Pourquoi le prix du lait français ne peut que continuer à augmenter

La question n’est plus de savoir si le prix de la brique de lait ou du paquet de yaourts va encore augmenter, mais quand. Depuis plusieurs mois, le lait français figure parmi les moins chers de l’Union européenne. Avant les grandes vagues de chaleurs, les éleveurs français vendaient leur production autour de 43 centimes le litre.
Au même moment, outre-Rhin, les industriels et la grande distribution acceptaient de payer les éleveurs allemands 9 centimes de plus. Et ce, alors qu’il y a encore quelques années, le lait allemand était nettement plus abordable que le français.
Des hausses de prix deux fois supérieures en Allemagne
Mais en l’espace d’une année, les écarts de prix entre producteurs européens n’ont cessé de croître. Les éleveurs allemands de vaches laitières ont pu passer des augmentations de prix proche de 50%. Et leurs homologues italiens, dont le lait est aujourd’hui parmi les plus chers de l’UE, ont, eux, bénéficié d’une augmentation de plus de 40%.
Dans le même temps, en France, le prix du litre payé aux éleveurs n’a augmenté que de 23%. Un relèvement de prix dont les éleveurs engagés dans la filière bio se seraient d’ailleurs contentés puisqu’eux doivent accepter de vendre leur production à un prix légèrement inférieur à celui de l’an passé (-1%). A tel point que leur lait, faute de demande suffisante pour les produits labellisés AB, se vend au même prix que celui de leurs collègues restés dans la filière conventionnelle.
Des coûts de production qui se sont envolés
Pourtant, tous ces éleveurs font face à une envolée de leurs coûts de production d’une ampleur exceptionnelle. Il y a d’abord, le prix de l’alimentation de leur cheptel qui complète celle qu’ils peuvent produire eux-mêmes. En mai dernier, elle leur coûtait 26% de plus qu’un an plus tôt. Il y a ensuite, les engrais nécessaires à la production sur leur exploitation des végétaux (maïs, foin, colza...) dont se nourrissent leurs vaches. En l’espace d’une année, leur prix a plus que doublé (+130 %).
Et pour faire fonctionner leurs engins agricoles, il faut du carburant. Même s’il bénéficie pour le moment d’une taxation réduite et que son prix a baissé ces dernières semaines, le gazole non routier coûte aujourd’hui 70% plus cher qu’en août 2021. S’ajoutent les conséquences de la sécheresse. Les vaches n’ont plus rien à paître dans les prés, y compris à la montagne. Les éleveurs sont obligés de puiser dans leurs réserves de fourrage, renforçant les risques ultérieurs de pénurie.
Des éleveurs contraints de réduire leur cheptel
De plus, avec ces canicules à répétition, les vaches produisent moins de lait. Dans les trois régions les plus méridionales de France, la collecte de lait a baissé de 5 à 6% par rapport à l’année dernière. Les éleveurs sont vraiment dans une situation critique. Certains se résignent à réduire leur cheptel, en envoyant à l’abattoir des vaches qui étaient encore en âge de produire. De quoi à la fois réduire leur coût et faire entrer un peu de trésorerie.
Augmenter le prix auquel les industriels leur paient leur lait apparaît donc comme une urgence vitale. Cela suppose évidemment que les prix des produits laitiers payés par les consommateurs augmentent. Dans ses derniers relevés de prix, l’Insee notait qu’en moyenne, la brique de lait demi-écrémé coûtait 4,5% plus cher qu’en juin 2021, soit quelques centimes de plus. Idem pour les yaourts (+4,5%).
Le fromage a, lui, connu une hausse de prix un peu plus importante (+6,4%). Mais toutes ces augmentations apparaissent clairement insuffisantes pour permettre, aujourd’hui, aux éleveurs de vaches laitières de rentabiliser leurs exploitations.
