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Le Sénat a l'intention de passer au peigne fin cette semaine la taxe Gafa

Les géants du numérique sont souvent mentionnés sous l'acronyme Gafa, qui rassemble: Google, Amazon, Facebook et Apple.

Les géants du numérique sont souvent mentionnés sous l'acronyme Gafa, qui rassemble: Google, Amazon, Facebook et Apple. - Damien Meyer - AFP

Le Sénat examine demain mardi et après-demain mercredi en première lecture le projet de taxe sur les géants du numérique, défendue par Bruno Le Maire, qui suscite des interrogations, notamment sur l'assiette fiscale, au Palais du Luxembourg, à majorité de droite.

Après avoir été adoptée par l'Assemblée nationale, la "taxe Gafa" sur le chiffre d'affaires des géants du numérique, présentée par le ministre de l'Économie Bruno Le Maire comme étant à "l'honneur de la France" après l'échec d'une initiative européenne, va être examinée cette semaine par les sénateurs. Mais les sénateurs sont moins enthousiastes que le gouvernement sur cette taxe.

Ce projet de taxation doit faire de la France un des pays pionniers en la matière, en dépit de l'opposition des États-Unis, mais "le gouvernement prend beaucoup de risques pour un affichage", estime le rapporteur général de la commission des Finances Albéric de Montgolfier (LR) au Sénat.

La taxe que la France souhaite instaurer s'inspire largement d'un projet européen qui n'a pas abouti en raison des réticences de l'Irlande, la Suède, le Danemark et la Finlande.

Le Maire
Le Maire © La "taxe Gafa" est présentée par le ministre de l'Économie Bruno Le Maire comme étant à "l'honneur de la France" après l'échec d'une initiative européenne. Thomas Samson-AFP

Concrètement, la taxe doit concerner les activités numériques qui "créent de la valeur grâce aux internautes français". Elle vise les entreprises qui font un chiffre d'affaires sur leurs activités numériques de plus de 750 millions d'euros dans le monde et de plus de 25 millions d'euros en France. L'idée est de les imposer à hauteur de 3% du chiffre d'affaires réalisé en France sur la publicité ciblée en ligne, la vente de données à des fins publicitaires et la mise en relation des internautes par les plateformes.

Elle devrait s'appliquer à une trentaine de groupes comme Meetic, Amazon, Airbnb, Instagram ou encore la française Criteo, et rapporter 400 millions d'euros en 2019, puis 650 millions en 2020. Pour le sénateur Albéric de Montgolfier, "tout paraît fort simple, mais tout est compliqué".

Recettes de la "taxe GAFA"
Recettes de la "taxe GAFA" © Thomas SAINT-CRICQ, AFP

Certes, "politiquement, il n'y a pas lieu de s'opposer à des taxes s'appliquant aux entreprises qui paient peu d'impôt en France". Mais le rapporteur général pointe "beaucoup d'interrogations" et une initiative unilatérale "très risquée sur le plan juridique". "Est-ce conforme au droit fiscal international ? Aux traités européens ?", interroge-t-il? Et de mettre en garde contre le risque que la France soit un jour contrainte de rembourser les sommes perçues.

Le rapporteur s'interroge aussi sur l'assiette retenue, le chiffre d'affaires, plutôt que le bénéfice, et sur d'éventuels effets négatifs pour le développement d'entreprises françaises qui seraient rachetées par des plus grands groupes.

Pour Albéric de Montgolfier, "le bon niveau", pour une telle taxation, c'est l'OCDE. Mais si elle devait être mise en place unilatéralement par la France "faute de mieux", "il faudrait la sécuriser juridiquement", affirme-t-il. Une position partagée par le groupe centriste, Les Républicains ne s'étant pas encore prononcés officiellement.

La taxe Gafa devra disparaître en 2022

L'Asic (Association des services internet communautaires) a salué dans un communiqué les modifications apportées en commission visant à "sécuriser un peu" le dispositif. La commission a notamment réaffirmé le caractère "temporaire", de la taxe, prévoyant son extinction au 1er janvier 2022.

Devant les députés, Bruno Le Maire avait promis de ne pas relâcher ses efforts "jusqu'à ce que l'OCDE se mette d'accord", jugeant cela "possible dès 2020". La France retirera alors "naturellement sa taxe nationale", avait-il dit.

La taxe, dont l'instauration avait été annoncée par Emmanuel Macron en décembre 2018, en pleine crise des "gilets jaunes", doit contribuer à financer les 10 milliards d'euros de mesures d'urgence économiques et sociales.

Frédéric bergé avec AFP (Véronique Martinache)