Sommet européen sur les migrants: qui veut quoi?

La chancelière allemande Angela Merkel et le président français Emmanuel Macron, à Meseberg le 19 juin. - Ludovic Marin - AFP
Un sommet sous tension. Jeudi et vendredi à Bruxelles, les dirigeants de l'Union européenne vont tenter de surmonter leurs profondes divisions face à la question migratoire. Un sommet qui ponctuera plus de deux semaines de frictions autour de navires transportant des migrants secourus en Méditerranée, auxquels le gouvernement populiste italien a refusé l'accostage.
"L'Europe a beaucoup de défis mais celui lié à la question migratoire pourrait décider du destin de l'Union européenne", a prévenu jeudi matin Angela Merkel devant la chambre des députés. "L'absence d'un accord sur la manière de gérer la crise migratoire pourrait porter un coup fatal au projet européen", a insisté de son côté le président du Parlement européen l'italien Antonio Tajani, dans une tribune publiée par le Guardian. Pourtant, le nombre de migrants a baissé au niveau d'avant 2015, rappelle Le Monde.
Malgré cette amélioration, un accord ne va pas de soi tant les désaccords se sont installés entre les 28 Etats membres. Tour d'horizon des différents groupes qui se sont formés au sein de l'Union.
> Le groupe de Visegrád
La Hongrie, la Pologne, la Slovaquie, l'Autriche sont emmenés sur le plan européen par le président autoritaire hongrois Viktor Orban. Leur position est claire: ils souhaitent fermer leurs frontières et ne pas accueillir les migrants qui arrivent en Europe, ce qui leur vaut des accusations de manque de solidarité. Emmanuel Macron propose d'ailleurs des sanctions financières contre eux: "On ne peut avoir des pays qui bénéficient massivement de la solidarité de l'UE et qui revendiquent massivement leur égoïsme national quand il s'agit de sujets migratoires", a-t-il déclaré. L'Autriche prend la présidence tournante de l'Union le 1er juillet.
> La France, l'Allemagne, l'Espagne, le Portugal
La situation allemande complique l'équilibre de ce groupe: la chancelière allemande est très fragilisée par son ministre de l'Intérieur, Horst Seehofer, qui lui réclame de trouver une solution "européenne" d'ici à la fin du mois. Dimanche, Angela Merkel et Emmanuel Macron ont pourtant appelé à des accords entre plusieurs Etats membres pour dépasser l'absence de consensus.
C'est ce qui est arrivé pour le navire Lifeline, qui demandait à accoster en France: après une semaine de tractations, un accord européen a été trouvé entre la France, l'Italie, Malte, le Portugal, l'Espagne, le Luxembourg, la Belgique et les Pays-Bas: le navire a pu accoster à Malte, et tous les Etats cités ont annoncé qu'ils accueilleraient bien des passagers du navire. "Cela montre qu'il n'y a pas une solution, mais des solutions", commente Christophe Barbier, éditorialiste politique de BFMTV. "Celle-ci était une solution improvisée, mais elle est le signe que les choses peuvent avancer".
> Le cas particulier de l'Italie
Quant à l'Italie, elle représente un cas particulier: son Premier ministre Giuseppe Conte est tous les jours confronté aux déclarations polémiques de son ministre de l'Intérieur Matteo Salvini, chef du parti anti-immigrés de la Ligue. Ce dernier refuse la création de nouveaux "hotspots" dans son pays, alors que Paris et Madrid proposent la création de ces centres fermés dans les pays de l'Union .
Lors du sommet, l'Italie serait toutefois prête à envisager un système de "partage" des migrants, mais elle réclame dans le même temps que ces derniers ne soient plus systématiquement accueillis dans ses ports.
> Quelles solutions?
Si un accord semble quasiment impossible à trouver, cela n'empêchera pas les 28 de s'unir sur un certain nombre de mesures, qu'énumère Christophe Barbier:
"A 28, on peut développer Frontex [l'agence européenne qui aide les Etats membres à gérer leurs frontières] et créer des hotspots pour que les migrants soient accueillis avant de traverser la Méditerranée. Et surtout, on peut développer l'Afrique pour que les migrants n'aient plus envie de partir".
Une solution qui s'inscrit uniquement sur la durée, et ne permet pas de faire face à l'urgence.