Du jamais vu hors période de crise: le déficit français grimperait en 2026 à 6,1% sans coupe budgétaire

Retour à la case départ. Avec la chute du gouvernement de François Bayrou lundi, c'est une nouvelle course contre la montre qui s'engage pour doter la France d'un budget en 2026. Et compte tenu de l'état des finances publiques, il y a urgence.
Reste que si le projet de François Bayrou prévoyait de ramener le déficit public à 4,6% du PIB l'an prochain contre 5,4% cette année, un tel scénario d'assainissement des comptes du pays apparaît à ce stade plus qu'hypothétique, sachant que le prochain Premier ministre aura théoriquement à peine un mois pour présenter un nouveau budget.
Mais Bercy met d'ores et déjà en garde: si aucun effort budgétaire n'était mis en oeuvre l'an prochain, le déficit repartirait à la hausse, à 6,1% du PIB, soit 185 milliards d'euros, selon une note confidentielle dévoilée par Les Échos et que BFM Business a pu consulter.
Un niveau inédit pour la France hors-période de crise. Rappelons que le pays n'est pas en récession et que la croissance -même faible- serait de 0,6% en 2025 selon les dernières projections de la Banque de France. Si on met de côté le Covid, il faudrait remonter à 2010-2011, au plus fort de la crise de la dette en zone euro et après deux années de crise post-subprime pour retrouver un tel niveau de déficit. En 2010, le déficit public avait atteint 6,9% du PIB et en 2011 5,2%.
50 milliards de dépenses supplémentaires
Car sans mesures visant à redresser les finances publiques, les dépenses augmenteraient de plus de 50 milliards d'euros en 2026, à 1.769 milliards d'euros. C'est ce que les experts appellent la "progression tendantielle des dépenses". Plusieurs d'entre elles croissent en effet naturellement d'une année sur l'autre.
Citons par exemple les prestations sociales indexées sur l'inflation (+1,4 milliard attendu), les pensions de retraites également indexées et dont le poids augmente avec le vieillissement de la population (+7,7 milliards) tout comme celui des dépenses de santé (+10,4 milliards), la charge de la dette qui évolue en fonction des taux d'intérêt (+7,9 milliards), la masse salariale de l'État avec la montée en charge de mesures catégorielles déjà décidées (+1,5 milliard) ou encore les lois de programmation, comme celle des Armées, qui engagent des dépenses sur plusieurs années. De leur côté, les recettes augmenteraient deux fois moins vite, à peu près au rythme de l'activité, soit 26 milliards d'euros supplémentaires.
L'effort proposé par le PS stabiliserait le déficit
C'est en tenant compte de ces évolutions naturelles que le gouvernement Bayrou a estimé à près de 44 milliards d'euros l'effort nécessaire pour respecter sa trajectoire de redressement des comptes publics, c'est-à-dire un retour à 4,6% de déficit l'an prochain.
Le Parti socialiste a lui proposé un contre-budget prévoyant 22 milliards d'euros d'effort. De quoi selon lui réduire le déficit à 5% l'an prochain. Pas pour Bercy qui estime que cela permettrait au mieux de le stabiliser à 5,4%, au pire de l'augmenter à 5,7% en retenant certaines hypothèses jugées favorables.