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Mounir Mahjoubi va à Bercy: le numérique d’État est-il orphelin?

Une nouvelle équipe à Bercy. Autour du Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances, Agnès Pannier-Runacher (à gauche), secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des Finances, remplace Delphine Geny-Stephann (à droite) et, à gauche, Mounir Mahjoubi, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l’économie et des finances et du ministre de l’action et des comptes publics

Une nouvelle équipe à Bercy. Autour du Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances, Agnès Pannier-Runacher (à gauche), secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des Finances, remplace Delphine Geny-Stephann (à droite) et, à gauche, Mounir Mahjoubi, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l’économie et des finances et du ministre de l’action et des comptes publics - -

Dans le nouveau gouvernement, le poste de secrétaire d'État au Numérique a disparu. Mounir Mahjoubi part à Bercy comme secrétaire d'État auprès du ministre de l’Economie et des Finances et du ministre de l’Action et des Comptes publics. Il assure qu'il continuera a assumer ses précédentes fonctions depuis le ministère de l'Économie. Bonne nouvelle ou mauvais signal politique?

Ce remaniement ministériel était attendu, mais la composition du gouvernement offre une belle surprise. Pour la première fois depuis 2004, il n’y a officiellement plus personne en charge du numérique. Mounir Mahjoubi, secrétaire d’Etat chargé du Numérique depuis l’élection d’Emmanuel Macron, devient secrétaire d'État auprès du ministre de l’Economie et des Finances et du ministre de l’Action et des Comptes publics. Si l'intitulé définitif de son poste doit être confirmé par le Journal officiel, personne n’a été nommé pour le remplacer.

La nouvelle a été aussitôt commentée sur les réseaux sociaux. Sur Twitter, ils sont nombreux à s’étonner de cette chaise vide, au point de faire réagir Mounir Mahjoubi. Dans un tweet, le nouveau colocataire de Bercy se dit "Heureux de continuer [son] engagement au sein du Gouvernement pour une France championne du numérique au service des humains". Il précise que "depuis Bercy, [il aura] tous les moyens d’agir à la transformation de l’économie et de l’État".

Un retour aux sources, puisque depuis 2004, tous les ministres et secrétaires d’État en charge de ce portefeuille (Éric Besson, Nathalie Kosciusko-Morisset, Fleur Pellerin, Axelle Lemaire) étaient installés à Bercy. Mounir Mahjoubi a été le premier à occuper un poste interministériel directement rattaché à Matignon.

Certains, comme Nicolas Dupont-Aignan, trouvent ce remaniement "insignifiant", d’autres se réjouissent de la disparition de ce poste interministériel estimant que c’est le signe d’une maturité, mais aussi que les efforts seront concentrés sur le virage numérique de l’économie et, surtout, des entreprises françaises. D’autant que la veille de ce remaniement, Mounir Mahjoubi inaugurait France Num, un portail dédié aux petites et moyennes entreprises.

Mais étonnamment, le cabinet du secrétaire d’État a fait savoir au Monde que son périmètre reste "inchangé". Il précise qu’il poursuivra son travail sur le "retrait des contenus violents ou haineux en ligne, le RGPD [règlement général sur la protection des données], la protection de la vie privée, l’addiction ou l’inclusion numérique" qu’il restera impliqué avec les ministères de l’Intérieur et des Armées, sur les questions liées à la "cybersécurité".

Un "mauvais signal politique"

La disparition du numérique au gouvernement constitue néanmoins un "mauvais signal politique" aux yeux de Sébastien Garnault, fondateur de CyberTaskForce, une force opérationnelle de travail qui rassemble parlementaires et représentants du monde économique autour des enjeux de cybersécurité.

"La campagne présidentielle d’Emmanuel Macron avait deux piliers très forts qui étaient la transformation écologique et la transformation numérique. En un mois, les deux transformations ont été fortement ébranlées", estime-t-il. "La semaine dernière, la ministre des Armées indiquait que la cybermenace n’avait jamais été aussi vive et qu’on reconnaissait le cyberespace comme un nouvel espace de guerre. A peine quelques jours plus tard, on rétrograde politiquement le numérique. Cela semble difficilement compréhensible à ce stade", ajoute-t-il.

Surtout, le nouveau rattachement de Mounir Mahjoubi soulève des questions d'ordre pratique, dans la coordination des missions qui lui étaient allouées. "L’une des missions de Mounir Mahjoubi, auprès du Premier ministre, était jusqu’à présent de prendre en charge la transformation numérique de l’Etat. Il semble légitime de se demander comment les services du Premier ministre vont désormais accepter de recevoir des instructions de Bercy. Ce qui ne se produit jamais".
Pascal Samama; Elsa Trujillo