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Finances publiques

Censure du gouvernement: quel avenir pour le Budget 2025?

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Malgré la chute du gouvernement de Michel Barnier, l'examen du projet de loi de finances pourrait se poursuivre afin de doter la France d'un Budget avant la fin de l'année.

La France sera-t-elle dotée d'un Budget 2025 dans les temps? Au lendemain de la chute du gouvernement de Michel Barnier sur le projet de loi de finances de la Sécurité sociale (PLFSS), l'incertitude règne sur le devenir des textes budgétaires. Car la censure a pour conséquence de geler l'examen des projets de loi débattus en séance au Parlement, dont le projet de Budget de l'État (PLF), le gouvernement n'étant plus en mesure de venir les défendre.

Le projet de Budget de la Sécurité sociale, tout comme celui concernant le Budget de l'État, ne sont pas définitivement enterrés pour autant et pourraient, dans l'absolu, poursuivre leur parcours législatif. "Que s'est-il passé hier? D'un point de vue juridique, on a rejeté les conclusions de la commission mixte paritaire" sur le PLFSS, explique sur BFMTV Benjamin Morel, constitutionnaliste et docteur en sciences politiques. Cela veut dire que le texte sur lequel on délibérerait demain, c'est le texte qui sort du Sénat et il reviendrait à l'Assemblée. La disparition du gouvernement ne fait pas disparaître les textes".

Le PLF 2025 repris et amendé par un nouveau Premier ministre?

S'agissant du Budget de l'État, la discussion pourrait aussi se poursuivre puisque la date limite de la navette parlementaire est fixée au 21 décembre pour une publication au Journal officiel le 31 décembre au plus tard. La présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, a d'ailleurs appelé Emmanuel Macron à nommer "rapidement" un nouveau Premier ministre afin de reprendre les débats, estimant qu'avec l'accord de présidents de groupe, un compromis pourrait être trouvé sur le Budget de l'État "sur un socle minimum".

"On pourrait très bien imaginer qu'on prendrait l'engagement d'examiner un budget rectificatif au premier trimestre 2025". Dans l'intervalle, "on pourrait doter la France d'un budget avant la fin de l'année, il est encore temps", a insisté Yaël Braun-Pivet.

"Si un nouveau Premier ministre est nommé avant le 20 décembre, ce n'est pas impossible ni improbable qu'il reprenne à son compte le Budget et qu'il l'amende (...)", souligne la constitutionnaliste Anne-Charlène Bezzina. "Dans ce cadre-là, le Budget continue à vivre et si on l'amende et si on parvient à trouver un compromis politique -là est la difficulté- on peut le faire adopter avant le 31 décembre", abonde Benjamin Morel.

Les Experts : Censure, le gouvernement Barnier renversé - 05/12
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L'hypothèse d'une loi spéciale

Une autre voie possible en cas de manque de temps pour voter un Budget serait, à l'initiative du gouvernement démissionnaire ou d'un nouveau gouvernement, l'adoption d'une loi spéciale "qui permettrait de gagner du temps", estime Benjamin Morel. Ce texte acterait la reconduction du Budget 2024 et autoriserait le gouvernement à continuer à lever les impôts, le temps de voter un nouveau projet de loi de finances en bonne et due forme début 2025.

Le gouvernement démissionnaire a toutefois alerté sur les conséquences de la loi spéciale qui ne permettrait pas selon lui d'indexer sur l'inflation le barème de l'impôt sur le revenu, ce qui augmenterait l'impôt payé par des millions de foyers. "Il y a une question chez les juristes: on n'a pas de réponse pour savoir ce qu'on peut mettre dans cette loi spéciale. (...) On n'a pas de jurisprudence", reconnaît Benjamin Morel.

Reste que le constitutionnaliste ne pense pas qu'un juge "s'amuserait à censurer une loi spéciale -ce qui mettrait le pays dans la panade- parce qu'on aurait une vision trop extensive des lois spéciales". Tous ne sont pas de cet avis mais même s'il était impossible d'intégrer l'indexation du barème de l'impôt sur le revenu dans la loi spéciale, elle pourrait l'être dans le nouveau Budget discuté en début d'année prochaine.

Un Budget par ordonnances peu probable

Si aucun Budget n'est voté le 21 décembre, à l'issue des 70 jours de discussions prévus par la loi, et si le gouvernement démissionnaire n'a toujours pas été remplacé, une autre possibilité consisterait à faire passer le projet de loi de finances par ordonnances (article 47 de la Constitution).

Cette option, qui provoquerait une déflagration sur le plan politique, est toutefois improbable. D'autant que certains experts s'interrogent sur la légalité d'une telle pratique par un gouvernement censuré. Sans jurisprudence, Benjamin Morel recommande à ce titre une "grande prudence" à ce sujet.

https://twitter.com/paul_louis_ Paul Louis Journaliste BFM Eco