Vers une suppression des amendes pour les petits excès de vitesse?
Une proposition de loi, déposée lundi par le sénateur Les Républicains Alain Fouché, vise à ne plus sanctionner d'une amende les excès de vitesse inférieurs à 10 km/h, mais à réserver à cette infraction un simple retrait de points.
Le texte entend "faire une distinction entre les excès de vitesse compris entre 10 et 20 km/h, qui continueraient à constituer une contravention pénale et resteraient sanctionnés par une amende (...) et le retrait d'un point du permis de conduire, et les dépassements inférieurs à 10 km/h, pour lesquels l'unique sanction serait administrative", indique l'exposé des motifs.
Un conducteur en infraction se verrait ainsi simplement retirer un point sur le permis, précise la proposition de loi du sénateur de la Vienne, qui entend "introduire davantage d'équité" dans la répression des petits dépassements.
"Lutter contre ce racket"
Le texte note que "le contrôle automatisé est devenu une véritable source de recettes pour l'Etat", avec en 2014 des recettes de 672 millions d'euros pour les "seules amendes forfaitaires" liées aux radars automatiques. Tout en soulignant que le développement des radars et la tolérance zéro ont démontré leur efficacité en terme de sécurité routière, il relève "une remise en cause par les usagers de ce système de contrôle-sanction automatisé, ressenti comme un moyen mis en place par l'Etat pour financer les dépenses publiques".
Le texte vise ainsi à obtenir l'adhésion des automobilistes "à l'idée que les radars ne sont pas seulement des 'tirelires', mais avant tout un véritable outil de sécurité routière".
"La grande majorité de l’argent qui est prélevé sur le contribuable est prise non pas sur les chauffards et sur les gens qui conduisent en état alcoolique, c’est sur ces petits délits", explique Alain Fouché au micro de BFMTV. "Ma proposition, en cas d’excès de vitesse inférieur à 10 km/h: seul le retrait de point sera retenu mais par contre pas l’amende. C’est vraiment pour lutter contre ce racket, cette pompe à fric qu’utilise l’Etat."
Selon le délégué général de l'association "40 millions d'automobilistes", Pierre Chasseray, qui soutient cette proposition, "90 à 95% des excès de vitesse sont des excès de 0 à 20 km/h".
"On a souhaité véritablement faire quelque chose pour tous ces micro-excès de vitesse, qui sont des excès de vitesse involontaires. Quelques fois les automobilistes ne sont même pas au courant qu’ils étaient en excès", explique-t-il, joint par BFMTV. "Aujourd’hui, la majorité des Français se fait flasher, et considère donc les radars comme des tirelires. Si demain la majorité des Français ne paie plus parce que ces micro-excès de vitesse ne sont plus sanctionnés par l’argent, on n’entendra plus parler de radars-tirelires."
"Proposition de loi criminelle"
"Si cette mesure est adoptée, nous la paierons le prix du sang", s’indigne de son côté auprès du Parisien Chantal Perrichon, la présidente de la Ligue contre la violence routière. "Certains élus sont obsédés par le désir de casser le permis à points, mais c’est se moquer de l’augmentation de la mortalité au volant alors que le bilan de l’année 2015 devrait se traduire par 3.400 tués sur les routes."
"Comment un élu de la République peut s’amuser à faire parler de lui sur un tel sujet avec une telle proposition?", abonde Jehanne Collard, avocate spécialiste du droit des victimes, contactée par BFMTV. "C’est une proposition de loi criminelle et moi j’appelle toutes les victimes et tous les automobilistes sensés et responsables à se mobiliser contre une telle proposition. On sait que les excès de vitesse sont accidentogènes, il n’y a pas de petit excès de vitesse."
A l'heure actuelle, un excès de vitesse inférieur à 20 km/h dans une zone où la limitation est de plus de 50 km/h est soumis à une amende forfaitaire de 68 euros (minorée à 45 euros si payée dans les 15 jours) et au retrait d'un point sur le permis. Si la vitesse est limitée à 50 km/h ou moins, l'amende est de 135 euros (90 euros si payée dans les 15 jours).