonne chance à Laurent Saint-Martin, mais aussi bon courage", a salué avec un peu d'ironie Thomas Cazenave, le ministre sortant.
Le bouclage du budget 2025: des hausses de recettes à trouver
En effet, le premier rendez-vous du jeune ministre a tout de l'équation impossible. Il est attendu sur le bouclage du budget 2025 et aura avec Michel Barnier la lourde tâche de proposer des pistes de redressement des comptes publics. Le Premier ministre a déjà prévenu qu'il pourrait mettre à contribution les plus riches et certaines grandes entreprises.
Avec un déficit attendu à 5,6% du PIB au lieu des 5,1% préalablement ciblés, les comptes continuent de dériver, loin de l'objectif de 3% fixé par l'Union européenne qui a d'ailleurs engagé une procédure pour déficit excessif contre la France.
La finalisation du projet de loi de finances est censée intervenir dans les prochains jours, pour une transmission au Conseil d' État avant examen par l'Assemblée nationale.