Casino n’attire pas d’industriels pour sa filiale GreenYellow

GreenYellow n’attire pas les foules. Casino a mis en vente sa filiale qui opère dans les services énergétiques et exploite des installations solaires sur ses centres commerciaux. Cette opération doit lui permettre de réduire sa dette qui atteint 6 milliards d’euros. Ses créanciers l’attendent comme signal du désendettement que le groupe tarde à mener depuis trois ans.
Des offres préliminaires doivent être déposées d’ici dix jours mais déjà, l’appétit d’acheteurs potentiels est limité. Les industriels du secteur énergétique ont rapidement étudié le dossier de vente mais ne sont, pour le moment, pas prêts à racheter GreenYellow. "Leur modèle économique n’est pas le nôtre", confie une source proche d’Engie qui n’est même pas sûr de déposer une offre de rachat. Même son de cloche chez TotalEnergies plus occupé à rafler de grosses sociétés à l’étranger. "Personne n’en parle en interne", confie-t-on au siège du groupe.
Un manque d’enthousiasme partagé par les plus petits acteurs. Neoen ne s’intéresse pas non plus au dossier. Et si Voltalia va l’étudier, "il y a peu de chance qu’il dépose une offre", confie un proche de la filiale d’Auchan. La société était pourtant identifiée comme un acheteur potentiel, car son activité interne Helexia se rapproche de celle de GreenYellow. "J’ai testé l’appétit d’une douzaine de groupes d’énergie européens et aucun n’est très motivé", conclut le patron d’une grande banque étrangère à Paris.
Un modèle économique difficile à appréhender
"Naouri est trop gourmand sur le prix", confie un dirigeant du secteur. Le PDG de Casino espère vendre sa pépite pour 1,5 milliard d’euros. Mais il y a un an, il avait échoué à l’introduire en Bourse au même prix. "Cette opération n’était que de la communication pour rassurer ses créanciers qui n’ont guère apprécier d’attendre un an de plus", confie un banquier de Casino.
Selon les sources de marché, GreenYellow vaudrait plutôt un milliard d’euros. Sur ses 85 millions d’euros de marges, peu sont "récurrentes" critique l’une d’entre elles. Son modèle économique est difficile à appréhender. L’entreprise propose des diagnostics de performances énergétiques et des gains d’efficacité avec la mise en place d’installations d’énergies renouvelables. "Ils ont surtout des contrats, et non des projets qu’ils gardent sur le long terme", explique un concurrent. Les industriels, eux, cherchent avant tout des grandes installations pour accumuler des capacités de production renouvelables.
Casino espérait attirer d’autres profils comme des entreprises spécialisées dans les services à l’énergie. Celles-là même qui ont participé à la course au rachat d’Equans, ancienne filiale d’Engie rachetée par Bouygues l’an passé. Mais le spécialiste Spie et le leader Vinci ne sont "pas intéressés", selon des sources proches des deux entreprises. Même constat auprès d’un grand fonds d’investissement américain qui a aussi concouru sur cette opération...
Cinq fonds sur les rangs
Le groupe peut encore miser sur les fonds d’investissement spécialisé dans la transition énergétique. Pour le moment cinq d’entre eux, dont Macquarie, se sont manifestés et devraient déposer une offre de rachat, selon une source proche du groupe. Ils ne restent plus qu’eux pour racheter la filiale de Casino. Et assurer à son PDG, Jean-Charles Naouri, un peu d’air pour entamer le désendettement de son groupe. Et commencer à remonter du cash dans ses sociétés personnelles, Rallye, Foncière Euris et Euris, propriétaires de Casino.
Selon La Lettre A, la société Foncière Euris -qui détient 58% de Rallye, elle-même détenant 51% de Casino- doit rembourser d’ici la fin de l’année 50 millions d’euros à ses banques. Un dividende exceptionnel de 200 millions d’euros de Casino permettrait à cette société d’en récupérer sa quote-part pour faire face à cette échéance. Mais il faut pour cela l’accord des créanciers de Casino, qui sont en partie les mêmes que ceux de Jean-Charles Naouri, pour l’essentiel des banques françaises dont BNP Paribas et Crédit Agricole.
"Casino doit vendre des activités pour se désendetter et remonter des dividendes pour renflouer son propriétaire, confie un dirigeant d’une de ces deux banques. Jean-Charles Naouri doit accélérer".
La vente de GreenYellow est majeure. Si elle ne rapporte pas autant que nécessaire, Casino devra rapidement en envisager d’autres. Celle de Cdiscount est à la fois difficile compte tenu de ses résultats volatils - très dépendants de la pression commerciale d’Amazon -, et du fait qu’il est cœur de la stratégie de Casino. Le groupe dispose aussi d’une filiale importante au Brésil, Pao de Acucar, qui vaut un peu plus de 5 milliards d’euros. Sa vente sera le dernier recours de Casino pour faire face à ses dettes.